La combinaison d’une croissance soutenue de la demande mondiale et de contraintes d’approvisionnement en biens et services liées à la pandémie a entraîné une hausse significative des prix à la consommation.
En fait, l’inflation mondiale, mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), a grimpé de 5,8 % en glissement annuel (g/a), un taux jamais atteint depuis des décennies. Il est important de noter que la plupart des économies avancées, à l’exception du Japon, connaissent une inflation rapide (voir les graphiques I et II)
Dans ce contexte, les investisseurs et les économistes se demandent si le monde est à l’aube d’un nouveau cycle inflationniste de longue durée. Ce débat conduit déjà à un revirement dans les orientations politiques de plusieurs Banques centrales. Les responsables politiques passent de l’accommodation à la « normalisation », voire au resserrement. Cela a même conduit la Réserve fédérale américaine et la Banque centrale européenne à adopter une position plus « Hawkish ».
Au moment où nous écrivons ces lignes, les préoccupations inflationnistes mondiales sont particulièrement marquées. Car la reprise reste forte et les contraintes d’approvisionnement sont omniprésentes sur les principaux marchés.
Nous pensons toutefois que si les prix devraient rester élevés au cours des prochains mois, l’inflation devrait néanmoins se modérer à moyen terme. Nous mettons en avant trois raisons principales pour justifier notre analyse.
Tout d’abord, si les prix ont augmenté dans tous les domaines, une part importante de l’accélération de l’inflation globale au cours des derniers mois est attribuable au complexe énergétique, en raison de la hausse des prix du pétrole et du gaz.
Toutefois, en l’absence de nouveaux chocs, la possibilité d’une accélération continue des prix de l’énergie à moyen terme est limitée. Les prix du pétrole et du gaz se sont déjà pleinement remis des prix excessivement bas de 2020. En outre, la reprise plus rapide que prévu de la demande mondiale semble déjà se refléter dans les prix actuels de l’énergie.
En outre, nous pensons que la poursuite d’une dynamique économique positive est déjà prise en compte aux programmes des producteurs de l’OPEP+ et des États-Unis, qui devraient augmenter leur production pour répondre à la demande mondiale supplémentaire.
Par conséquent, en l’absence d’événements géopolitiques majeurs inattendus, nous ne prévoyons pas de surprises importantes du côté de l’offre ou de la demande sur les marchés de l’énergie cette année. En conséquence, les prix de l’énergie devraient être plus stables, contribuant ainsi à modérer l’inflation mondiale.
Deuxièmement, certains signes indiquent déjà que certains aspects des contraintes de la chaîne d’approvisionnement s’atténuent.
Cette amélioration, particulièrement forte en Asie du Sud-Est, devrait atténuer une partie des perturbations des chaînes d’approvisionnement mondiales, à mesure que les usines rouvrent leurs portes et que la production reprend.
Les données à haute fréquence de l’Asie émergente indiquent une forte reprise de l’activité au cours des derniers mois, ce qui témoigne d’une résorption significative des problèmes d’approvisionnement liés à la Covid-19 et à la variante Delta.
Il s’agit d’un développement clé, car « Factory Asia », le complexe de la chaîne d’approvisionnement autour des centres de fabrication en Asie du Nord-Est et du Sud-Est, constitue le nœud central du commerce mondial.
Il est important de noter qu’Omicron s’avère jusqu’à présent moins perturbant pour les chaînes d’approvisionnement. En outre, en ce qui concerne les contraintes liées au transport maritime, certaines évolutions positives ont été observées.
Les prix du transport de matières sèches en vrac ont déjà baissé de près de 60 %, tandis que les taux de fret aérien ont diminué de 20 % et que les taux de fret pour le transport de conteneurs se sont stabilisés au cours des dernières semaines.
Troisièmement, il existe encore d’importantes capacités inexploitées au niveau de l’économie mondiale. Dans plusieurs pays, l’exploitation totale des capacités industrielles et le ratio emploi/population sont encore inférieurs à leurs niveaux avant la pandémie.
Cela suggère que, globalement, il y a encore de la place pour une demande manufacturière et une croissance de l’emploi supplémentaires avant que l’économie ne commence à surchauffer au point de créer des pressions inflationnistes permanentes.
Dans l’ensemble, l’inflation mondiale devrait se modérer en 2022, sous l’effet d’une stabilisation des prix de l’énergie, de l’atténuation des perturbations de la chaîne d’approvisionnement et de l’existence de capacités économiques inexploitées dans le monde.