Les conclusions du séminaire organisé par l’Association pour l’agriculture durable (APAD) et Agropol, l’Association de coopération pour le développement à l’international des filières oléoprotéagineuses, sur les enjeux et les perspectives de la culture du colza en Tunisie ont été présentées lors d’une conférence de presse du programme Maghreb Oléagineux.
Depuis 2019, le programme Maghreb Oléagineux, cofinancé par Terres Univia et l’Union européenne, accompagne le développement de cette filière stratégique pour le pays.
La filière colza, un levier stratégique pour renforcer la résilience du secteur agricole et la souveraineté alimentaire
Compte tenu de l’importance de l’agriculture pluviale dans les pays du Maghreb, les performances du secteur sont fortement dépendantes des aléas climatiques. Dans son dernier rapport, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) dresse un constat alarmant. Ce constat porte sur l’intensification du changement climatique et l’accélération des problèmes existants. Les conditions climatiques défavorables de ces dernières décennies pourraient donc progressivement devenir la norme au Maghreb. Pour limiter les impacts des difficultés croissantes du secteur, notamment en termes de souveraineté alimentaire, les systèmes de production et les pratiques culturales doivent évoluer. Au Maghreb comme dans le reste du monde, la diversification et l’allongement des rotations sont parmi les mesures clés à adopter.
En Tunisie, la culture du colza est adaptée aux conditions agropédoclimatiques des principales zones de production de blé. Elle est également reconnue comme essentielle pour améliorer les performances et la durabilité des exploitations des grandes cultures. Par conséquent, une plus grande intégration du colza aurait de nombreux effets bénéfiques sur la bonne gestion agronomique des terres et l’amélioration des rendements des cultures céréalières. Et notamment celles du blé dur. A ce titre, des études ont démontré que l’introduction du colza dans la rotation des cultures permet une progression du rendement du blé de 20% en moyenne.
La superficie de colza récoltée est passée de 463 hectares en 2014-2015 à 14.330 ha
Par ailleurs, la Tunisie mise plus que jamais sur le développement de la culture du colza. En effet, la superficie de colza récoltée est passée de 463 hectares en 2014-2015 à 14.330 ha. Et ce, lors de la saison 2020-2021, et les prévisions d’emblavements pour l’actuelle campagne sont de 20 à 22.000 ha. Selon M. Tarek Jarrahi, directeur général de l’Institut national des grandes cultures (INGC), « depuis 2014, la progression annuelle moyenne des superficies de colza est de 84%. Sur la même période, le nombre d’agriculteurs cultivant du colza est, quant à lui, passé de 55 à 407. Ces évolutions quasi exponentielles témoignent de l’attractivité de cette culture dont la production s’est élevée à 18.500 tonnes. Et ce, lors de la dernière campagne, avec un rendement atteignant 30,5 quintaux/ha dans certaines régions ».
La Tunisie ambitionne d’atteindre une surface cultivée de 150.000 ha de colza
A long terme, la Tunisie ambitionne d’atteindre une surface cultivée de 150.000 ha de colza. Ce qui permettrait au pays de réaliser des récoltes estimées à 240.000 tonnes. Les effets positifs induits sur la souveraineté alimentaire, la création de valeur pour le monde rural. Et la balance commerciale sont conséquents.
Pour Aziz Bouhejba, président de l’Association pour l’agriculture durable (APAD), « le séminaire a démontré que la Tunisie serait alors en capacité d’augmenter sa production de céréales de plus de 50.000 tonnes. Et de couvrir 30% de sa consommation de tourteaux et près de 50% de sa consommation d’huiles végétales. Globalement, cela représentera un gain d’environ 500 millions de dinars. Et ce, au niveau de la balance commerciale et des revenus supplémentaires pour les producteurs ».
Le colza, une chance au nord et au sud de la Méditerranée
Les acteurs de la filière française du colza ont témoigné sur les enjeux et défis de la culture de cette plante au nord de la Méditerranée. De nombreux points de convergence avec la situation en Tunisie et dans les autres pays du Maghreb ont été soulignés. Les discussions ont notamment mis en avant l’importance d’un cadre réglementaire favorable. Et d’une structuration en adéquation avec les défis à relever à chaque stade de développement de la filière. La formation des acteurs de la filière est également un facteur clé de succès pour le développement du colza.
L’accompagnement technique et la montée en compétences du monde agricole, au cœur du programme Maghreb Oléagineux
Le programme Maghreb Oléagineux s’inscrit dans la stratégie de développement de la filière colza des acteurs publics et privés. Et en premier lieu Carthage Grains, le triturateur à l’initiative de la relance de la filière colza avec les pouvoirs publics en 2014. En étroite collaboration avec les services de l’INGC (Institut national des grandes cultures), de l’APAD (Association pour l’agriculture durable) et du CMA (Comptoir multiservices agricoles), le programme Maghreb Oléagineux contribue à la formation des acteurs de terrain et sensibilise les décideurs à l’intérêt de la filière colza.
Selon Guénaël Le Guilloux, responsable du développement international chez Terres Univia et directeur d’Agropol : « Le transfert des bonnes pratiques aux agriculteurs est un facteur clé de succès. Les visites de champs (Field Days), animées par les conseillers formés par Terres Univia, participent à la diffusion de ces Best Practices et permettent d’informer les producteurs sur les atouts des semences européennes de colza et de tournesol pour réussir leurs cultures ».
Depuis le lancement du Programme en 2019, près de 70 conseillers agricoles ont été formés. Et 136 Field Days ont été organisés au bénéfice de plus de 2 600 agriculteurs. Un nouveau cycle de formation a débuté en juin 2021 et permettra de former 23 nouveaux conseillers agricoles.
1 100 variétés
En effet, avec 1 100 variétés, le catalogue européen offre un large choix de semences de grande qualité. Ces variétés sont parfaitement adaptées aux conditions climatiques de la Tunisie. Et ce, pour exploiter pleinement son potentiel, comme l’attestent les rendements des dernières campagnes.
Un atelier en 2022 pour favoriser le développement des filières colza sur les deux rives de la Méditerranée
A l’issue du séminaire, les participants ont exprimé le souhait de voir un atelier organisé à Tunis en 2022. Et ce, afin de partager et capitaliser les expériences des acteurs filières oléagineuses des deux rives de la Méditerranée engagés. Et ce, pour que leurs pays se donnent les moyens de leur souveraineté en huile et protéines.