Des milliers de manifestants parmi eux des hommes politiques et acteurs de la société civile se sont rassemblés, depuis ce dimanche matin, devant le Théâtre Municipal, à Tunis, pour dénoncer les mesures d’exception décrétées, le 25 juillet dernier, par le président de la République, Kais Saied, les qualifiant de « coup d’Etat » ainsi que le décret présidentiel n°2021-117, estimant qu’il s’agit d’une tentative du chef de l’Etat de s’accaparer tous les pouvoirs.
Les manifestants, dont le nombre est estimé entre 3 et 4 mille, selon des estimations sécuritaires, ont appelé à la destitution du président Kais Saied et l’annulation du « coup d’Etat » pour « défendre la démocratie et protéger la Constitution », scandant des slogans tels que « le peuple réclame la destitution du président » ou encore « Pour la bannière nationale, non à la dictature, non au populisme et non au fascisme ». Deux rassemblements se sont côtoyés.
De l’autre côté de l’avenue Habib Bourguiba en face du Théâtre municipal, des centaines de manifestants partisans du président Kais Saied se sont rassemblés pour clamer leur soutien aux mesures exceptionnelles décidées par le président de la République le 25 juillet dernier et le 22 septembre courant.
Parmi les manifestants contre les mesures exceptionnelles, le député du mouvement Ennahdha, Sayed Ferjani, a estimé que le président de la République s’est retiré, lui-même, sa légitimité le jour où il a mis en place les décrets et annulé la Constitution, soulignant qu’ « aucune réforme ne sera acceptée si elle n’est pas faite dans le cadre de la Constitution et les procédures légales».
« Les mesures d’exception doivent prendre fin le plus tôt possible »
De son côté, Abdellatif Mekki, dirigeant démissionnaire du mouvement Ennahdha, a déclaré à la presse que les mesures d’exception doivent prendre fin le plus tôt possible, ajoutant que le peuple n’a d’autre choix que de barrer la route à toutes les formes de despotisme et de dictature.
Quant au député Iyadh Elloumi (démissionnaire du parti Qalb Tounes), il a déclaré à l’agence TAP que la violation de la Constitution est un crime dont la responsabilité revient à Kais Saied, ajoutant que les mouvements sociaux aboutiront à « la destitution et à l’incarcération du président ».
Elloumi a appelé à la désobéissance civile en refusant de payer les taxes et à présenter le président de la République à la justice pour « haute trahison », en application à l’article 88 de la Constitution.
Mohamed, un participant au rassemblement de protestation, a réclamé l’activation de la Constitution, des activités du parlement et des institutions de l’Etat, estimant que les dernières décisions du chef de l’Etat « ont transgressé toutes les lois et l’éthique politique ».
De son côté, Fatma a fait part de son refus à ces décisions dont particulièrement le décret présidentiel 2021-117, en vertu duquel Kais Saied a « transgressé les dispositions de la Constitution, dans une tentative de s’accaparer le pouvoir et retourner à la dictature ».
Ainsi selon le jeune Nizar, le combat va continuer jusqu’à ce que le président de la République revienne sur ses dernières décisions, que ce soit les mesures d’exception du 25 juillet ou le décret Présidentiel n° 117 du 22 septembre 2021, relatif aux mesures exceptionnelles.
Il s’agit de décisions unilatérales qui interviennent uniquement pour rétablir le despotisme, a-t-il regretté.
Rassemblement de soutien à Kais Saied,
Participant au rassemblement de soutien à Kais Saied, l’ex-dirigeant du Courant démocrate (Attayar), Mohamed Ammar, a déclaré à l’agence TAP que le rassemblement de ce dimanche vient confirmer que les libertés ne sont pas menacées, rappelant que les forces démocratiques qui sont sorties dans la rue auparavant ont été lynchées.
« Il est nécessaire d’être à l’écoute de la rue qui a accueilli favorablement les décisions du 25 juillet dernier », a-t-il dit, estimant que le rôle des partis politiques et des organisations nationales est d’inciter le chef de l’Etat à accélérer la sortie de cette situation.
De ce fait, les sympathisants du président Saied se sont rassemblés derrière les barrières de sécurité dressées par les policiers. Et ce pour encadrer les deux groupes de manifestants et éviter les échauffourées.
Anis, l’un d’eux, a déclaré qu’il « est hors de question que le parlement retourne à ses activités », affirmant que « le peuple tunisien a attendu suffisamment longtemps pour les réformes mais que la majorité des politiques agissent uniquement pour leurs propres intérêts ».
Et de préciser que la présence des sympathisants de Saied était « spontanée et non à la demande d’une quelconque partie et ce, pour rectifier un processus qui tarde à venir depuis 10 années ».
Un rassemblement contre les mesures exceptionnelles
En outre, des dirigeants d’Ennahdha dont Imed Khémiri et d’autres ayant démissionné du mouvement tels que Samir Dilou, Abdellatif Mekki, Jamila Ksiksi, ont participé au rassemblement contre les mesures exceptionnelles décidées par le président Kais Saied. Il en va de même pour certains députés notamment Iyadh Elloumi et Samira Chaouachi, des figures politiques de différents courants et acteurs de la société civile (Ridha Belhadj, Samir Ben Amor, Ayachi Hammami et Abderrazak Kilani) ont également participé au rassemblement.
En outre, le président Kaïs Saïed a annoncé le 25 juillet dernier une série de mesures exceptionnelles sur la base de l’article 80 de la Constitution. Il a décidé la suspension de toutes les activités du parlement pendant 30 jours, la levée de l’immunité parlementaire des députés et la révocation du chef du gouvernement Hichem Mechichi.
Par ailleurs, le 22 septembre, il a promulgué un décret présidentiel (n°2021-117) portant sur de nouvelles mesures exceptionnelles, dont le maintien de toutes les activités du parlement suspendues, le maintien de la levée de l’immunité parlementaire des députés et la suspension de toutes les indemnités et avantages accordés au président du parlement et aux députés.
Avec TAP