Affaibli par la participation pas trop enthousiaste des Tunisiens à la Consultation nationale, le Président de la République Kais Saied semble chercher un « attelage » avec le SG de la puissante centrale syndicale pour négocier les prochaines échéances politiques qui s’annoncent cruciales. Mais Noureddine Tabboubi est-il prêt à jouer le jeu présidentiel ?
Le couple Saied – Tabboubi semble apprécier le tango, une dance rythmique qui se joue à une mesure à deux ou quatre temps. En effet, à l’instar de vieux couples d’amoureux, ils mènent une relation en dents de scie avec de longues périodes de rupture suivies de réconciliations parfois spectaculaires.
C’est sympathique, mais rappelons-le, devant les échéances qui nous attendent, notamment les négociations qui s’annoncent fort difficiles avec le FMI, chaque minute compte. Et ce, d’autant plus que l’institution de Washington exige la signature de la centrale syndicale en préalable à tout accord avec le gouvernement tunisien. Donc, trêve de plaisanterie ; Il ya urgence que la rencontre entre les deux hommes ait lieu dans les plus brefs délais ; il en va de intérêt supérieur de notre pays.
Assez de tergiversations !
D’ailleurs, tel semble être le vœu du SG adjoint de l’UGTT, Sami Tahri, lequel a rappelé jeudi dernier sur Attessia TV, que la centrale syndicale « devra obligatoirement participer aux négociations avec le Fonds monétaire international (FMI). Annonçant à l’occasion qu’une rencontre est prévue entre le chef de l’état et le nouveau bureau exécutif de l’organisation ouvrière. « Mais la date n’a pas encore été fixée », a-t-il tenu à préciser.
Par ailleurs, L’UGTT a annoncé le 9 mars en cours via un communiqué publié sur sa page officielle qu’un entretien téléphonique a eu lieu entre le président de la République et le SG de l’UGTT, et qu’une rencontre entre Kais Saied et le bureau exécutif de l’UGTT « se tiendra dans les prochains jours », selon la même source.
Rappelons à ce propos que le 19 février, l’UGTT avait élu les nouveaux membres de son bureau exécutif à l’issue des travaux du 25e congrès de la centrale syndicale, qui s’est déroulé pendant trois jours dans le gouvernorat de Sfax.
Le soir même, le président de la République, Kaïs Saïed, a adressé ses félicitations, par une chaleureuse lettre manuscrite, au SG de l’UGTT, Noureddine Taboubi, reconduit à la tête de l’organisation syndicale. Affirmant que le l’organisation de Hached demeurera « un partenaire national efficient qui participera aux défis que traverse la Tunisie en cette phase délicate, afin de bâtir un avenir meilleur pour les générations futures ».
Nouvel axe ?
Alors, pourrons-nous désormais parler d’un « attelage » ou d’un « axe » entre les deux dirigeants pour négocier les prochaines échéances qui s’annoncent cruciales pour l’avenir du pays ? Tout porte à croire que Kaïs Saied a attendu la « légitimisation » de Tabboubi par ses pairs pour nouer une alliance stratégique avec lui, passant outre le Dialogue national qu’il honnit tant.
« Rien ne peut remplacer le Dialogue national »
Reste à savoir si Noureddine Tabboubi l’entendait de cette oreille. En effet, dans une déclaration accordée aux médias, hier lundi 14 mars 2022, alors qu’il présidait la commémoration du 23e anniversaire de la mort du leader national et syndical Habib Achour sur l’île de Kerkennah, le responsable syndical a réaffirmé que la Centrale syndicale « n’est pas dans une logique de confrontation avec le gouvernement ou avec la présidence de la République » ; ajoutant que la consultation électronique, « ne peut, en aucun cas, remplacer le Dialogue national avec toutes les composantes du pays ».
Piques
Et d’enfoncer le clou : « Parler de coup d’Etat ou de retour du parlement… ou encore parler de projet unilatéral, c’est du temps perdu », a t-il martelé ; avant d’ajouter : « c’est bien de faire associer les jeunes et de faire usage des nouvelles technologies, mais la consultation électronique ne peut, en aucun cas, remplacer le dialogue national avec toutes les composantes du pays surtout qu’elle a montré ses limites dans le sens où l’afflux est trop faible, d’où la nécessité d’opter pour un dialogue réel, direct et concret ». « Mais il n’est pas question qu’une partie impose sa vision ou sa conception », a-t-il averti en s’adressant sans détours à L’homme du 25-juillet
Or, il est de notoriété publique que cette consultation, chère au Président, na pas atteint ses objectifs initiaux, c’est le moins que l’’on puisse dire.
Selon les observateurs du macrocosme politique tunisien, le désenchantement des Tunisiens vis-à-vis de la fameuse consultation électronique affaiblit le Président, lequel serait dans l’obligation de nouer des nouvelles alliances avec les principaux acteurs politiques, notamment l’organisation syndicale. Laquelle, paradoxalement, sort vainqueur de la nouvelle donne ; dans l’attente du référendum constitutionnel tunisien qui devra avoir lieu le 25 juillet 2022 afin de permettre à la population de se prononcer sur une nouvelle Constitution.