« L’effet défavorable de ce climat d’incertitude est encore plus fort pour l’investissement. Car les entreprises adopteront probablement une attitude attentiste. Et ce, jusqu’à la résolution de la situation politique et la conclusion d’un accord avec le FMI« . C’est ce que soulignait récemment la Compagnie française d’assurance pour le commerce extérieur (Coface). Elle procédait, au mois de février courant, à une mise à jour du risque pays de la Tunisie.
La Coface estime que « l’investissement public en Tunisie sera limité par la nécessité de maintenir les dépenses budgétaires sous contrôle. Le secteur bancaire fragile ne sera pas en mesure de soutenir l’économie réelle en cas de choc défavorable. Ce qui constitue un risque supplémentaire pour les perspectives d’investissement ». Et d’ajouter que […] « l’activité touristique ne devrait pas retrouver son niveau d’avant la pandémie avant 2024 ».
« Le secteur bancaire fragile ne sera pas en mesure de soutenir l’économie réelle en cas de choc défavorable »
L’industrie manufacturière est relativement bien diversifiée (hydrocarbures, produits chimiques, phosphates…). Elle devrait bénéficier de la reprise de la demande extérieure, notamment européenne.
Par ailleurs, les producteurs d’huile d’olive sont l’un des rares secteurs à ne pas avoir souffert de la crise. Ils ont bénéficié de l’envolée des prix des matières premières. Ils devraient continuer de prospérer.
Malgré l’augmentation de la facture des importations d’énergie, la hausse des exportations et la faiblesse des importations due à la faiblesse de la demande intérieure permettront de réduire la contribution négative des exportations nettes.
Fuite des capitaux et crise monétaire!
S’agissant des négociations de la Tunisie avec le Fonds monétaire international (FMI), la Coface rappelle que la Tunisie recevait des aides de l’UE à la mi-2021 (300 millions d’euros) et de la Banque Africaine de Développement (60 millions d’euros) pour la relance économique et l’intégration sociale. Cela permettait de compenser en partie l’amortissement des prêts arrivant à échéance et la pression sur les réserves de change, qui s’élèvent encore à environ quatre mois d’importations.
« Cependant, la crise politique actuelle met à rude épreuve les relations avec les principaux bailleurs de fonds étrangers. Le principal d’entre eux est le FMI », estime la Coface. La compagnie souligne, dans ce sens, que sans une nouvelle facilité de crédit élargie, il est peu probable que les besoins de financement à court terme soient couverts. Ce qui fait peser une menace sérieuse de restructuration ou de défaut de paiement.
Néanmoins, un accord peut être conclu si le gouvernement prend les engagements budgétaires nécessaires. Même s’il est encore élevé, le déficit budgétaire devrait se réduire à mesure que les recettes augmentent (modestement) et que les dépenses d’investissement et courantes diminuent.
« La crise politique actuelle met à rude épreuve les relations avec les principaux bailleurs de fonds étrangers »
Bien que la part de la dette en devises étrangères soit élevée (56% en euros), environ 70% de celle-ci est détenue par des créanciers multilatéraux et bilatéraux. En outre, le ratio d’endettement sera vulnérable à la dépréciation de la monnaie.
Selon la Coface, la dette extérieure devrait rester élevée. La plus grande partie de la dette (80%) continuera d’être une dette publique ou garantie par l’État.
Le dinar est resté stable ces dernières années, mais l’incapacité à honorer ses obligations de remboursement pourrait déclencher une fuite des capitaux et une crise monétaire.
La modeste reprise du tourisme contribuera à améliorer la balance des services. Mais elle sera plus que compensée par une détérioration de la balance des biens due à la hausse des prix à l’importation (énergie en particulier).
Par conséquent, le déficit de la balance des transactions courantes se creusera. Et ce, malgré les contributions positives des comptes de revenus et de transferts courants. La non-résolution de la crise politique se traduira par une baisse des IDE. Ce qui accentuera la pression sur le dinar et sur les réserves de change.