La Banque centrale européenne (BCE) a opté pour le statu quo en maintenant ses taux directeurs au même niveau (-0,5% pour la facilité de dépôt) et en accélérant ses opérations d’achats d’actifs.
La prudence de la BCE trouve son explication dans un certain nombre de raisons. Primo, la guerre a renforcé les menaces d’une stagflation durable dans la zone euro. La BCE souhaite avoir une vision plus claire sur l’étendue des sanctions de la guerre et leurs implications, avant de remonter ses taux.
Secundo, la BCE voudrait éviter un scénario de transmission de la hausse des taux directeurs aux longs. Une telle remontée de ces derniers pourrait devenir pénalisante pour le financement des politiques de soutien à l’activité économique, pour le financement probable de l’effort de guerre, pour l’indemnisation des secteurs sinistrés par la guerre et les sanctions, pour le soutien des ménages lourdement affectés par la flambée des prix à la consommation, pour l’accélération du financement de la transition écologique…
Tertio, l’incertitude qui règne dans un contexte de guerre l’a amenée à choisir l’attentisme pour ne pas perdre ses munitions (de hausse des taux) et avoir la flexibilité nécessaire lorsque la flambée des prix mondiaux se transmettra aux prix à la consommation dans la zone euro. Quarto, la position de la Réserve Fédérale américaine inquiète la BCE.
Jusqu’où ira la prudence ?
La Fed s’oriente vers la réduction de la taille de son bilan via des opérations de ventes de titres (T-Bonds et autres) contre achat du dollar au lieu de recourir à une augmentation des taux directeurs qui pourrait déclencher une inversion de la courbe des taux. Or, de telles interventions déboucheront sur des opérations de ponction du dollar du marché, ce qui pénalisera davantage la monnaie européenne.
Enfin, les marchés s’attendent à des injections massives d’euros dans le cadre des plans de soutien pour les pays touchés (directement ou indirectement) par la guerre. De telles injections ne peuvent qu’accélérer le glissement de l’euro.
L’attentisme de la BCE semble être justifié. Toutefois, la question est de savoir jusqu’où ira la prudence. Il est certain que la BCE n’ira pas jusqu’à tomber dans le piège d’une banque centrale « behind the curve ». Crédibilité oblige !