Depuis sa création en 2011, Aswat Nissa lutte contre toutes les formes de discrimination basées sur le genre. Elle plaide pour l’intégration d’une approche qui garantit l’égalité entre les hommes et les femmes. Ainsi que pour toutes les catégories de la société.
Aswat Nissa a lancé un baromètre genre dans le but de mieux évaluer l’engagement des gouvernements successifs. Mais aussi pour s’inscrire dans la lutte contre le discriminations à l’égard des femmes.
Alors, elle s’est intéressée principalement au pouvoir exécutif. Et l’expérience du baromètre genre commençait d’abord par étudier Hichem Mechichi. A travers les comportements politique, communicatif et législatif du chef du gouvernement.
Toutefois, la donne semble changer depuis le 25 Juillet 2021, après les mesures exceptionnelles prises par le Président de la République Kaïs Saïed. Avec notamment l’activation de l’article 80 de la Constitution. Lesquelles chamboulent le paysage politique. Ce qui fait que les deux pouvoirs, législatif et exécutif sont entre les mains de Kaïs Saïed.
Ainsi, ce précédant juridique et politique, et en dépit des controverses qu’il soulève, pousse à diviser développer l’analyse dans le cadre de ce baromètre genre entre deux périodes.
Kerim Bouzouita, anthropologue et analyste de la communication politique, dresse donc un état des lieux, entre l’avant et l’après 25 juillet. Il précise dans une déclaration à leconomistemaghrebin.com que l’analyse de la communication de la Présidence de la République autour de l’égalité a fait l’objet d’un volet du baromètre genre.
Selon lui, il en résulte des constats nuancés. D’abord, dans un soin particulier apporté à la féminisation du discours du Président. Indiquant une conscience réelle de l’importance d’inclure les femmes dans l’espace linguistique politique.
Le contenu des discours de la Présidence révèle une réelle vacuité
Puis, il poursuit: « Cependant, cette conscience ne se traduit pas en éléments consistants et tangibles. Puisque le contenu des discours de la Présidence révèle une réelle vacuité pour tout ce qui concerne le statut des femmes. Pire encore, lorsque le discours s’attarde sur les droits économiques et sociaux des femmes rurales. Car il oppose les luttes féministes avec une rhétorique divisionniste entre les droits des « classes populaires et des classes moyennes. »
Avant d’ajouter: « L’autre aspect remarquable de la communication présidentielle réside dans les représentations symboliques des femmes dans les images produites et diffusées par la Présidence. Et ce, par rapport à la recherche scientifique et les mouvements luttant pour les droits des femmes. Lesquels insistent depuis 1969 sur l’importance de la représentation de l’image des femmes dans les appareils de communication et de diffusion médiatiques, politiques et culturels. En rendant visible l’action des femmes dans la politique; mais en connotant le “genre féminin” à des caractéristiques spécifiques de leadership. Alors, la communication gouvernementale, (présidentielle dans notre cas d’espèce) représente un agent puissant dans la production et la rénovation de la signification imaginaire de la place des femmes dans la société et aux postes de décision. »
Les choix techniques et scénographiques transmettent des messages de dépendance au pouvoir du Président et de mise symbolique au second plan.
Et de continuer: « Ces significations imaginaires produisent des effets concrets dans les diverses pratiques sociales. Et elles représentent des leviers importants, afin de faire évoluer les perceptions vers une société égalitaire. »
Ainsi, Kerim Bouzouita relève que les femmes sont présentes à hauteur de 37% de l’ensemble des images politiques diffusées. Et ce, via la page officielle Fb de la Présidence de la République, principal canal de communication de cette institution.
Autrement dit, au niveau quantitatif, la communication révèle une réelle conscience de l’importance de ne pas sous-représenter les femmes. Mais en réalité, les représentations des femmes tunisiennes dans la communication de la Présidence de la République ne véhiculent pas de messages valorisant leurs rôles. Ou même véhiculant un message d’égalité et d’autonomie.
Au contraire, les choix techniques et scénographiques transmettent des messages de dépendance au pouvoir du Président et de mise symbolique au second plan.