La Tunisie est considérée comme un pays de transit et de destination pour plusieurs flux migratoires en provenance de différents pays, notamment ceux d’Afrique subsaharienne.
Sur une population totale de 11,7 millions d’habitants en janvier 2020, le nombre des étrangers résidents en Tunisie (58.990 individus) représente une proportion de 0,5% de l’ensemble de la population tunisienne, selon l’INS. Cette population comprend toutes les personnes de nationalité étrangère, dont des travailleurs migrants en Tunisie d’une manière régulière ou irrégulière.
Quel est l’impact du travail irrégulier des migrants sur l’économie tunisienne ? Pour répondre à cette question, leconomistemaghrebin.com a interrogé Ali Belhadj un expert en migration.
Les migrants d’Afrique subsaharienne enregistrent leur présence dans plusieurs secteurs. En effet, selon une enquête réalisée par l’Organisation internationale du travail (OIT), 78,1% des migrants arrivent en Tunisie pour le travail. Pour cette raison, les employeurs préfèrent les recruter pour des raisons liées notamment au bas coût salarial.
Un migrant sur quatre déclare avoir été victime d’une tromperie. La méconnaissance des droits fondamentaux, des procédures et de l’environnement sont autant d’éléments qui mettent les migrants dans des situations fragiles et risquées. D’ailleurs, parmi les migrants qui ont été victimes d’une tromperie, seulement 16% expriment leurs souhaits d’engager une procédure légale.
Ali Belhadj a aussi précisé que la situation des étrangers en Tunisie est caractérisée par la fragilité. Cependant, il a expliqué que les Tunisiens, notamment, les jeunes ne veulent pas, aujourd’hui, travailler dans plusieurs secteurs. Notamment, l’agriculture le textile et la construction.
Selon lui, le salaire d’une femme de ménage étrangère est le même que celui d’une femme tunisienne avec une moyenne d’environ 35 dinars à 40 dinars la journée. Cependant, la femme tunisienne n’accepte pas de travailler 8h par jour.
« Les jeunes ne veulent pas travailler dans certains secteurs. Ils sont un peu responsables de leur chômage»
« La question du travail irrégulier des migrants ne peut être résolue qu’après la compréhension de la relation complexe entre plusieurs facteurs. Parmi lesquels les Tunisiens qui ne veulent pas travailler, les employeurs et les migrants », a souligné Ali Belhadj
Impact du travail irrégulier
Selon l’expert dans le domaine de la migration, les impacts de migrations ne peuvent être distingués qu’au moyen et long termes. En effet, l’augmentation du phénomène de la violence chez les migrants constitue le premier impact.
Mais le plus important c’est l’impact économique. M.Belhaj a expliqué que le travail irrégulier ne fera qu’augmenter le taux de l’économie informelle.
Il a également affirmé que ce type de travail contribue à la détérioration de l’économie structurée. Car ces travailleurs qui produisent de la valeur ajoutée ne sont pas intégrés dans la dynamique économique.
En outre, il a expliqué que cette situation ne permet pas à la Tunisie de profiter de l’argent transféré par les migrants à leurs familles dans les pays d’origine. Ce qui provoque le développement de l’échange illégal.
« Les seules bénéficiaires de ce travail irrégulier sont les employeurs. Ils préfèrent leur payer des salaires bas pour ne pas payer les charges sociales. Et cela est un manque à gagner pour les caisses sociales », a ajouté Ali Belhadj.
Cependant, cette situation est due à un problème juridique. En effet, selon lui, les employeurs veulent, parfois, se conformer à la loi et régler ainsi la situation du migrant. Mais, la loi tunisienne ne le permet pas. Et cela, fautes de mécanismes de la régularisation. Il a ajouté que ces aspects règlementaires ont des conséquences sociales et économiques néfastes.
Dans ce contexte, il a appelé l’Etat à trouver des solutions et à mettre en place des lois. Et ce, afin de les aider à régulariser leurs situations et surtout les protéger.
En outre, l’UGTT, par exemple, a tenté d’aider ces migrants irréguliers et à trouver des solutions pour résoudre plusieurs problèmes liés à des conflits entre employés et employeurs. Ainsi, elle a résolu des difficultés liées au paiement des salaires des migrants. La centrale syndicale a aussi consenti des efforts pour mieux conseiller et informer les migrants sur leurs droits au travail et sur la réglementation organisant la migration en Tunisie.