L’autorisation vient d’être accordée aux grandes surfaces de vendre du tabac. C’est une étape dans l’organisation des commerces clés pour les finances publiques. Avec la vente illégale de cigarettes dans le viseur.
L’importance de cette loi est double. D’abord, elle permettra à un grand nombre de consommateurs d’acheter au juste prix les produits du tabac, dont les cigarettes; et de lutter contre la pénurie de ce produit à cause des problèmes de distribution.
Recettes fiscales importantes en jeu
De plus, le poids du commerce parallèle de cette matière sera réduit. Puisqu’elle est commercialisée aujourd’hui clandestinement via les kiosques de fruits secs. L’Etat supportant donc une perte fiscale significative chaque année.
Ainsi, en 2021, les autorités comptent récupérer 397 MTND de plus de taxes par rapport à l’année précédente. Sachant qu’en 2020, l’Etat a collecté plus de 1 200 MTND. Soit de loin la première source des droits de consommation en Tunisie.
D’ailleurs, la production s’est élevée à 10 586 tonnes. Sans compter les importations qui se sont établies à 16 688 tonnes pour une valeur de 465,626 MTND.
Organiser le marché
Cette décision va économiquement dans le bon sens. Bien qu’elle puisse causer un manque à gagner pour les débits de tabac. Dorénavant, il y a la possibilité d’acheter ses cigarettes en faisant ses courses, sans le besoin de s’arrêter sur un kiosque. Et pour les hypermarchés ou les magasins qui vendent de l’alcool, c’est la cerise sur le gâteau. Car ils pourront liquider de grandes quantités de produits, de facto, complémentaires.
Par ailleurs, en termes de santé, les cigarettes contrefaites représentent un danger certain. Les fumeurs continuent toutefois à les acheter en tant qu’alternative aux cigarettes originales. Soit pour l’indisponibilité de ces dernières, soit pour une question de pouvoir d’achat.
Tout bénef pour la RNTA
Cette décision est également une chance pour la RNTA afin d’améliorer ses comptes. La société, bien qu’elle détienne le monopole de la production du tabac en Tunisie, affiche des comptes largement dans le rouge. En 2018, son résultat d’exploitation était déficitaire de -34 MTND, pour un résultat net de -44,8 MTND. Ses résultats reportés sont de -300,1 MTND causant des fonds propres négatifs de -262 MTND. Les dettes de la société se chiffrent de 271,9 MTND.
En partie, les problèmes de la RNTA sont au niveau de la distribution. Si la société trouve des canaux plus organisés et qui ont un accès privilégié à la clientèle, comme les grandes surfaces, cela lui permettra d’augmenter sa production et donc sa profitabilité. Cela l’encouragera à investir dans de nouvelles lignes. Et de limiter ainsi les importations de cigarettes; surtout que ces dernières sont réellement vendues à perte.
A la table des fauves ?
Ces décisions sont au profit du consommateur final, mais pas dans l’intérêt du marché parallèle. Pour certains, ce n’est pas le cas. Ils pensent qu’il vaut mieux supprimer la licence de vente de tabac au lieu d’autoriser les puissantes grandes surfaces à vendre les cigarettes.
A notre avis, libéraliser ce commerce n’est pas un choix sanitaire. Déjà, un grand nombre de jeunes fument et les conséquences sanitaires se manifesteront dans les années à venir. Alors que les pays font tout pour réduire les espaces dans lesquels les personnes peuvent fumer. Tout en rendant la cigarette moins accessible par différents moyens. Et tandis qu’une liberté totale risque de rendre le contrôle quasiment impossible et ouvrira la porte davantage au commerce clandestin.
Arrêtons la schizophrénie autour des cigarettes
Bien qu’il y ait des victimes en termes commercial de cette décision, il faut reconnaitre que l’organisation des circuits de distribution est un moyen de sauver la RNTA et d’engranger davantage de recettes fiscales. Sachant que les kiosques de fruits secs n’ont pas le droit de vendre des cigarettes et qu’ils doivent aujourd’hui respecter leur réglementation.
C’est un exemple de mesures à suivre dans d’autres domaines. Nous devons accepter l’organisation et comprendre que payer ses impôts et respecter la loi sont deux conditions nécessaires pour sauver le pays. Nous ne pouvons demander de bons services publics, tout en refusant d’accomplir ses devoirs de citoyens. Il faut arrêter cette schizophrénie qui risque de mettre à genou la Tunisie.