La Tunisie pourrait-elle arracher un accord avec le FMI malgré la sensibilité du contexte social et la montée des incertitudes politiques ?
Un exercice de haute voltige pour surmonter un cocktail d’handicaps.
Un handicap de crédibilité
après l’échec de deux programmes à cause des engagements non respectés (compensation, masse salariale, entreprises publiques…), la Tunisie se retrouve affaiblie dans ce nouveau cycle de négociation.
Un handicap de soutenabilité de la dette
La trajectoire de la dette publique devient incontrôlable, compte tenu du dérapage des ratios d’endettement, du poids du financement extérieur, de la montée des taux d’intérêt, du creusement du déficit primaire, de la chute de la croissance potentielle, de la dette latente des entreprises publiques…
Un handicap d’orientation démocratique
L’argumentaire du « printemps arabe » est largement consommé et celui de « la seule démocratie dans la région » n’est plus d’actualité après la dissolution de l’Assemblée et de plusieurs institutions démocratiques.
Un handicap de consensus
Il est difficile d’arracher l’accord de l’UGTT sur un programme qui répond aux exigences du FMI, dans un contexte miné socialement. Et même avec un accord signé, il n’est pas certain que la centrale syndicale tienne ses promesses, si la contestation sociale, contre des mesures d’austérité, monte d’un cran.
Un handicap de stabilité politique
Deux incertitudes pèseront dans la balance. Il s’agit des résultats des législatives programmées pour décembre 2022 qui peuvent donner une nouvelle majorité hostile au programme, et du flou qui entoure le nouveau projet de gouvernance politique qui sera mis en place après le référendum du 25 juillet.
Il est toujours possible d’atténuer ces handicaps via le retour à la sagesse, en prenant le chemin du « club des réformes sérieuses », loin du populisme et des reculades devant les lobbies, pour assainir avec courage et détermination les finances publiques et dégager un espace budgétaire pour pouvoir démarrer, dans une deuxième phase, sans le FMI, les grands chantiers de réformes structurelles (éducation, santé, transport …). Sinon, la Tunisie débarquera dans le « club du défaut de paiement » avec son cortège d’inflation à deux chiffres, de pénurie et de violence urbaine. Et dans un tel scénario, la popularité botoxée par l’argumentaire populiste ne sera plus d’un grand secours !