Beaucoup de ceux qui ont soutenu bruyamment et avec force manifestations de joie Kais Saied, dans la nuit du 25 au 26 juillet, se demandent pourquoi le président avance-t-il si lentement ? Bien que la situation dans le pays soit explosive, bien que l’économie soit à l’arrêt et l’administration en état de paralysie, le président prend tout son temps comme si rien n’urge. Il reçoit ses hôtes. Il leur parle doctement comme d’habitude. Il fait des visites sur le terrain, mais rien de vraiment concret depuis l’euphorie de ce fameux 25 juillet.
Kais Saied a sans doute ses raisons que nous ignorons et qui expliquent le rythme un peu trop lent avec lequel il agit. Un tel rythme, il faut bien le dire, est dans l’intérêt de ses adversaires qui s’agitent et se démènent en Tunisie et à l’étranger dans l’espoir de reprendre l’initiative et baliser de nouveau la route qui les mènera encore une fois au pouvoir qu’ils ont subitement perdu.
Et là, tous les moyens sont bons, y compris les plus abjects, à l’image de ceux utilisés par Rached Ghannouchi qui tente de se relever de nouveau après le coup de massue que lui a asséné Kais Saied par le biais de l’article 80. Non content d’avoir mené le pays au désastre, s’accrochant au pouvoir telle une sangsue, le chef du parti islamiste tente de se sauver du naufrage en appelant au secours les pays étrangers.
Conscient de l’insuffisance du soutien des deux seuls pays, le Qatar et la Turquie, qui partagent son idéologie islamiste, Ghannouchi fait appel aux pays influents du nord de la Méditerranée pour qu’ils interviennent en sa faveur et l’aident à regagner son perchoir. Il faut plutôt parler de chantage adressé par le gourou et qui se résume ainsi : « Ou vous m’aidez à reprendre mon pouvoir que j’exerçais avant le 25 juillet, ou vous vous préparez à recevoir un demi-million d’immigrants fuyant le pays » !
Cet appel clair et sans ambigüité à l’intervention de puissances étrangères contre la Tunisie n’a rien d’étonnant de la part du chef du parti islamiste. Ghannouchi doit sa formation politico-religieuse à Hassan el Banna et Sayyed Qotb qui lui ont enseigné le mépris de la mère-patrie et la fidélité aveugle à la confrérie. Ils lui ont appris que tous les moyens sont bons, y compris les plus immoraux et les plus vils, s’ils peuvent aider la confrérie à se développer ou à la sauver si elle est confrontée à un danger imminent.
L’appel est adressé également à la puissance mondialement dominante. Le représentant de l’islamo-terrorisme tunisien aux Etats-Unis, le dénommé Radhouane Masmoudi, est allé jusqu’à supplier les décideurs américains de ne pas envoyer les vaccins promis à la Tunisie à un moment où l’épidémie fait des ravages. C’est dire le degré de dégradation morale, d’avilissement et d’abjection que peut atteindre ce représentant nahdhaoui qui mène la belle vie en Amérique.
Ayant vu son appel aux autorités américaines ignoré, Radhouane Masmoudi s’est rabattu sur les médias. Il a financé à coups de milliers de dollars la publication d’un article de propagande contre son pays dans le New York Times. Le but étant de montrer à l’opinion américaine comment les Tunisiens vivaient dans la démocratie paradisiaque de Rached Ghannouchi avant que Kais Saied ne les plonge dans une dictature infernale.
Ce que ce représentant de l’islamo-terrorisme ignore ou feint d’ignorer est que le peuple américain, dont l’écrasante majorité ne sait même pas où se trouve notre pays sur la mappemonde, se soucie comme d’une guigne de ce qui se passe en Tunisie. Ceci d’une part.
D’autre part, les responsables de la politique étrangère américaine se soucient eux aussi comme d’une guigne que la Tunisie soit une démocratie ou une dictature, un pays prospère ou misérable. Ce qui motive leurs décisions, c’est l’idée qu’ils se font de la Tunisie en fonction des intérêts américains dans la région MENA (Middle-East-North Africa).
Il y a dix ans, l’islam politique avait le vent en poupe et Barack Obama et Hillary Clinton avaient tenté de l’imposer dans le monde arabe. Ils ont réussi dans certains pays et échoué dans d’autres. Aujourd’hui, l’islam politique est un canard boiteux qui inspire plus le dédain et le mépris que la bienveillance et le respect.
Cette vérité est dure à accepter par Ghannouchi & Co. qui versent dans le déni tout en se plaisant dans leur monde fantasmagorique. Pour apaiser leur inquiétude et calmer leur trouble, ils sont réduits à entretenir la fantasmagorie d’une intervention étrangère qui ramènerait la Tunisie à l’avant-25 juillet. Ou à courir derrière le mirage d’une opinion publique américaine soucieuse de la survie d’un courant politico-religieux moribond.
Mais Ghannouchi & Co. se sont vite rendu compte qu’entretenir des fantasmagories et poursuivre des mirages ne les mèneront pas très loin. Ils se sont rendus à l’évidence que tout un peuple les prend pour responsables de dix ans de malheur. A cela s’ajoute un isolement international quasi-général.
Ennahdha au pied du mur ? Sans aucun doute. Mais supposons, ce qui n’est guère exclu, que Ghannouchi s’adonne de nouveau à son sport favori : la duplicité, l’hypocrisie et les virages à 180°. On ne compte plus les fois où, en dix ans, Ghannouchi a tourné casaque. A retourné sa veste et changé radicalement de position. Combien de fois est-il passé d’un extrême à l’autre ? On l’a vu avec Ben Ali, avec Beji Caid Essebsi, avec Nabil Karoui, etc. ; on l’a entendu faire l’apologie des terroristes qui lui rappelaient sa jeunesse avant qu’il ne se découvre une âme de démocrate qui ne jure que par la démocratie des urnes. En un mot, le chef islamiste a toujours conspué ses adversaires avant de les caresser dans le sens du poil s’il a un intérêt à assurer ou une menace à éviter.
Rien de surprenant donc s’il procède à un ultime retournement de veste dans une tentative désespérée d’exorciser la grave menace qui pèse sur lui et sur son parti. Personne ne sera surpris si, après avoir crié sur les toits pendant dix jours que Kais Saied est un putschiste qui a violé la Constitution, il changerait radicalement de position pour affirmer qu’il se plierait à la volonté du peuple et qu’il soutiendrait toutes les mesures prises par le président de la république le 25 janvier…
Cela dit, et même si un tel scénario se concrétise, le président devrait être sur ses gardes et ne pas prendre pour argent comptant un nième retournement de veste du chef islamiste. Il l’a sonné en appliquant l’article 80 de la Constitution. Il devrait lui donner le coup fatal par l’application de l’article 163.