Si le marché de la dette en Tunisie reste en dessous des attentes, notamment en termes de profil des émetteurs, les montants levés sont relativement importants. Sur la période 2014-2020, les emprunts obligataires privés totalisent 5 461 MTND. Ce qui n’est pas peu eu égard aux périodes difficiles que le marché a traversé.
Sur cette période, la répartition des investisseurs a évolué, surtout en 2020. La part du lion est revenue, pour la deuxième année de suite, aux compagnies d’assurance qui ont assuré 37,6% des souscriptions. Les assureurs ont devancé les OPCVM dont la contribution était de 27,1%. C’est une nette hausse par rapport à 2019 (21,7%), mais une dégradation par rapport à 2013 où ces véhicules souscrivaient à 48,3% des emprunts.
Les autres catégories de personnes morales ont contribué à hauteur de 14,7% des souscriptions. Confirmant ainsi leur émergence en tant que nouveaux investisseurs en dette. Cette classe de souscripteurs est à saluer puisqu’elle offre une profondeur au marché. C’est également le résultat des efforts des intermédiaires en Bourse qui ne cessent d’exploiter toutes les possibilités de placement. Pour rappel, les autres personnes morales ne représentaient que 0,5% du volume des souscriptions en 2013.
Viennent ensuite les personnes physiques avec 8,5%. Elles sont attirées par les rendements des emprunts obligataires, surtout à taux fixe. Alors que les placements à des rémunérations intéressantes auprès des banques se sont significativement réduit l’année dernière.
La CDC a également joué son rôle en souscrivant à 8% des montants émis. C’est une contribution indirecte de l’Etat à la promotion du marché financier tunisien.
Pas de profonds changements pour les banques
Paradoxalement, les banques se classent en dernière position avec une part de 4,1% seulement. Cela peut être expliqué par deux facteurs.
Le premier est la stratégie de gestion des risques. L’exposition à une entreprise, un groupe ou un secteur tient compte de tous types de dettes et de titre de capital. Les principes de bonne gestion requièrent de revoir à la baisse le rythme des investissements en dettes corporate.
Le second est l’effort que ces établissements sont en train de fournir dans les adjudications des Bons de Trésor. La trésorerie des banques et la capacité de leurs bilans à intégrer des risques a des limites. Et il faut des choix en matière d’investissement.
Un dernier élément à prendre en considération: la valeur de ses souscriptions. Car les montants émis ont bien évolué de 590 MTND en 2019 à 1 162 MTND en 2020. Ainsi, les banques ont investi 47,666 MTND l’année dernière en ces titres de dettes; contre 66,670 MTND en 2019. Il ne s’agit donc pas d’une chute vertigineuse. L’effort réel a été fourni par les assureurs (437,137 MTND) et les OPCVM (315,064 MTND).
Développer le marché primaire par la promotion du marché secondaire
Pour 2021, la physionomie ne devrait pas changer. Il y a eu peu de sorties et les OPCVM obligataires restent sur une collecte nette, ce qui leur permet d’élargir leur plafond d’investissement. Idem pour les assureurs qui, grâce à l’évolution de leurs ventes, génèrent de nouvelles capacités de souscriptions.
Le développement du marché ne peut se développer qu’avec un marché secondaire dynamique. Avec un volume inférieur à 100 MTND depuis le début de l’année, trouver une contrepartie pour une sortie d’urgence n’est pas si évident. Cela réduit la liste des investisseurs potentiels à ceux qui ont la capacité de garder le titre jusqu’à maturité.
C’est sur ce point que l’effort des autorités doit se concentrer. En effet, intervenir sur le marché secondaire et l’animer conduiront automatiquement à encourager les investisseurs à souscrire aux nouvelles émissions.