La Réserve Fédérale Américaine (Fed) est à pied d’œuvre. Après plusieurs mois de gestion des attentes des acteurs du marché quant à ses futures actions, la Réserve Fédérale a décrété sa première augmentation de son taux directeur depuis 2016.En effet, lors de la réunion de son Comité fédéral de l’Open Market (FOMC) du 16 mars 2022, la Fed a augmenté le taux cible des fonds de 25 points de base pour le porter à 0,25-0,5 %.
Cette mesure était amplement attendue par le marché et découlait d’une forte reprise économique et de taux d’inflation élevés depuis des décennies. La Réserve Fédérale américaine (Fed) a également annoncé qu’elle prévoyait six nouvelles hausses du taux en 2022.
De Prime abord , la Fed a reconnu la nature « stagflationniste » du choc engendré par les contraintes d’approvisionnement continu dues à la pandémie et au conflit russo-ukrainien. Citant le Président de la Fed, Jerome Powell, « les perturbations de l’offre ont été plus importantes et plus durables que prévu, exacerbées par les vagues du virus ici et à l’étranger, et les pressions des prix se sont étendues à un plus large éventail de biens et de services. En outre, la hausse des prix de l’énergie entraîne une augmentation de l’inflation globale. La flambée des prix du pétrole brut et d’autres matières premières à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie exercera une pression supplémentaire à la hausse sur l’inflation à court terme dans le pays et à l’étranger ». En outre, le résumé des projections économiques du FOMC a affiché des révisions importantes de ses perspectives : les prévisions de croissance du PIB américain en 2022 ont été réduites d’une médiane de 122 points de base, passant de 4 % à 2,8 %. De même, les prévisions relatives à l’inflation de base, qui exclut les prix volatils des produits alimentaires et de l’énergie, ont augmenté de 140 points de base, passant de 2,7 % à 4,1 %. En d’autres termes, la Fed a reconnu que l’environnement macroéconomique américain était devenu plus « stagflationniste », avec une croissance plus faible et une inflation plus élevée.
Ensuite, la Fed a raffermi son ton belliciste concernant la lutte contre une inflation élevée, en lui accordant la priorité sur d’autres préoccupations macroéconomiques, telles qu’un éventuel ralentissement de l’économie mondiale et une plus grande incertitude liée à l’instabilité géopolitique. À cet égard, la Fed a surpris le marché en présentant une projection plus élevée de 2,8 % pour les taux directeurs en 2023 et 2024, ce qui implique un cycle de resserrement plus agressif que précédemment. Fait important, cette projection a dépassé la projection du taux d’intérêt dit « neutre » de 2,4 %. Le taux d’intérêt « neutre » est le seuil théorique qui sépare les conditions monétaires « accommodantes » des conditions « restrictives ». Dès lors, en fixant un taux directeur escompté supérieur au taux « neutre », la Fed a annoncé pour la première fois dans ce cycle qu’elle était prête à sacrifier la croissance du PIB au nom de la maîtrise de l’inflation.
In fine , la Fed a fait état d’ »excellents progrès » quant à son programme visant à accélérer la normalisation de son bilan, c’est-à-dire à réduire le montant global des actifs qu’elle détient. À la suite du choc pandémique, le bilan de la Fed a plus que doublé pour atteindre près de 9 000 milliards de dollars, y compris les injections de liquidités d’urgence et le programme d’assouplissement quantitatif (AQ) de 120 milliards de dollars par mois. En décembre de l’année dernière, la Fed a entamé un processus de « désengagement » ou de réduction de son programme d’assouplissement quantitatif. Lors de la dernière réunion du FOMC et de ses interventions, le Président Powell a vivement suggéré que le resserrement quantitatif (RQ) ou la réduction du bilan démarrera officiellement dans deux mois.
Dans l’ensemble , la Fed confirme son attitude « belliciste » en matière de lutte contre l’inflation. Elle a commencé à relever les taux et est prête à le faire de manière plus agressive au-delà de la position « neutre », rendant la politique monétaire « restrictive » ou « rigoureuse » dès 2023. De surcroît, la Fed a également annoncé un démarrage plus précoce que prévu du RQ. Nous prévoyons six nouvelles hausses de taux cette année et deux autres en 2023, pour atteindre un taux final de 2,75 à 3 %. Nous prévoyons également un RQ sous forme de liquidation passive d’actifs dans le bilan de la Fed, avec un plafond de 100 milliards de dollars par mois de réduction d’actifs. Powell a déclaré qu’il était prêt à relever les taux d’intérêt de 50 points de base lors de la prochaine réunion du FOMC en mai si nécessaire. Il s’agirait de la première augmentation d’une telle ampleur depuis 2000.
Source : QNB