Comment le coup de force de Kaïs Saïed du 25-juillet est-il perçu en Occident, notamment chez l’Intelligentsia italienne, très au fait de ce qui se passe en Tunisie eu égard à la proximité géographique, historique et culturelle entre Carthage et le pays de Garibaldi ?
Un article ayant fait la Une de plusieurs quotidiens italiens à l’instar de la Stampa et Il manifesto dans son édition du 22 janvier en cours et relayé par nos confrères du Courrier de l’Atlas, mais curieusement ignoré par les médias tunisiens.
Des signatures prestigieuses
En effet, parmi les signataires, figurent des universitaires italiens de Florence, Bologne, Palerme, Rome, Turin ou des expatriés qui exercent dans des prestigieuses universités étrangères comme New York, Londres, Lausanne, Rio de Janeiro… ainsi que des journalistes appartenant à de renommés titres comme Il Manifesto ou la Stampa. Ces intellectuels ont signé une pétition appelant à retirer le doctorat honoris causa au président tunisien Kaïs Saïed qui lui avait été décerné l’an dernier à Rome.
Une conférence sur…la Constitution
Pour rappel, en marge de sa visite officielle de deux jours en Italie à l’invitation de son homologue italien, Sergio Mattarella, un doctorat honoris causa fut décerné par l’université La Sapienza de Rome, le 16 juin 2021 au président de la République, Kaïs Saïed.
À cette occasion le Président a donné une conférence d’une heure en langue arabe portant sur le droit de l’Islam en abordant l’origine de la Constitution dans l’histoire et sa place dans le monde musulman.
Cette distinction honorifique, rappellent nos confrères du Courrier de l’Atlas, lui fut décerné « pour sa contribution à l’élaboration de la Constitution tunisienne de 2014 , ainsi que sa contribution décisive, scientifique et institutionnelle, à la cause du dialogue entre les divers systèmes juridiques dont le droit romain est la matrice historique essentielle, fondée sur le respect réciproque et la valorisation des droits humains ».
Griefs contre Kais Saied
Mais, moins d’un an plus tard, soulignent les signataires de la dite pétition, le président tunisien « suspendait le Parlement, révoquait le gouvernement et s’attribuait la quasi-totalité des pouvoirs avant de publier le 22 septembre un décret présidentiel qui peut s’imposer à la loi fondamentale ».
« Tout cela porte de sérieux doutes sur l’opportunité que les autorités académiques italiennes accordent une distinction au président tunisien. Sans prétendre que celles de la Sapienza pouvaient prévoir ce que Kaïs Saïed allait faire le 25 juillet qui a suivi l’attribution du doctorat honoris causa ».
Ainsi, argumentaient les initiateurs de la pétition, lesquels pointaient également du doigt « la dérive autoritaire imposée à la Tunisie, sous les yeux de tous. Ce nouveau scénario, qui va sûrement miner gravement les résultats acquis depuis la révolution de 2010 de laquelle est issue la Constitution aujourd’hui remise en question par Saïed, ne peut être ignoré de l’autorité académique qui a accordé une importante distinction à Kaïs Saïed.
Par conséquent, ont-ils ajouté : « Nous pensons qu’il serait souhaitable de retirer cette distinction au président tunisien et d’engager l’université italienne et l’opinion publique italienne et internationale à défendre les droits fondamentaux que le peuple tunisien s’est conquis en 2010, à un coût humain considérable, en chassant le dictateur Ben Ali et en faisant avancer la Tunisie sur la voie de la démocratie constitutionnelle ». Le verdict est sans appel.
Décidément, le Président Kais Saied a fort à faire pour apaiser les appréhensions des intellectuels et académiciens occidentaux et de les convaincre de ses bonnes intentions et de son attachement au respect des libertés.