Face aux multiples provocations d’Ennahdha, le président de la République, Kaïs Saïed s’apprête à dégainer l’arme fatale. A savoir procéder par des décrets-lois à l’application des conclusions de la Cour des comptes. Une manière de mettre le parti islamiste Ennahdha sur la touche. Et pour longtemps.
Heureusement que le ridicule ne tue pas. Sûr de lui, arrogant, bombant le torse, Riadh Chaibi, le conseiller politique de Rached Ghannouchi, fait de l’enchère sur son maître. Le président d’Ennahdha prédisait que le Parlement sera rétabli « bon gré mal gré ». En effet, il déclara à son tour avec suffisance que l’organe législatif sera de retour.
Et ce n’est pas tout, puisque sa première décision, dès la première session, sera d’annuler toutes les décisions prises par le président de la République depuis le 25 juillet. Rien que ça!
Et d’enfoncer le clou. En effet, lors de son interview, mardi 30 novembre sur Mosaïque FM, Riadh Chaibi accusait le président de la République Kaïs Saïed d’avoir violé la Constitution en activant l’article 80. Et que de fait, il ne répondait pas à la volonté du peuple, « comme il le prétendait ».
Pour lui, pour sortir de l’état d’exception, il convient « d’annuler tous les décrets annoncés depuis le 25 juillet, d’organiser un dialogue national pour le retour du Parlement. Lequel préparera des élections législatives et présidentielle anticipées ». Mais, s’est-il rétracté, « il n’est pas envisageable d’organiser des élections anticipées sous la supervision d’un dictateur ».
La provocation de trop
Rappelons que ce discours musclé fait écho à la provocation ultime de Rached Ghannouchi. Lequel fanfaronnait que l’ARP, dont les travaux sont suspendus, sera rétabli « qu’on le veuille ou non ».
« Le Parlement est une autorité constitutive qui a mis en œuvre de nombreuses lois sociales. Notamment la loi n°38 et celle sur le financement participatif. Le Parlement est à l’origine de grandes réalisations, mais les ennemis de la révolution ont œuvré à le dénigrer ». C’est ce qui ressort de l’allocution du leader du mouvement islamiste d’Ennahdha lors d’une rencontre avec les dirigeants de son parti le 27 novembre 2021 à Bizerte.
Et de s’adresser sans rire à ses partisans: « Vous pouvez être fiers de vous, parce que vous êtes un facteur de stabilité pour ce pays en dépit des campagnes de dénigrement ».
Et cerise sur le gâteau: le cheikh de Montplaisir a également annoncé avoir reçu une invitation pour participer aux travaux de la 143ème Assemblée de l’Union interparlementaire en Espagne. Mais il n’a pas voulu adresser une demande d’autorisation de voyage à Carthage. Et ce, pour éviter d’envenimer les relations déjà tendues avec le président de la République. Louable initiative qui témoigne de sa grandeur d’âme…
Deuxième provocation: il a délégué deux de ses députés membres de l’ARP, en l’occurrence Fathi Ayadi porte-parole d’Ennahdha et Maher Medhioub, assistant du président de l’ARP chargé de l’information et de la communication, pour le représenter à la conférence de Madrid. Bravant ainsi ouvertement le Décret présidentiel n°2021-80 du 29 juillet 2021 relatif à la suspension des compétences de l’Assemblée des représentants du peuple.
Réponse cinglante
C’était la goutte qui a fait déborder le vase. Et la réponse de Kaïs Saïed claqua comme un fouet. A travers la promulgation de décrets-lois pour liquider Ennahdha, le parti Qalb Tounes et Ayich Tounsi. Et ce, sur la base de graves infractions électorales liées au financement occulte de ces partis, lors des élections législatives de 2019. Car, bien que mentionnées expressément par le rapport de la Cour des comptes, elles étaient restées lettre morte.
En effet, lors d’une réunion à Carthage avec le doyen Sadok Belaïd, et le professeur de droit constitutionnel Amine Mahfoudh le chef de l’Etat fustigeait lundi dernier « la lenteur en matière de mise en place des suites légales, des dépassements relevés par le rapport de la Cour des Comptes, dans sa partie inhérente aux élections législatives et présidentielle de 2019 ».
Coup de grâce
Enfin, dans une vidéo mise en ligne, Kaïs Saïed a fait également référence à la lenteur inhérente à l’application des délais prévus par l’article 163 de la loi électorale. Lequel prévoit une pénalité variant entre 10 et 50 fois la valeur du financement à un candidat ou une liste électorale pour avoir obtenu un financement étranger pour sa campagne électorale.
En bref, en activant le fameux article 163 de la loi électorale, le Président fera d’une pierre deux coups. En effet, pas moins de 80 députés d’Ennahdha et de ses partis satellitaires seront hors jeu. Et sans coup férir, le Parlement gelé tombera de lui-même comme un fruit mûr. Joli coup!