Aux projets pharaoniques prônés par le président de la République, Kaïs Saïed, l’ancien ministre des Finances et actuel président d’Afek Tounes, Fadhel Abdelkefi, oppose « des projets plus importants et plus bénéfiques pour l’économie nationale ». Retour sur un entretien accordé à l’animateur Hamza Balloumi, lors de son émission dominicale sur Mosaïque FM.
Stricto sensu, la classe politique dans son ensemble a-t-elle des solutions pragmatiques et cohérentes pour sortir le pays de la crise socio-économique dans laquelle elle se débat depuis plus d’une décennie? Fadhel Abdelkefi apporte son éclairage.
Le président de la République? Il est plongé dans son monde virtuel, totalement indifférent à la chose économique. Le gouvernement actuel? Les mains liées, Mme Bouden ne sait plus où donner de la tête. La gauche? Complètement engluée dans une idéologie d’un autre temps. Le PDL? Abir Moussi pose les vraies questions d’ordre économique. Mais elle évite soigneusement d’apporter des solutions concrètes aux problèmes réels, de peur de perdre de sa popularité. Ennahdha? Le parti islamiste ne propose rien, car il n’a aucun programme économique, il ne fait que vendre du vent.
Reste le parti d’Afek Tounes de Fadhel Abdelkefi. Lequel ne cesse de répéter que la Tunisie peut changer « d’un trait de plume ». Comment? En libérant les énergies pour permettre au secteur privé de jouer son rôle.
« Je suis quelqu’un qui croit beaucoup au rôle de l’Etat. Un rôle déterminant dans les domaines de souveraineté comme la défense, la justice, l’éducation, la sécurité, la recherche scientifique, le transport, la santé… Mais je pense aussi que l’Etat doit être stratège et régulateur. Et qu’il devrait libérer par ses lois les énergies de ce pays, pour que le secteur privé puisse prendre la relève ». Ainsi, M. Abdelkefi résumait-il sa ligne politique. Et ce, lors d’un entretien qu’il avait accordé à La Presse, dans son édition du 11 janvier 2021.
« Nous manquons d’imagination et de vision »
Ainsi, lors de son passage, dimanche dernier, à l’émission Jaweb Hamza sur Mosaïque FM, l’ex-ministre des Finances abordait le volet économique. En arguant que la Tunisie a besoin « d’imagination et de vision » pour décoller.
Comment? « Il faut rassurer le secteur privé et promouvoir l’image de la Tunisie à l’étranger, pour attirer les investisseurs ». Ajoutant que le pays « a besoin de sceller un vrai partenariat public-privé pour remettre la machine en marche. Parce qu’on a 30 milliards de dollars de financements étrangers qui sont prêts à être investis », révélait-il.
Mais, le président d’Afek Tounes, déplorait de constater l’absence de volonté politique. Et ce, pour entreprendre les réformes nécessaires et préserver le tissu économique, notamment, les petites et moyennes entreprises. « Les PME vont faire faillite, le chômage sera en hausse et le taux de pauvreté va suivre en conséquence. Pendant ce temps-là, on effectue une consultation électronique ».
Chimères
La Tunisie est-elle soumise aux chimères? Prenant l’exemple du projet de la Cité médicale à Kairouan, annoncé par le président de la République, Kais Saïed, l’invité de Hama Balloumi estime que le dit-projet n’est qu’une « illusion ».
« L’Etat n’a ni le terrain, ni l’argent pour financer ce projet. Les 100 millions de dollars offerts par le roi Salmane d’Arabie Saoudite sont destinés au projet de l’hôpital universitaire de Kairouan qui peine à démarrer, en raison d’un litige foncier ». Depuis six ans, l’État est incapable de fournir le terrain adéquat pour construire le projet, a-t-il ajouté, sarcastique.
Un autre exemple de projets chimériques? Le TGV devant relier le Nord au Sud tunisien et annoncé en grande pompe par le ministre du Transport.
« Le chef de l’Etat, déplore le petit-fils de l’illustre exégète du Coran, cheikh Tahar Ben Achour, parle d’un TGV. Alors que l’intérêt d’un tel projet est discutable. Le Président aurait dû se pencher sur la rénovation du réseau ferroviaire et sur des projets plus importants et plus bénéfiques pour l’économie nationale. Dont notamment l’autoroute Tunis-Jelma, le métro de Sfax et plusieurs autres projets qui sont toujours à l’arrêt ».
Pas de « problème personnel » avec Kaïs Saïed
D’autre part, interrogé sur une supposée tension entre lui et le président de la République, M. Abdelkafi assurait qu’il n’y avait aucun problème personnel avec lui. « Je l’ai rencontré lorsque j’étais candidat à la présidence du gouvernement. J’ai eu un entretien de 40 minutes avec lui. Il m’avait posé plusieurs questions concernant mon projet, mais aussi mon assise politique. Le soir, j’ai appris qu’il avait désigné Elyes Fakhfakh, puis tout le monde connaît la suite ».
Enfin, Fadhel Abdelkefi a soutenu que les bases de la démocratie ne sont toujours pas ancrées en Tunisie. Si bien que « l’action politique soit difficile à pratiquer dans la conjoncture actuelle », concluait-il, amer.