L’immobilisme et le rafistolage des dix dernières années ont lourdement modifié la trajectoire des finances publiques. Et l’impact de la crise de la covid-19 a fini par scotcher la dette publique dans les méandres de l’insoutenabilité.
Et du coup, la loi de finances 2022 s’avère un exercice de haute voltige. Tant que les décideurs n’ont pas le courage de réformer en profondeur une économie déformée par l’informel, la corruption, l’économie de rente et les lignes rouges, la Tunisie continuera à collectionner les échecs et à cumuler les déséquilibres macroéconomiques.
Une économie, où la masse salariale augmente, alors que la productivité recule, une économie, où les dépenses de fonctionnement ne cessent de grignoter le budget d’investissement, dégradant au passage la qualité du service public, une économie, où la tentation de délocaliser vers l’étranger ou de migrer vers l’informel a remplacé l’engagement dans des projets innovants… est une économie qui prend rendez-vous avec le défaut de paiement ! Certes, la Tunisie a besoin de réformes, mais la LF 2022 n’est pas l’Arche de Noé.
La LF n’a pas pour ambition de transformer en profondeur l’économie tunisienne, surtout que le risque de solvabilité plane sur le pays.
« L’immobilisme et le rafistolage des dix dernières années ont lourdement modifié la trajectoire des finances publiques »
L’urgence est qu’une telle loi soit porteuse d’une détermination de relever les défis : implémenter la bonne gouvernance et la transparence dans le secteur public (administration et entreprises publiques), stimuler l’investissement, s’inscrire dans la transition écologique et digitale, favoriser l’équité fiscale, etc.
La Tunisie a besoin d’une LF 2022 qui traduit l’ambition d’assainir les finances publiques et de mettre le pays sur le sentier de la soutenabilité de la dette.
Une LF qui permet de tirer profit de la vigueur de la reprise mondiale. Bref, une LF qui crédibilise l’action publique aux yeux des acteurs économiques (citoyens, investisseurs nationaux et étrangers, institutions financières internationales, partenaires étrangers…).
L’implémentation des réformes exige une certaine pédagogie. Des réformes mal pensées, mal expliquées, mal mises en place, peuvent susciter le refus populaire et devenir même contreproductives.
La crise des « gilets jaunes », en France, nous offre un bon exemple. Espérons que la sagesse économique soit au rendez-vous, car il est difficile que le déficit de vision et l’inflation des discours populistes puissent nous pondre une LF à la hauteur des défis