Privés de leurs salaires ou pensions de retraités, de même que de leur couverture sociale, des députés gelés menacent de saisir le Tribunal administratif et même de porter l’affaire à l’international. Faut-il en arriver là pour modifier une loi scélérate?
Nous sommes devant le cas d’école d’une loi scélérate mijotée à la va-vite et dont les retombées sont parfois catastrophiques. Et notamment pour certains députés détachés ou à la retraite.
Ainsi, en est-il du Décret présidentiel n°2021-117 du 22 septembre 2021. Lequel est relatif aux mesures exceptionnelles. En effet, il stipule dans l’un de ses articles « qu’il est mis fin à toutes les primes et tous les avantages octroyés au Président et aux membres de l’Assemblée des représentants du peuple ». Mais il porte en son sein les germes d’un pouvoir absolu, par nature coupé des réalités.
Anomalie
Car, parmi les députés gelés, se trouve une centaine de fonctionnaires ou de retraités. Et ces derniers ne touchent plus de salaire ou de pension. Et ce, depuis le mois de septembre dernier. Ils ne disposent pas non plus de couverture sociale. Or, le hic c’est qu’ils ne peuvent pas réintégrer leurs poste d’origine; étant en état de mise en disponibilité.
De même, certains élus gelés n’ont que leurs salaires pour subvenir aux besoins de leurs familles, payer leurs loyers ou envoyer leurs enfants à l’école. Un vrai cauchemar!
« Vous rendrez compte de vos actes devant Dieu »
Revenant hier mercredi 24 novembre sur les ondes de Jawhara FM, sur le gel des salaires des élus, le député du Courant démocrate Nabil Hajji, rappelait que les élus gelés ne pouvaient ni réintégrer leur emploi avant leur élection, ni chercher un nouveau travail. Il soulignait également la levée de couverture sociale des membres de l’ARP. « Le décès de la femme de l’élu Imed Khemiri en est la preuve. Le président de la République en porte la responsabilité ». Ainsi s’est-il écrié hier mercredi 24 novembre.
« Personne ne meurt député ou président de la République! Dieu vous interrogera sur vos actes! », ajoutait-il.
Pour Nabil Hajji, le chef de l’Etat a enfreint le texte fondamental en portant atteinte au droit au travail consacré par l’article 40 de la Constitution. Tout en dilapidant l’argent public. Puisque l’Etat versait des salaires à des employés sans exercer leurs fonctions. D’ailleurs, « les 450 employés de l’Assemblée des Représentants du Peuple reçoivent des salaires tout en restant chez eux. Ceci peut être qualifié de procuration à un tiers d’un avantage injustifié. Et ce, conformément aux dispositions de l’article 96 du code pénal. Même constat au sujet des employés de l’Instance Nationale de Lutte Contre la Corruption ».
« Nous allons militer pour nos droits sous plusieurs formes. Nous sommes prêts à porter cette affaire à l’international! ». C’est encore ce que prévenait le député du Tayyar.
Imbroglio administratif autour du statut de certains députés
Rappelons dans le même contexte que le président du bloc parlementaire de la Réforme, Hassouna Nasfi, a affirmé qu’un groupe de députés comptait saisir le Tribunal administratif. Et ce, afin de demander « la réintégration de nos fonctions au sein des établissements étatiques. Nous avons, également, entamé d’autres procédures pour prouver l’impossibilité d’exercer l’activité parlementaire ».
Invité le 1er novembre 2021 par la radio Shems FM, Hassouna Nasfi expliquait déjà qu’il s’agissait « de députés qui occupaient une fonction publique avant d’être élus ou qui étaient des agents publics à la retraite ».
« Ces élus ne sont pas considérés comme fonctionnaires détachés. Il s’agit d’une situation spécifique aux élus du peuple. Les élus n’ont plus accès à leur rémunération ou à leur pension de retraite ». Hassouna Nasfi soulignant alors le blocage dans lequel se trouvait les députés. « Puisqu’il n’y a eu ni dissolution du parlement ni révocation des élus ».
« Les députés ne peuvent pas présenter leur démission. Le décret n°117 du 22 septembre 2021 n’a pas précisé leur sort. Ils ont même été privés de leur couverture sociale. Quelques exceptions ont eu lieu dans le cadre de faveur. Ceci n’est pas acceptable! », s’est-il indigné.
« Certainement qui est en droit de vous rendre absurde est en droit de vous rendre injuste », dixit Voltaire.