Rached Ghannouchi a tenu à préciser que la Tunisie a évité un « bain de sang » lorsqu’il avait invité ses partisans à la retenue au lendemain du 25 juillet 2021. Et ce, dans une tribune publiée sur les colonnes du quotidien britannique, The Independent. Mais, avertit-il, « cette retenue ne saurait durer indéfiniment ». Une gifle et un bonbon, comme dirait le délicieux dicton tunisien.
Rached Ghannouchi, le président « gelé » de l’ARP veut convaincre la terre entière qu’il a subi l’injustice du siècle. Ainsi, fidèle à ses vieilles habitudes, il s’est adressé à la presse étrangère pour crier à la victime. Mais curieusement, il a choisi le quotidien britannique The Independent. Journal qu’il a failli, il y a presque neuf ans, attaquer pour diffamation.
En effet, suite à un article publié le 28 août 2012 suggérant que le parti de Rached Ghannouchi s’est vu offrir une importante somme d’argent par l’émir du Qatar, The Independant avait officiellement présenté ses excuses à Rached Ghannouchi. Tout en précisant, dans un bref droit de réponse, que le parti Ennahdha « n’a reçu aucun financement en provenance d’un Etat étranger, en violation des lois tunisiennes régissant les partis politiques ».
Pour rappel, Rached Ghannouchi avait menacé à l’époque d’intenter un procès contre le journal britannique ainsi que le journaliste Robert Fisk, à l’origine de cette information; à moins que des excuses officielles ne soient présentées.
Une prétendue sagesse
Ainsi, dans une tribune publiée sur les colonnes du quotidien britannique, Rached Ghannouchi fustige son ennemi juré, le président de la république Kaïs Saïed. Tout en cherchant à montrer aux Occidentaux le visage d’un homme pétri de sagesse et de retenue, sans lequel le sang aurait coulé à flot.
Le leader historique du mouvement islamiste Ennahdha a également affirmé à ceux qui veulent bien l’entendre qu’il a évité au pays « un bain de sang ». Et ce, quand il imposait la retenue à ses partisans, en les invitant à quitter les alentours du palais du Bardo, lundi 26 juillet dernier. Au lendemain des mesures exceptionnelles prises par le président de la République d’activer l’article 80 de la Constitution. Mais aussi de geler pour 30 jours les activités du Parlement et de lever l’immunité des députés.
Cependant, a-t-il averti, cette retenue ne saurait durer indéfiniment. Puisqu’il a « le devoir de défendre la démocratie tunisienne ».
Retrait, la tête basse
Toutefois, M. Ghannouchi semble oublier qu’ayant observé un semblant de sit-in, à l’aube du lundi 26 juillet, dans sa berline climatisée, il avait lancé un appel pathétique à ses partisans. Et ce, pour les inviter à le rejoindre en masse autour de l’hémicycle. Peine perdue, puisque une petite foule clairsemée venait à son secours, portant des pancartes de fortune. Il devait battre en retraite, la tête basse…
D’autre part, le cheikh a tenu à préciser que le Président a « rejeté les appels au dialogue; mais nous espérons que la sagesse finira par prévaloir ».
Kaïs Saïed « au bord du gouffre »
« Nous appelons le président Kaïs Saïed à se retirer du bord du gouffre. Et à s’engager dans un dialogue politique réel et inclusif ». C’est encore ce qu’il ajoutait sur les colonnes du média britannique. Affirmant que cela devrait inclure « la révocation de la suspension du parlement, la nomination d’un Premier ministre et d’un gouvernement voté par le parlement qui devrait être consulté sur les réformes politiques ».
« Devant les yeux de la communauté internationale, la démocratie tunisienne, lueur d’espoir pour le monde arabe, est en train de s’éteindre, par un schéma d’événements trop familier. Nous ne pouvons pas permettre que cela se produise », conclut-il d’un ton menaçant.
Maniant à merveille les menaces diffuses et un ton doucereux, le cheikh de Montplaisir ne veut pas insulter l’avenir en coupant définitivement les ponts avec le locataire du palais de Carthage.
Après l’avoir accusé d’avoir entrepris une « prise de pouvoir », Ghannouchi a baissé le ton. En évitant d’utiliser le mot « coup d’État » et en n’appelant n’a pas la communauté internationale à intervenir, de quelque manière que ce soit. Comme se fut le cas lors de son entretien désastreux avec le Corriere della Sera.
Mais, il a mis en garde contre la « dictature »: « Nous ne pouvons pas laisser ces défis conduire à une autre dictature. D’innombrables Tunisiens ont donné leur vie et se sont sacrifiés pour construire un système démocratique capable de protéger les libertés et d’assurer la justice sociale et la dignité ». Ainsi martèle-t-il.
Plus démocrate que M. Ghannouchi on en meurt.