La réaction des marchés internationaux à la crise politique tunisienne ne s’est pas faite attendre. Et le FMI n’est pas en reste. Pour rappel, 29,8% de notre dette souveraine est cotée. Le pays est sous la loupe et il faut s’attendre à un flux de rapports et d’analyses sur les conséquences du 25 juillet 2021.
Sans entrer dans les détails de l’origine de l’impasse actuelle, le FMI s’est dit prêt à aider la Tunisie dans sa lutte contre la COVID-19 et dans ses tentatives de se relancer et d’assainir ses finances.
Le FMI : inquiétudes mais appui renouvelé
Pour l’institution de Bretton Woods, le pays fait face à des pressions économiques et sociales inédites. Elles sont causées par une crise sanitaire aigüe et des objectifs ratés de croissance rapide, inclusive et créatrice d’emplois. Sous surveillance, il est objectivement difficile de parvenir à l’accord visé par Tunis, soit un programme de quatre milliards de dollars sur trois ans.
Certes, les analystes à Washington veulent obtenir plus de détails sur la feuille de route envisagée par le Président Kaïs Saïed, car elle sera déterminante. Plus elle est claire, plus nous avons une chance de reprendre rapidement les négociations techniques. Un accord avant la fin de l’année sera un miracle.
Fitch Ratings : les réserves de change sous pression
C’est effectivement ce que pense Fitch Ratings qui n’a pas mâché ses mots. Après son rapport sévère trois semaines auparavant, l’agence attire l’attention sur le fait qu’un non-accord avec le FMI va fragiliser davantage la position extérieure de la Tunisie dont le service de la datte s’élèvera à 4% du PIB sur la période 2021-2023. Sur la même période, le déficit courant serait de 8% du PIB.
De plus, les manœuvres politiques de dimanche dernier peuvent sérieusement entraver la signature d’un accord rapide avec le bailleur de fonds. Les attentes de 2021 étaient maigres en matière de rétrécissement du déficit budgétaire, de stabilisation de la dette et d’allégement des pressions sur la balance des paiements même avant cette crise. Alors que dire aujourd’hui. Sans l’aval du FMI pour un nouveau programme avant la fin de l’année, la Tunisie risque d’enregistrer une forte détérioration de sa position extérieure. Les réserves de change à la BCT sont de l’ordre de 8,9 milliards de dinars fin juin 2021. Et toute baisse significative pourrait avoir des conséquences sur la notation souveraine.
Cependant, Fitch ne pense pas que Kaïs Saïed utilisera ses pouvoirs pour traiter des problèmes économiques urgents, en particulier celui de la masse salariale (17% du PIB en 2020). Une telle décision est impopulaire et peut faire émerger des critiques à l’encontre de lui.
Par ailleurs, le support des pays occidentaux à la Tunisie pourrait être revu à la baisse. En effet, grâce à son statut d’unique démocratie après le printemps arabe, elle a bénéficié de grandes ressources depuis 2011. Toutefois, les risques de flux migratoires restent toujours une motivation pour que l’UE appuie les finances du pays.
Les cartes politiques pèsent aussi
Notre statut de démocratie n’est plus un argument auprès des marchés. Désormais, nous ne pouvons compter que sur notre valeur intrinsèque. Pour gérer ce genre de moments, la politique doit jouer un rôle clé. Les agences de notation ou les bailleurs de fonds font des analyses techniques et des évaluations; mais ce n’est pas tout. Un appui européen ou américain peut changer les équilibres dans les deux sens.
C’est pourquoi les positions de ces forces par rapport à ce qui se passe à Tunis est à suivre de près. Rien n’est encore joué. Et les semaines à venir seront parmi les plus décisives de l’histoire contemporaine du pays.