La bataille au sein de la diplomatie tunisienne commence à se ressentir. Plusieurs dossiers demeurent en suspens. Peut-être que ce n’est qu’une question de temps avant que la partie immergée de l’iceberg n’explose.
Beaucoup ont parlé ces derniers temps des contre-performances de la diplomatie tunisienne et des abus qui auraient été commis par certains agents du ministère des Affaires étrangères, un département qui a connu, à une certaine époque, l’âge d’or de la diplomatie tunisienne, mais qui, malheureusement, a perdu son lustre et semble en perdition au cours de la décennie noire. Comment l’expliquer?
Elyes Kasri, ancien ambassadeur de Tunisie et analyste-observateur, a souligné que ce discours pèche par exagération, phénomène auquel nous sommes habitués depuis janvier 2011 par des accusations sans preuves suffisantes et des conclusions hâtives. Il précise dans ce contexte : » Depuis feu Ben Ali, le ministère des Affaires étrangères a subi des infiltrations par des nominations politiques et administratives qui ont créé une certaine confusion dans le fonctionnement et les performances de la diplomatie tunisienne.
D’autre part, les nouveaux statuts du ministère des Affaires étrangères adoptés en 1991 se sont avérés en deçà des enjeux et des spécificités du travail diplomatique, surtout dans une conjoncture internationale en pleine mutation.
Malgré le besoin pressant d’adapter le statut particulier du ministère, tous les ministres des Affaires étrangères après 2011, y compris les diplomates de carrière, n’ont pas été en mesure de reformer le ministère alors que la plupart des départements ministériels ont actualisé leur statut particulier. Le ministère des Affaires étrangères a souffert des insuffisances de ce statut particulier qui a donné libre cours au pouvoir discrétionnaire qui s’est mû à plusieurs occasions en pouvoir arbitraire, ce qui a nui au moral et au rendement de la diplomatie tunisienne et au rayonnement international de la Tunisie ».
Il ajoute : » Les interférences des partis politiques, en premier lieu le mouvement Ennahda, depuis 2011, et le début de la campagne d’épuration menée par Rafik Abdessalem ont exacerbé les tensions et les tiraillements au sein du ministère en bouleversant les critères d’évaluation de l’efficacité et l’éligibilité à assumer des projets de travail en Tunisie et dans les postes diplomatiques et consulaires à l’étranger. En plus de cela, la Constitution de 2014 a placé le travail diplomatique au centre des tensions institutionnelles et politiques, le ministère des Affaires étrangères relevant de la présidence de la République en sa qualité de ministère de souveraineté, mais il reste rattaché à la fonction publique et sa fonction horizontale de coordination de la coopération internationale entre les différents départements ministériels et organismes publics. Cette situation ne semble pas devoir évoluer positivement même après le 25 juillet 2021″.
Et de conclure : « Sans porter des accusations arbitraires, il convient de réfléchir à la position de la Tunisie sur la scène internationale et aux objectifs qu’elle s’est fixés en termes de positionnement international et de valeurs qu’elle a en partage avec les partenaires internationaux ».