La Banque Mondiale, autant que le FMI d’ailleurs, prétend que pour progresser, les pays en développement doivent recourir à l’endettement extérieur et attirer des investissements étrangers. Cet endettement sert principalement à acheter des équipements et des biens de consommation aux pays les plus industrialisés. Cependant, les faits démontrent depuis des décennies que cela ne marche pas.
Les modèles n’ont fait qu’accentuer la forte dépendance des PED à l’égard des organismes prêteurs avec l’illusion d’atteindre un jour un niveau de développement auto-soutenu.
Les prêts avaient même fini par devenir des bouées auxquelles se cramponnent les pays endettés et un puissant moyen d’influencer les pays qui s’endettent en maintenant leur assujettissement (ou dépendance) économique et culturelle. Ils participent toutefois à une vision cohérente, théorisée et conceptualisée.
Une véritable idéologie du développement, c’est-à-dire un gros mensonge que l’on finit par tenir pour une vérité vraie, la vraie voie et la vraie vie. Et dans le cas où les faits viendraient à démentir la théorie, la Banque ne remet pas en cause la théorie. Bien au contraire, elle cherche à déformer la réalité pour continuer à protéger le dogme.
« Les prêts avaient même fini par devenir des bouées auxquelles se cramponnent les pays endettés »
En 2011, alors que le feu de la révolte couvait sous la cendre, la Banque Mondiale louait les réalisations de l’omnipotent président Zine al-Abidine Ben Ali, au pouvoir depuis 24 ans, qui appliquait fidèlement les recettes néolibérales recommandées par les bailleurs de fonds. Incapables de se remettre en question, les experts de la BM prétendaient ne pas comprendre les racines profondes de la révolte qui avait conduit à la fuite du président et à la chute du régime.
Pourtant, disent-ils, le pays a enregistré des progrès réguliers sur le plan de l’élimination de l’extrême pauvreté, de la réduction des inégalités, du partage de la prospérité. Des réformes salutaires étaient en cours et la croissance tenue pour être appréciable.
Le comportement, jugé irrationnel de la « rue arabe », n’avait simplement pas été anticipé bien que tous les indicateurs quantitatifs étaient au vert.
Y aurait-il maldonne ? Un travestissement de la réalité ? Car les 40% les plus pauvres de la population, étant beaucoup moins mécontents de leur sort qui s’était nettement amélioré, n’avaient pas de véritable raison pour descendre dans la rue.
C’est donc la classe moyenne qui était la plus mécontente, car alors que la situation générale s’améliorait, elle n’en recueillait pas les fruits. C’est donc elle qui s’est mobilisée et a envahi « la rue ».
« Le comportement, jugé irrationnel de la « rue arabe », n’avait simplement pas été anticipé bien que tous les indicateurs quantitatifs étaient au vert »
Nulle mention évidemment de la manière très peu fiable avec laquelle la Banque Mondiale collecte des informations sur la consommation des ménages et sur leurs revenus, rendant ses données incertaines, et partant transformait ses savants calculs en pures divagations clairement contredites par les faits.
Dix ans après, les populations expriment toujours leur profond mécontentement à l’égard des effets sociaux, économiques et politiques des recettes néolibérales. En attendant, la BM est toujours prête à aider.
La BM autant que le FMI ne sont pas, hélas, des organisations caritatives, mais des établissements de crédit qui cherchaient depuis 77 ans à obtenir pour les pays actionnaires le meilleur rendement de l’argent qu’ils prêtent et qui ont systématiquement prêté afin d’influencer leur politique, qui n’est autre que celle des États-Unis.
Dès lors, l’endettement extérieur a été souvent utilisé comme un instrument de subordination des débiteurs. Quitte à soutenir des dictatures qui promettent à leurs peuples des réformes ambitieuses sans d’autres moyens pour les réaliser que celui de recourir à la dette extérieure.