En habile joueur d’échecs, le président de la République Kaïs Saïed avance patiemment ses pions. Premier coup : l’activation de l’article 80 de la Constitution pour geler les activités du Parlement et, dans la foulée, lever l’immunité parlementaire des élus. Coup suivant : le probable recours à l’article 163 du Code électoral qui permet de dissoudre le Parlement sans coup férir. Et ce dans le respect total de la Constitution. Un coup de maître.
Tout porte à croire que le président de la République Kaïs Saïed s’apprête à lancer son deuxième « missile ». Après avoir activé le fameux article 80, lequel a produit une onde de choc proche d’un tsunami local et régional, Kais Saied prépare le coup d’échec suivant : dissoudre le Parlement qui tombera de lui-même grâce au recours à l’article 163 du Code électoral, convoquer des législatives anticipées. Le tout dans l’observation stricte de la Constitution.
Ainsi, au cours de la semaine dernière, dans le tumulte de l’histoire qui s’est brusquement accélérée en Tunisie, une information judiciaire est passée sous silence, pourtant, elle peut s’avérer d’une importance capitale.
Selon le porte-parole du Tribunal de première instance de Tunis 1 et du Pôle judiciaire économique et financier, Mohsen Dali, le ministère public a entamé, depuis les deux premières semaines de juillet 2021, l’examen de plusieurs dossiers qui concernent le mouvement Ennahdha, le parti Qalb Tounes et l’association Aich Tounsi. Et ce, en lien avec des contrats de lobbying ainsi que « l’obtention de financements étrangers pour la campagne électorale de 2019 et l’acceptation de fonds dont l’origine est inconnue pour financer cette campagne électorale ».
Des accusations gravissimes car certains des députés affiliés à ces partis risquent de perdre leurs sièges dans l’hémicycle pour peu que la justice prononce un verdict invalidant les résultats des listes électorales de 2019.
Le rapport accablant de la Cour des comptes
Pour rappel, la Cour des comptes révélait 10 novembre 2020, dans un rapport de 300 pages, les infractions commises par ces partis politiques pendant des législatives de 2019. Où il était question d’ « argent étranger » ayant servi à remporter des sièges au Parlement. Ainsi que le recours au lobbying via des douteuses sociétés étrangères pour impacter les résultats des législatives.
Toujours selon la Cour de comptes, Ennahdha aurait conclu, depuis 2014, un contrat avec une société étrangère moyennant la somme de 187 215 dollars.
Pour sa part, le président du parti Qalb Tounès, Nabil Karoui aurait signé, au nom de son épouse Salwa Smaoui, un contrat de l’ordre de 2,85 millions de dinars avec une société étrangère.
Quant à l’Association Aich Tounsi, elle aurait conclu un contrat d’une valeur de 15 000 dollars avec une société étrangère.
L’arme fatale
Or, l’article 163 du Code électoral stipule que les membres d’une liste électorale dont il est avéré par la suite qu’ils ont reçu un financement étranger pour leur campagne, perdent automatiquement leur place au Parlement.
En clair, si la justice validait le rapport de la Cour des comptes, 91 députés des listes électorales d’Ennahdha (52 sièges), Qalb Tounès (38 sièges) et Aich Tounsi (1 siège), perdraient leurs sièges au Parlement, sans parler des poursuites judiciaires à leur encontre.
Du coup, non seulement le Parlement sera d’office dissous, mais les élus en délicatesse avec le financement étranger seront interdits de se présenter aux prochaines échéances électorales. Bon débarras !
Pour les islamistes et leurs acolytes de Qalb tounes, c’est le coup de grâce. Pour Kais Saied, c’est la fin de la partie…avec Echec et mat.
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