Comme les choses changent. L’ancien président de Reporters Sans Frontières (RSF), qui combattait l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali, croit maintenant que « l’islam n’est pas soluble dans la démocratie ». Et joue l’entremetteur pour rassembler les rangs et faire triompher l’extrême-droite raciste et xénophobe à la prochaine présidentielle française.
« Je demanderai, je souhaiterai, j’implorerai, que vous deux, Marine et toi, vous vous retrouver en février prochain. Chacun sait que c’est à ce moment-là que les choses se cristallisent ». Celui qui parle ainsi n’est autre que Robert Ménard, ancien président de Reporters Sans Frontières (RSF). Il s’adresse, à Béziers (Sud de la France), la ville dont il est maire, le 16 octobre 2021, au polémiste Éric Zemmour, candidat potentiel de la présidentielle française d’avril 2022. Un Éric Zemmour qui professe, depuis quelque temps, sa haine contre les migrants maghrébins.
Oui ainsi parle celui qui, il y a une quinzaine d’années, avait fait d’une lutte contre le régime de l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali un des grands combats de sa vie pour la liberté de la presse et contre la dictature.
Casser de l’arabe
Allant jusqu’à investir, le 29 juin 2001, le bâtiment de l’Office National du Tourisme Tunisien (ONTT), situé avenue de l’Opéra, à Paris, avec une vingtaine de personnes, pour protester contre l’arrestation d’une opposante tunisienne. Et parlant concernant la Tunisie d’un « pays de flics ! »
Mais voilà que le même homme, qui se faisait passer pour un militant de gauche, se découvre une autre appartenance. Ainsi, il se révèle être en réalité un adepte de l’extrême-droite raciste et xénophobe.
D’ailleurs, il brigue, en 2014, la mairie de Béziers. Et il se fait réélire, en 2019, à la tête d’une liste composée de militants du Front National (FN) de Marine Le Pen. Oui ce parti dont la cheffe n’est autre que la présidente d’un mouvement connue pour vouloir casser de l’arabe.
Avec un discours populiste et proche des identitaires, Robert Ménard se dit à l’écoute du reste de certains idéologues de la droite fasciste. Comme Renaud Camus, connu pour défendre la thèse de ce qu’il appelle « le grand remplacement ».
« Le grand remplacement » ? Une « thèse »– si l’on peut décrire ainsi une vision raciste- selon laquelle « il existe un processus, délibéré, de substitution de la population française et européenne par une population non européenne, originaire en premier lieu d’Afrique noire et du Maghreb ». Une « thèse » que défend Renaud Camus, un soi-disant intellectuel, du reste condamné, en 2014, pour « provocation à la haine et à la violence contre les musulmans ».
« Le danger d’un islam conquérant »
Dans un article publié, en 2013, par notre confrère L’Obs, l’épouse de l’ancien président de Reporters Sans Frontières, reconnaît d’ailleurs que son époux a « évolué sur la question de l’islam » et a « entamé une phase de réflexion » sur « le danger d’un islam conquérant, agressif ». Il pense, à ce sujet, que « l’islam n’est pas soluble dans la démocratie ».
On se demande, à ce niveau, pourquoi avoir, dans les années 2000, pris tant de peine pour défendre les opposants de Ben Ali qui se battaient contre lui au nom de la démocratie. Puisqu’il ne croit pas que nous autres Tunisiens pouvons accéder par nous-mêmes à celle-ci.
Robert Ménard a aujourd’hui incontestablement, comme on dit, d’autres chats à fouetter. En effet, il joue l’entremetteur entre Marine Le Pen et Éric Zemmour, qui sont tous deux originaires d’Algérie. Pays d’où leur famille sont parties lorsque l’Algérie a accédé à l’indépendance. Et ce, afin de rassembler les rangs de l’extrême droite et lui permettre, elle qui rêve de chasser les émigrés maghrébins hors de France, d’accéder à la magistrature suprême.
L’artiste nigérien Laouali Iro Abdoul Aziz avait coutume de dire que « Plus le temps passe, plus tu découvres le vrai visage des gens ».