En remettant en cause le nombre d’électeurs ayant voté pour Kaïs Saïed au second tour de l’élection présidentielle de 2019, la présidente du parti destourien, Abir Moussi, semble opter pour une rupture irréversible avec le président de la République. Au grand dam du combat commun contre l’islam politique.
En politique, il ne faut jamais insulter l’avenir. Une maxime que Abir Moussi devrait peut-être faire sienne.
La présidente du Parti destourien libre (PDL), Abir Moussi, assurée selon des sondages concordants d’être aux premières loges lors des prochaines élections législatives anticipées, inéluctables selon le timing présidentiel, ne devrait-elle pas être inspirée de constituer un « front républicain » avec le président de la République, Kaïs Saïed pour combattre le mouvement d’Ennahdha?
Car, affaiblir le Président, alors qu’il mène une lutte à mort contre le Temple bleu de Montplaisir, ne risque-t-il pas à fortiori de faire le lit de l’Islam politique?
Ainsi, non contente de critiquer avec véhémence le chef de l’Etat, elle persiste et signe en passant à la vitesse supérieure. Et ce, en remettant en cause sa légitimité électorale.
Syllogisme
En effet, elle est revenue sur l’élection présidentielle de 2019. Election où Kaïs Saïed remporta une victoire écrasante lors du second tour. Avec plus de 40 points d’avance sur l’homme d’affaires controversé Nabil Karoui. Soit à 76,9%, selon l’institut Sigma conseil pour le nouveau président élu au suffrage universel direct; contre 23,1% pour son malheureux adversaire.
A cet égard, la présidente du parti destourien a exprimé de sérieux doutes quant au nombre des personnes ayant voté pour Kaïs Saïed, soit environ 2.700.000 personnes.
A titre de comparaison, arguait Abir Moussi lors de son passage mercredi 21 octobre sur les ondes de la radio Jawhara FM, durant la première journée portes ouvertes pour la vaccination contre la Covid, les Tunisiens se sont déplacés en masse aux centres de vaccination. Pourtant le nombre des participants n’a pas dépassé les 500.000, selon ses dires.
Alors, « comment peut-on parler de 2.700.000; alors que le taux de participation atteignait 39% le jour des élections à 15h30? » s’interroge-t-elle. Et de conclure: « Ce chiffre n’est pas réel! »
Abir Moussi : « C’est criminel et inhumain »
D’autre part, la politicienne est revenue sur le Décret Présidentiel n°2021-117 du 22 septembre 2021. Et notamment l’Article premier qui stipule que: « Les compétences de l’Assemblée des représentants du peuple demeurent suspendues. » Ainsi que l’Art. 3: « Il est mis fin à toutes les primes et tous les avantages octroyés au Président et aux membres de l’Assemblée des représentants du peuple. » Et ce, pour fustiger les mesures exceptionnelles qui ont mis tous les députés « dans le même sac ».
« Ces mesures, s’est-elle indignée, constituent un crime à l’encontre d’une centaine de fonctionnaires et de retraités. Lesquels ont été privés de leurs salaires et pensions; ainsi que de leur carnet de soin ».
Et de rappeler le cas tragique de la députée gelée, Hager Bouhlel, laquelle souffre d’un cancer qui nécessite une chimiothérapie particulièrement onéreuse et dont la Cnam lui refusait la prise en charge.
« Une femme s’est retrouvée obligée de crier sur les toits qu’elle était atteinte d’un cancer. Ne s’agit-il pas d’un cas caractéristique d’une violation de la vie privée? Eprouvait-elle l’envie ou l’intention de révéler sa maladie? « C’est criminel et inhumain », s’est-elle écriée, à juste titre.
Le point de non-retour?
Rappelons d’autre part que la cheffe du parti destourien avait, de prime abord, soutenu les mesures exceptionnelles du 25 juillet et même salué publiquement le chef de l’Etat. Mais il semble qu’elle se soit par la suite rétractée à cause du Décret présidentiel du 2021-117. Déclarant à l’occasion que le Parti destourien libre (PDL) va désormais se positionner dans les rangs de l’opposition.
D’ailleurs, déjà dans une vidéo publiée le lendemain du 22 septembre sur sa page FB, elle avait ouvertement exprimé son rejet de la « dictature » et du « pouvoir individuel absolu ».
Est-ce le point de non-retour entre deux acteurs politiques de premier plan que tout semble opposer, hormis le combat implacable qu’ils mènent en parallèle, mais séparément, contre l’Islam politique?