Lors du vote pour le premier tour de l’élection présidentielle 2022, la communauté française en Tunisie a voté pour un duel inédit Macron-Mélenchon. En revanche, les électeurs de l’Hexagone ont opté pour une classique confrontation entre le président sortant et la candidate de l’extrême droite, Marine Le Pen.
A l’image de la France que nous aimons, ouverte, tolérante et peu portée sur les extrêmes, les 17 mille électeurs français inscrits sur les listes électorales en Tunisie, dont 7 mille d’entre eux seulement ont participé au vote dimanche 10 avril pour le premier tour de l’élection présidentielle française, ont propulsé Emanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon au second tour, avec une nette avance pour le président sortant (45% des voix) et 37% pour le leader de La France insoumise.
Par contre, pour cette présidentielle française version 2022, l’extrême droite ne ramasse que des miettes, puisque Marine Le Pen se contente d’un squelettique 5%, talonnée par Eric zemmour qui « culmine » à 3%. Un oiseau de mauvais augure que ses grandes ailes empêchent de voler.
Un vote pour la présidentielle française dans un mouchoir de poche
Evidemment, ce n’est pas le cas de la Métropole où le président candidat à sa propre succession et la candidate d’extrême droite se sont qualifiés avec une légère avance pour Emmanuel Macron (27,6%) sur Marine Le Pen (23,41%). Jean-Luc Mélenchon est troisième avec 21,95% des voix.
Un vote tellement serré que le second tour est incertain. Ainsi, un sondage Ipsos donne Emmanuel Macron à 54% des intentions de vote, 46% pour Marine Le Pen. L’écart se réduit pour Elabe qui a donné un rapport de force plus serré, 48% contre 52%. Ifop estime pour sa part que le duel se jouera dans un mouchoir de poche, 49% / 51%.
Et bis repetita. Le remake de 2017 aura bien lieu dans quinze jours entre Macron et le Pen. Un duel annoncé d’avance par tous les instituts de sondage et qui prend un air de revanche pour la fille de Jean-Marie Le Pen. Laquelle avait subi une véritable humiliation publique face l’ancien ministre de l’Economie, Emmanuel Macron, lors du fameux débat télévisé entre les deux tours en 2017.
Pour sa part, le président-candidat, même si le score qu’il a réalisé au premier tour est plus qu’honorable (27,6 % des voix), sait que rien n’est joué face à Marine. Sachant que dès le début de sa campagne, il a eu la clairvoyance de ne se concentrer que sur Marine Le Pen; faisant d’elle son unique adversaire dans le paysage politique français et ignorant superbement aussi bien Valérie Pécresse, la candidate du parti Les Républicains (LR), qu’Eric zemmour, dont l’excès et la démesure ne font pas de lui un adversaire qui boxe dans sa catégorie.
Les atouts et les failles de Macron
Mais, Emmanuel Macron a fait avec une entrée en campagne tardive et a minima. Puisqu’il n’a tenu qu’un seul meeting et n’a effectué que quelques déplacements en France. Préférant endosser l’uniforme d’un chef de guerre en lutte contre l’invasion traumatisante russe en Ukraine. Alors, le président sortant va devoir intensifier sa présence auprès des Français durant cette période de l’entre-deux-tours. De même qu’il devra « humaniser » son image vis-à-vis des Français défavorisés, les Gilets jaunes en particulier. Et ce, d’autant plus qu’il traîne une image de président froid, « ami des riches ». Bref, il doit « se chiraquiser » s’il veut s’attirer les voix d’une large frange de ses compatriotes fragilisés par le pouvoir d’achat en berne.
Mais, selon les observateurs, l’atout principal du chef de l’État réside dans le rejet viscéral d’une catégorie de Français des thèses racistes, nationalistes et xénophobes de l’extrême droite. Il compte désormais bénéficier d’un « front républicain » pour assurer un deuxième quinquennat. Mélenchon n’a-t-il pas répété à trois reprises: « Il ne faut pas donner une seule voix à Marine Le Pen ». Même s’il n’a pas explicitement appelé à voter pour Emmanuel Macron?
Marine, enfin dédiabolisée?
Face à lui, Marine Le Pen (23,41 % des suffrages), ne manque pas non plus d’atouts. Non seulement elle hisse pour la troisième fois sous la Ve République l’extrême droite au second tour d’une élection présidentielle, améliorant même son score du premier tour d’il y a cinq ans (21,30%). Mais, à l’instar de Jaques Chirac, lequel en 1995 évoquait « la fracture sociale », elle était la première personnalité politique à avoir le flair de concentrer inlassablement sa campagne électorale sur le thème du pouvoir d’achat. Attirant directement l’électorat populaire délaissé par un Macron soupçonné d’être « un mondialiste » opposé au « nationalisme » sourcilleux de la candidate du Rassemblement national.
De plus, Marine Le Pen paraît aujourd’hui plus présidentiable aux yeux de nouveaux électeurs de la classe populaire qui risquent de franchir le pas d’un vote pour l’extrême droite. Et ce, par une ironie de l’Histoire, grâce au discours haineux et outrancier de Zemmour contre les immigrés et les Français de profession musulmane, lesquels dans leur écrasante majorité, vivent paisiblement leur foi.