Environ 18 millions de citoyens sont appelés ce mercredi 8 septembre à élire leurs représentants, dans un double scrutin législatif et local, au Maroc. Avec une éventuelle abstention record et un nouveau mode de calcul, le parti islamiste au pouvoir depuis dix ans risque d’y laisser des plumes.
Afin de limiter l’abstention, un phénomène endémique au Royaume chérifien, le scrutin législatif de 2016 avait plafonné à 43%, les élections législatives et locales auront lieu en un seul jour, ce mercredi 8 septembre 2021. Où environ 18 millions de citoyens sont invités à déposer leurs bulletins de vote. Et ce, pour désigner leurs futurs membres de la chambre des représentants du Maroc (395 représentants, au travers de 31 listes); ainsi que 31 000 élus communaux et régionaux.
Risque d’une abstention record
Le hic, c’est l’absence de sondages d’opinion en période électorale au Maroc. Une étude sur l’indice de confiance publiée en février indiquait que 64% des Marocains sondés n’ont pas l’intention de participer aux élections. 98% d’entre eux n’ont même pas leur carte d’électeur.
Pourquoi ce désintérêt manifeste pour la chose publique? « Le Maroc n’a pas encore atteint le niveau des démocraties établies dans lesquelles les citoyens sont conscients que les partis politiques sont des institutions qui jouent pleinement leur rôle et sont capables de les servir ». C’est ce qu’estime l’analyse pertinente d’un observateur politique marocain.
En effet, le peu d’intérêt des Marocains pour ce scrutin cardinal risque de brouiller les cartes. Car, les législatives sont d’une importance capitale pour le parti Justice et Développement (PJD) au pouvoir depuis dix ans ; même s’il ne détient pas les ministères régaliens. Lequel lorgne vers un troisième mandat sous l’égide de l’actuel Premier ministre, Saad Dine El Othmani.
Un Parlement sans pouvoir réel au Maroc?
Ce parti qui se réclame d’un islam modéré, le seul dans la région à ne pas avoir été balayé par le Printemps arabe, avait créé la surprise en 2011. Puisqu’il remportait haut la main la majorité à la Chambre des représentants (Parlement marocain).
Mais, spécificité marocaine oblige, rien ne se fait dans le royaume sans l’aval du Palais. Celui-ci détermine les grandes orientations dans la vie politique, sociale et économique. A charge pour le gouvernement de les appliquer scrupuleusement.
En effet, la nouvelle Constitution adoptée en 2011 a, sur le papier, accordé de larges prérogatives au Parlement. Mais dans la pratique, les grandes décisions dans les domaines stratégiques comme l’agriculture, les énergies et l’industrie relèvent du domaine réservé du Palais royal.
Un mode de calcul controversé
L’autre originalité de ce double scrutin réside dans la répartition des sièges à la Chambre des représentants. Et ce, sur la base du nombre des électeurs inscrits et non des votants.
Une nouveauté depuis la tenue des premières élections au Maroc en 1960 qui aura pour résultat d’éparpiller les voix. Handicapant ainsi les grands partis et grossissant a fortiori les rangs des petites formations.
Une manœuvre destinée par le Palais à rééquilibrer la scène politique en coupant les ailes du parti islamiste au pouvoir ? D’ailleurs, conscient des conséquences prévisibles de ce mode de calcul, le PJD s’y est fortement opposé.
Ainsi, même s’il obtenait le même score qu’en 2016, 125 sièges il y a six ans, le parti islamiste n’obtiendrait, selon le nouveau mode de calcul, que 80 à 85 sièges.
Mais, que le parti islamiste au pouvoir depuis dix ans obtienne une majorité confortable ou étriquée, il sera contraint d’adopter une charte. En effet, elle découle du « nouveau modèle de développement » souhaité par le monarque. Et ce, afin de réduire les profondes disparités sociales du pays et doubler le PIB par habitant. Vaste programme.