La concession du gazoduc Maghreb-Europe qui relie les installations pétrolières algériennes jusqu’à l’Espagne en passant par le Maroc expirera le 31 octobre prochain. Sera-t-elle renouvelée? L’enjeu économique et stratégique est de taille pour les trois capitales. Explications.
Les compagnies pétrolières algériennes ont subi en 2020 des pertes de l’ordre de 40% de leurs revenus. A cause de l’impact négatif de la crise sanitaire et de l’effondrement des prix du pétrole sur le marché mondial.
Ainsi, l’année dernière, le géant pétrolier et gazier algérien Sonatrach a réalisé un chiffre d’affaires à l’export de 20 milliards de dollars. Soit une baisse de 39% par rapport à l’année précédente.
Algérie: 40% de perte de revenus pétroliers
Selon un haut responsable au sein du groupe, la crise sanitaire du Covid-19 affectait en 2020 la quasi-totalité des secteurs économiques dans le monde. Et en particulier celui du pétrole et du gaz. Précisant que les compagnies pétrolières algériennes essuyaient des pertes estimées à 40% de leurs revenus; et avaient, par conséquent, décidé de réduire de 32% leurs investissements.
Dans ce contexte, il a rappelé la baisse de 35% du prix moyen annuel du Sahara Blend et la réduction de la production de pétrole brut de la compagnie nationale, en conformité avec les décisions de l’OPEP.
Toutefois, Sonatrach enregistre une nette amélioration durant les cinq premiers mois de l’année 2021 par rapport à 2020. La production primaire d’hydrocarbures ayant atteint 78 millions TEP. Soit une hausse de 4% par rapport à fin mai 2020. Sur la même période, le chiffre d’affaires à l’export s’est établi à 12,6 milliards dollars contre 8,7 milliards dollars l’année dernière.
Un gazoduc stratégique
Ainsi, Sonatrach pourra toujours assurer l’approvisionnement de l’Espagne en gaz naturel. Sachant que l’Algérie est depuis des années le principal fournisseur de gaz de la péninsule ibérique.
Or, la concession du gazoduc Maghreb-Europe qui traverse le Maroc, se terminera le 31 octobre prochain. Et tout indique que le Maroc n’envisagerait pas de renouveler le contrat pour ce gazoduc qui transporte le gaz algérien vers l’Espagne et le Portugal. La crise politique entre Madrid et Rabat sur fond du Sahara occidental serait à l’origine de cette décision du royaume chérifien.
L’Algérie « prête à tous les scénarios »
« Concernant l’Algérie, on était déjà préparé en 2018-2019 à tous les scénarios. Toutes les précautions nécessaires ont été prises pour faire face à l’éventuel non renouvellement du contrat du gazoduc Maghreb Europe par le Maroc. Ceci dit, quelle que soit la décision qui sera prise concernant cette concession, elle n’aura aucun impact sur les exportations de Sonatrach dont une partie passe directement par le gazoduc Medgaz ». Ainsi assurait pour sa part le PDG du géant pétrolier.
Et d’ajouter: « Parce que nous avons le Medgaz avec une capacité de 10,5 milliards de mètres cubes par an. Nous avons les unités de liquéfaction de gaz dont les capacités sont disponibles. Nous fournirons la demande espagnole sans aucun problème. »
Entré en fonction en mars 2011, ce gazoduc d’une longueur de 210 km avec une profondeur de 2 000 m, relie les installations algériennes de Béni Saf jusqu’au port d’Almería en Espagne, en passant sous la mer Méditerranée.
Rabat dans l’embarras
Si Alger semble ne pas craindre le non renouvellement du contrat pour le gazoduc Maghreb-Europe, Rabat est dans une position non enviable.
Car, si le renouvellement du gazoduc aboutissait, le royaume chérifien continuerait à être rétribué un demi milliard de dirhams de redevance par an; tout en continuant à s’alimenter en gaz.
Sinon, il faut attendre la mise en service d’un gazoduc partant du Nigéria et transitant par l’ensemble de l’Afrique de l’Ouest. Un chantier titanesque qui ne verra pas de sitôt le jour.