Pendant ses deux mandats à la tête de l’Etat fédéral américain, feu Ronald Reagan avait fait tout ce qu’il pouvait pour aider l’Afrique du sud raciste à maintenir son système d’apartheid. Mais il n’osa jamais se ridiculiser en affirmant par exemple qu’il « n’y aurait jamais de paix au sud du continent africain tant que le monde ne reconnaitrait pas l’Afrique du sud comme un Etat indépendant pour les Blancs ». Il avait sans doute souhaité au fond de lui que le courant mondial anti-apartheid qui prévalait à l’époque s’essouffle. Mais il n’alla pas jusqu’à établir un lien entre la paix dans le sud du continent africain et la légitimation du pouvoir d’une minorité blanche sur la majorité noire. »
Quarante ans après, son lointain successeur, Joseph Biden, est en train de tout faire pour maintenir et même renforcer le système d’apartheid établi en Israël. Pour servir la droite extrême israélienne, M. Biden ne recule même pas devant le ridicule. « Il n’y aura pas de paix, tant que les Etats du Moyen-Orient ne reconnaissent pas Israël comme un Etat juif indépendant ». Ainsi déclarait-il, il y a quelques jours. Et les cinq millions de Palestiniens d’Israël? Ils comptent pour du beurre. Ils acceptent éternellement leur statut de citoyens de seconde zone ou ils quittent!!!
Légèreté et formules à l’emporte-pièce
On sait que l’actuel président américain ne réfléchit pas trop avant de parler. Certes, on peut répondre par un haussement d’épaule quand il se qualifie lui-même de « sioniste ». Ou qu’il qualifie, sans rime ni raison, le président russe Vladimir Poutine de « tueur ». On pourrait expliquer cela par la légèreté de l’homme et sa propension à utiliser les formules à l’emporte-pièce.
Mais cela ne s’applique pas à sa dernière déclaration. En effet, cette dernière établit un lien entre la paix au Moyen-Orient et la reconnaissance d’Israël comme « Etat juif indépendant ». De par sa gravité, une telle affirmation ne peut être mise sur le compte de la légèreté du président ou de sa propension à aligner les bourdes.
Que la droite orthodoxe israélienne ou la droite évangélique américaine établissent un tel lien, cela n’a rien d’étonnant. Mais l’inquiétant est que ce lien soit établi et cette reconnaissance exigée par le président de la plus grande puissance du monde. Une puissance qui n’arrête pas de se présenter comme « la force du bien » et « le modèle à suivre » dans le monde.
Inquiétant, mais pas étonnant. Car, durant sa longue carrière dans les arcanes de l’establishment américain, M. Joseph Biden a eu largement le temps d’être coulé dans le moule de la partialité, de l’iniquité, de l’injustice et du parti pris propres à la méga-puissance américaine.
La rengaine de l’antisémitisme mâchée et remâchée
Qui pourrait compter le nombre de crimes, de massacres, de destructions d’immeubles, de maisons, d’hôpitaux, d’écoles et d’infrastructures commis par Israël en plus d’un demi-siècle, et plus précisément entre 1967 et 2021? Qui pourrait compter le nombre de femmes et d’enfants enterrés sous les décombres de leurs maisons? Le nombre de Palestiniens descendus comme des lapins par « l’armée la plus morale du monde »? Le nombre de prisonniers qui moisissent dans les prisons israéliennes? De même que le nombre de colonies construites sur des terres confisquées par la force?
Face à l’étendue des ravages et à la gravité sans précédent des crimes, les grandes puissances ne se résolvent ni à faire le point sur les conséquences innommables de l’injustice du siècle; ni, encore moins, à appliquer les centaines de résolution qui moisissent dans les tiroirs des différentes organisations internationales. A quoi avons-nous encore droit? A la rengaine de l’ « antisémitisme » et du « droit d’Israël à se défendre contre le terrorisme palestinien ». Rengaine mâchée et remâchée ad nauseam à Washington, Londres, Paris et Berlin.
Sans le moindre problème de conscience face à l’apartheid
Il faut dire qu’en ce qui concerne la question palestinienne et les crimes israéliens, Londres, Paris et Berlin ne sont rien d’autres que des danseurs sur les airs musicaux joués à Washington. Les Etats-Unis auraient-ils eu de vrais dirigeants, de vrais hommes d’Etat d’une grande probité et de hautes qualités morales, la question palestinienne aurait été résolue dès le 22 novembre 1967, jour de l’adoption par le Conseil de sécurité de l’ONU de la résolution 242.
Or, 54 ans après l’adoption de cette résolution qui constitue la base d’une résolution juste et honnête de la question palestinienne, voilà le 46e président américain qui va plus loin encore que ses prédécesseurs. En établissant un lien entre la paix au Moyen-Orient et la reconnaissance d’Israël comme « Etat juif indépendant ».
Et le plus tragi-comique est que l’Amérique continue à financer la destruction des territoires palestiniens, en fournissant à Israël bombardiers, armes et munitions. Et dans le même temps, et sans le moindre problème de conscience, à se présenter comme un généreux donateur qui contribue à la reconstruction. Un cynisme que les historiens des prochains siècles ne pourront expliquer sans le recours à la psychiatrie.