Les cadres de l’Observatoire national de l’énergie et des mines ont conçu et rédigé la première édition d’un rapport quinquennal. C’est le résultat d’un travail de mise en conformité du bilan énergétique tunisien qui a duré plus de dix ans.
Selon l’Observatoire national de l’énergie et des mines, l’analyse se limite à la période 2010-2019. Elle ne couvre pas l’année 2020 bien qu’on soit en début de 2021. Ceci à cause, d’une part, de l’indisponibilité, actuellement, de certaines données essentielles pour l’élaboration du bilan de 2020, à l’instar de la consommation de la branche d’énergie et l’autoproduction d’électricité. D’autre part, de la complexité de l’exercice en lui-même qui demande une durée relativement longue pour le traitement, le recoupement, la compilation et la validation des résultats.
En effet, sur la base des données issues directement du bilan et en combinaison avec d’autres données macroéconomiques, un ensemble d’indicateurs a pu être calculé dans une optique de compréhension et d’analyse des tendances de l’offre et de la demande d’énergie.
Ce nouveau rapport présente ainsi les résultats obtenus pour les dix années en question. Il analyse les tendances observées au niveau des différents blocs des bilans énergétiques pour finir par le calcul d’un ensemble d’indicateurs de base. Et ce, à partir des statistiques des trois principaux flux des bilans énergétiques, à savoir : la consommation intérieure brute, la transformation et la consommation finale énergétique.
Sans pour autant aller dans les détails du calcul des indicateurs d’efficacité énergétique qui fait partie des prérogatives de l’Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie, un ensemble de constats a pu être dégagé; à savoir :
Production primaire en baisse
La production nationale a baissé de 39% sur la période 2010-2019. Soit une moyenne de 5.3% par an. Cette baisse a été observée surtout au niveau du pétrole brut dont la part relative dans la production totale est passée de 48% à 37% en l’espace de dix ans. La baisse de la production nationale s’est accompagnée d’une baisse des exportations (-55% sur dix ans équivalent à -8.6% par an en moyenne) et par une croissance de 37% des importations (une moyenne de 3.5% par an).
Apport du renouvelable encore très modeste
En s’intéressant au renouvelable hors biomasse, force est de constater qu’en dépit de la multiplication par cinq de sa part dans la production primaire entre 2010 et 2019 (de 0.5% à 2.6%), son apport en termes de quantité reste encore très modeste. De même pour la production électrique. La part des énergies renouvelables est passée de 1.2% à 3.7%. Malgré ce bond, induit par l’apport croissant puis relativement stable de l’éolien et la croissance soutenue du photovoltaïque, les énergies renouvelables contribuent encore très modestement au mix électrique. Elles restent tributaires de l’apport très fluctuant de l’hydraulique. Ainsi, les progrès réalisés restent encore loin des objectifs affichés.
Peu d’évolution de la demande totale d’énergie
La consommation intérieure brute a enregistré une évolution modeste de 1% en moyenne annuellement. Cette tendance n’est pas vraiment surprenante. Durant les neuf ans post-révolution, le PIB de la Tunisie s’est accru de 16.9%. Soit à un rythme annuel moyen de 1,8%. Notons que l’intensité énergétique primaire a diminué d’environ 0.8% par an très loin de l’objectif tracé de 2-3% par an. Ce ralentissement de la croissance économique associé à l’effort en termes d’efficacité énergétique s’est répercuté sur la demande d’énergie.
Le gaz naturel est, de loin, la première énergie consommée en Tunisie représentant, en 2019, 49% de la demande totale, suivi par les produits pétroliers dont la part s’est située à 40%. Toujours utile de rappeler que le mix électrique présente une écrasante domination des centrales thermiques au gaz, oscillant entre 92% et 97%.
Une balance de plus en plus déséquilibrée
La balance énergétique nationale s’est caractérisée par une amplification du déficit sur la période 2010-2019. En effet, cette dynamique découle de la diminution de la production, alliée à une augmentation modérée de la consommation.
Ainsi, le déficit énergétique a plus que triplé. Soit un accroissement de 209% sur la période et 13.3% par an en moyenne. Le déficit énergétique a changé d’échelle. Il a grimpé à 55% en 2019. Alors qu’il n’était que de 20% en 2010.
Un secteur de transformation plus performant
Sur dix ans, le niveau des rendements de génération électrique s’est amélioré de plus de 16%. L’orientation vers les centrales à cycles combinés au détriment des turbines à vapeur a réduit la consommation spécifique du secteur électrique. D’ailleurs, la contribution des centrales à cycles combinés a progressé au fil des années passant de 41% en 2010 à 66% en 2019, au détriment des turbines à vapeur qui ont vu leur part décroître à 14% en 2019 contre 39% en 2010. Ce qui a entraîné ainsi une amélioration de la consommation spécifique.
Une structure de consommation finale qui bouge
La consommation énergétique finale a progressé de l’ordre de 1.2% par an en moyenne sur les dix années en question. La prédominance des produits pétroliers est très marquée. Ces produits couvrent plus de la moitié de la demande finale.
Des permutations entre les trois « gros » secteurs, à savoir l’industrie, le transport et le résidentiel, ont été observées durant de la période. D’ailleurs, on observe une évolution franche de la consommation des secteurs résidentiel, tertiaire et agriculture contre une quasi-stagnation pour les autres secteurs.
Des besoins en électricité en hausse
La part de l’électricité dans la demande finale a augmenté de 16.1% à 18.7%. Cette évolution s’explique par la hausse systématique de la consommation d’électricité dans tous les secteurs, et plus particulièrement dans le résidentiel et le tertiaire. Elle est due notamment à la croissance du taux d’équipement en appareils électriques ainsi qu’au développement de la climatisation. Pour faire face à cette demande croissante en électricité, la production totale a augmenté de 3.4% par an sur toute la période.
Des besoins en climatisation qui pèsent
Le poids de l’électricité dans le secteur résidentiel qui ne cesse d’augmenter montre une tendance d’électrification des usages mais aussi d’une sensibilité de la consommation à la hausse des températures traduite par le développement du parc de climatisation et la croissance du nombre de jour de climatisation issue de phénomène de réchauffement climatique. La demande électrique relative à la climatisation est un sujet de préoccupation car elle va se traduire par des appels importants et simultanés de puissance pendant les périodes chaudes.
La pointe électrique enchaîne les records
D’ailleurs, la puissance maximale de pointe est passée de 3010 MW en 2010 à 4247 MW en 2019, soit une augmentation de 3.9% par an en moyenne. Cette augmentation s’explique essentiellement par une demande de plus en plus forte pendant les périodes de canicule au cours de la saison estivale.
M.T (Source ATPG)