Si la vie est une offrande, la mort, elle, restera un « Haqq », comme aimait à le répéter feu Béji Caïd Essebsi, lors de son mandat présidentiel. Et pour droit qu’elle soit, la mort est, paradoxalement, une vie pour l’oeuvre que l’on aurait accomplie, pour les femmes et les hommes que l’on aurait forgés et ceux qu’on aurait influencés.
C’est pour cela que le « départ » de notre professeur, ami et frère Ezzeddine Larbi est, en soi, une nouvelle vie. Et si pour les siens, pour nous, pour ses amis, ses anciens étudiants et confrères, ce départ s’apparente à une perte, le fait, aujourd’hui, d’honorer sa mémoire est l’éternité.
Le départ de Ezzeddine Larbi fut, comme le dit son frère et ami Mohamed, rapide. Lui qui se baignait encore récemment dans les eaux bleues de notre chère Méditerranée comme pour purifier ce corps qui l’habitait pour peu de temps encore.
Lui qui récemment tenait des discussions interminables sur l’économie mondiale et locale, qui ne s’arrêtait jamais quand il parlait de modèles économiques, d’expériences de certains pays qui l’ont vu, à plusieurs reprises, fouler le tarmac de leurs aérodromes et éplucher les stratégies et les projets de leur développement.
« Le « départ » de notre professeur, ami et frère Ezzeddine Larbi est, en soi, une nouvelle vie »
Ezzeddine Larbi était comme cela, rien ne pouvait l’éloigner des faits économiques, dont il était insatiable : les modèles de développement, les stratégies suivies, celles non suivies, les expériences africaines, les revirements stratégiques, la monnaie, l’inflation, les équilibres macroéconomiques, ses propres recherches…et bien d’autres sujets. Je me souviens d’un jour où par un pur hasard, je l’ai rencontré à la sortie de l’ex siège de la BAD à Tunis, où il était en mission ponctuelle.
Nous avions pris un café dans un endroit que ni lui ni moi ne connaissions auparavant, au milieu de gens simples et ô combien courtois. Le temps avait coulé, rapidement, puisqu’à un moment, après avoir déjà doublé nos consommations, nous nous rendîmes compte que l’on avait drôlement faim. De quoi avions-nous discuté ? Bien vu. Bien sûr d’économie.
C’est pour cela que son départ est pour moi le départ d’une partie de l’économie qui nous entoure et nous abreuve depuis le jour où nous nous sommes rencontrés sur les bancs de la Faculté. Lui debout, enseignant sa science et moi, au milieu de tant d’autres, assis en mode réceptif.
Aux tiens, tu manques certainement beaucoup, mais à la pensée, tu manqueras également. Alors nous continuerons, pour toi tout d’abord et pour l’économie, ensuite, à penser et à nous…baigner dans cette eau méditerranéenne que tu aimais tant.