Plusieurs observateurs de la scène politique reprochent au président de la République Kaïs Saïed de ne pas communiquer avec les médias et peu avec les Tunisiens. Cependant, il semble qu’il ne s’agit pas d’un problème de communication.
Il s’agit d’une stratégie de communication qui consiste à une rupture totale avec les méthodes classiques de communication. Car, dans tous les cas, Kaïs Saïed a pu transmettre ses messages aux Tunisiens. Il a pu le faire à travers des photos lourdes de sens et des propos qui interpellent les Tunisiens sur des sujets critiques. Nous essayons de décrypter ses messages à travers ses apparitions.
Gardien et protecteur de la religion
A un certain moment le président de la République a multiplié les visites aux mosquées et les entretiens avec les Imams. Des photos ont été diffusées sur les réseaux sociaux le montrant faire la prière. Des gestes qui ne doivent rien au hasard. Kaïs Saïed sait pertinemment que la religion est un sujet sensible pour la bonne majorité des Tunisiens. Pour cette raison, il s’emploie à montrer son respect et son attachement à la religion. Dans le même sillage, il mise sur un islam de tolérance. Et ne manque pas de faire des allusions à l’islam politique et aux extrémistes. D’ailleurs, sa visite à la mosquée Zitouna, au mois d’avril dernier, s’inscrit dans ce cadre. Rappelons, également, que Zitouna rime avec un islam de tolérance.
Un citoyen comme les autres
Qui ne se rappelle pas des visites du président aux cafés populaires et aux boulangeries! Sachant que nous n’avons pas vu de telles visites avec de telles fréquences chez les anciens présidents de la République. Se rendant aux cafés et aux boulangeries, à l’écoute des citoyens tunisiens, ces actions lui donnent un aspect d’un citoyen ordinaire. Un président soucieux de la vie quotidienne de son peuple. Tantôt on le voit siroter son café dans un café populaire, tantôt on le voit, également, faire la queue dans une boulangerie pour acheter une baguette. Grâce à ces scènes qui envahissent les réseaux sociaux, l’internaute pourrait comprendre qu’il a à faire à un président en symbiose avec son peuple. Un président qui se veut proche des soucis de Monsieur Tout-le-monde.
Kaïs Saïed, partisan et défendeur des démunis
Loin des festivités hautes en couleurs et des milieux savants des féministes, Kaïs Saïed a choisi de célébrer le 13 août en rendant visite à un groupe de femmes artisanes du quartier populaire Hay Helal de Tunis. D’ailleurs, lors de cette visite, il était question d’améliorer les conditions du travail de ces femmes et de la défense de leurs droits socio-économiques. Deux choix qui ne doivent rien au hasard: le premier est celui du quartier qui est l’un des plus précaires du Grand-Tunis. Quant au second, il s’agit de la femme artisane précaire et pas la femme savante, intellectuelle et élitiste. Et Kaïs Saïed sait pertinemment que l’ancien président de la République, Béji Caïd Essebsi, avait remporté la présidentielle grâce aux suffrages des femmes.
Je suis l’unique Chef suprême des forces armées et sécuritaires
Il ne manque de le dire et de le rappeler. Pas uniquement que par les mots. Mais aussi à travers plusieurs visites à des postes frontaliers, au ministère de l’Intérieur; dans ses entretiens avec les forces spéciales. Le président de la République a rompu le jeûne avec des soldats et a effectué plusieurs activités avec eux.
Ainsi, il affirme à ses détracteurs qu’il détient les pouvoirs militaire et sécuritaire. Pour le président, le commandement suprême des forces armées militaire et sécuritaire lui revient. D’ailleurs, c’est ce qu’il annonçait lors d’un discours à l’occasion de la commémoration du 65ème anniversaire de la Fête des forces de sécurité intérieure.
Adieu les partis politiques et plus besoin de parlement
Depuis ses premières apparitions médiatiques, Kaïs Saïed n’a pas manqué de répéter que le temps n’est pas celui des partis politiques. Et que ceux-ci finiront par disparaître. Les internautes se rappellent encore d’une célèbre vidéo de Kaïs Saïed, le 25 juillet 2013, où il appelait les partis politiques au gouvernement et en opposition à démissionner et à ne plus faire de la politique. Cela ne date donc pas d’hier.
Plusieurs interventions du Président convergent dans ce sens: « Les partis politiques ont pollué la vie politique et le parlement ne représente pas la volonté du peuple tunisien ». La preuve qu’il a gelé le parlement, plus tard.
Ainsi, lors de ses discours, Kaïs Saïed n’a jamais manqué de critiquer avec virulence le parlement et sa classe politique. Les accusant d’avoir creusé le fossé entre les Tunisiens et les partis politiques.