La Tunisie a fortement besoin d’une diplomatie dynamique de haut niveau capable de mener des négociations au nom de la souveraineté nationale afin de mobiliser près de 7 milliards de dinars dans le cadre de la coopération bilatérale, a déclaré, jeudi, à TAP l’expert en économie et en marché financier, Moez Hadidane, rappelant dans le même cadre que les perspectives de financement intérieur et extérieur restent limitées .
L’expert a réagi au communique du conseil d’administration de la de la Banque Centrale de Tunisie (BCT) réuni, mercredi, et dans lequel il a exprimé sa préoccupation au sujet du tarissement aigu des ressources financières extérieures, face aux besoins importants pour boucler le Budget de l’Etat pour l’année 2021. Ceci nécessitera, selon la BCT, l’intensification de la coopération financière bilatérale d’ici la fin de l’année, afin de mobiliser autant de ressources extérieures que possible et d’éviter le financement monétaire.
Pour Hadidane, l’environnement régional , ainsi que les pays voisins; tels que l’Algérie et l’Égypte, peuvent constituer une alternative pour mobiliser des prêts qui permettront de boucler le budget 2021.
Et de poursuivre que la Tunisie peut recourir aux pays amis pour obtenir des prêts ou bénéficier de financements et des prêts accordés par les banques affiliées à ces pays ou des banques privées.
L’appel lancé par la BCT pour dynamiser la coopération bilatérale est intervenu après le blocage des négociations déjà engagées par le gouvernement de Méchechi avec le Fonds monétaire international(FMI) , outre la hausse du coût de toute sortie du pays sur le marché financier international .
Pour financer le budget de l’Etat, la Tunisie a besoin de financements multilatéraux mobilisés les bailleurs de fonds comme la Banque mondiale, le FMI et d’autres institutions financières, a expliqué Hadidane.
Coopération bilatérale : l’avis des experts
Le Représentant résident de la Société financière internationale (IFC), Georges Ghorra avait déclaré, récemment, lors d’un webinaire organisé par l’Association des Tunisiens des Grandes Ecoles (ATUGE), sur le thème « Création monétaire: a-t-on un autre choix dans l’immédiat? », que FMI exige un plan de réformes crédible qui puisse faire l’objet d’un consensus entre la centrale syndicale et le patronat.
« Le FMI attend aujourd’hui plus d’assurance du prochain gouvernement », avait-t-il souligné, appelant la Tunisie à solliciter l’aide des « pays amis » afin de boucler le budget de 2021.
Safouane Ben Aissa, universitaire et économiste avait, également, mis l’accent sur la nécessité de demander une aide financière auprès des « pays amis » comme l’Arabie Saoudite; et ce, dans le cadre des droits de tirage spéciaux (DTS). En effet, le DTS est un avoir de réserve international détenu par le FMI. Les pays membres l’utilisent pour compléter leurs propres réserves.
Selon l’économiste, ce mécanisme offre la possibilité aux pays riches de réaffecter leurs DTS au profit des pays pauvres et endettés. D’après lui, ce mécanisme pourrait être une alternative à la « planche à billets ». Et d’ajouter que toute création monétaire directe ou indirecte ne fera qu’amplifier davantage le taux d’inflation estimé actuellement à 5,7%.
La Banque centrale met en garde contre le financement direct
La Banque centrale avait mis en garde contre le recours au financement monétaire et ses répercussions sur le niveau de l’inflation que sur les réserves en devises et la gestion du taux de change du dinar, outre son impact négatif sur les relations de la Tunisie avec les bailleurs de fonds et les agences de notations souveraines.
Selon l’ancien administrateur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Moez Laabidi, le financement direct ou la « planche à billets » est « un choix de lâche » au sens politique du terme. Cela est de nature à aggraver l’inflation.
De même qu’elle a entraîné une dégradation de la note souveraine de la Tunisie, a-t-il estimé. Au lieu de recourir à la planche à billets, a-t-il dit, il serait plus judicieux de combattre l’économie de rente et l’économie informelle et de développer
le secteur des énergies renouvelables, afin d’alléger la facture énergétique.
L’ancien administrateur de la BCT a, également, mis l’accent sur la nécessité d’imposer des normes de gouvernance au sein des entreprises publiques, estimant que le budget de l’Etat n’est plus en mesure de supporter la mauvaise gouvernance dans ces établissements. D’après lui, les négociations bilatérales avec le FMI restent une piste à explorer. Mais cela reste tributaire d’un plan de réforme « crédible ». Le prochain gouvernement est appelé à s’engager sérieusement dans une dynamique de réformes « convaincantes » pour relancer les négociations.
Avec TAP