Les affrontements entre Palestiniens et soldats israéliens à Jérusalem sont devenus quotidiens. La peur commence à se répandre en Israël que le spectre d’une troisième intifada se précise chaque jour un peu plus.
Rappelons ici que la première intifada se déclencha en décembre 1987 et ne prendra fin qu’avec les Accords d’Oslo. Ils furent signés en septembre 1993 à Washington par le chef de l’OLP, Yasser Arafat, et le Premier ministre israélien, Itzhak Rabin.
Puis, la seconde intifada se déclencha en septembre 2000. Elle ne prendra fin qu’en 2005, après la rencontre d’Ariel Sharon et Mahmoud Abbas à Sharm el Cheikh. Et avec le désengagement unilatéral israélien de la bande de Gaza.
Enfin, en termes de violence, ce qui s’est passé vendredi 15 avril dernier à l’intérieur de la Mosquée Al Aqsa rappelle les événements de septembre 2000, prélude à la seconde intifada.
En septembre 2000, l’étincelle de l’intifada fut allumée par Ariel Sharon, alors chef de l’opposition de la droite extrémiste. En effet, il s’obstina à se rendre sur l’esplanade des mosquées, en dépit des mises en garde des services de sécurité israéliens sur les graves conséquences que cela engendrerait.
Vingt-deux ans plus tard, l’esplanade des mosquées est de nouveau le théâtre de grandes violences infligées aux Palestiniens par l’armée israélienne. Le vendredi 15 avril, plus de 150 Palestiniens furent blessés et 400 arrêtés. Tandis que protégées par la soldatesque israélienne, les hordes d’extrémistes juifs continuent d’envahir quasi-quotidiennement l’esplanade des Mosquées.
Double mission de l’armée israélienne
Tout se passe comme si, pour avoir empêché les extrémistes juifs d’accomplir leur suprême provocation: procéder au sacrifice du « mouton pascal » sur l’esplanade des mosquées, les forces de sécurité israéliennes leur permettent d’y entrer quand bon leur semble. De ce fait, l’armée israélienne se trouve investie d’une double mission. A savoir: réprimer les Palestiniens protestataires et protéger les extrémistes juifs provocateurs.
Mais contrairement à la seconde intifada, la violence cette fois n’est pas circonscrite dans les territoires occupés. Dans la dernière semaine du mois de mars, une série d’attaques à l’intérieur d’Israël, à Beersheva (Bir Essabaa), Tel-Aviv, Bnei Brak, Hadera et Um El Fahm a fait de nombreux morts israéliens.
Certaines attaques, comme celle d’Um El Fahm, ont été menées par des Palestiniens porteurs de la nationalité israélienne. Ce qui nourrit la peur des Israéliens de voir surgir les actes de violence ayant ensanglanté au printemps de l’année dernière les villes arabes israéliennes.
Par un mélange d’arrogance, de fanatisme et d’incapacité de voir plus loin que le bout de leur nez, les dirigeants israéliens ont toujours réagi aux actes de résistance palestinienne par plus de violence. Ils ont toujours répondu aux espoirs des Palestiniens d’édifier un Etat indépendant, par plus d’occupation et de confiscation de terres.
Ainsi, l’actuel Premier ministre Naftali Bennet ne fait pas exception. Il sort du même moule où ont été coulés ses prédécesseurs. Réagissant à la nouvelle vague de violence perpétrée par des Palestiniens dans des villes israéliennes, Bennet n’a rien trouvé de mieux à dire que de conseiller « tous ceux qui possèdent des armes de ne pas sortir sans elles »…
De Golda Meir à Naftali Bennet…
74 ans après sa création, Israël demeure encore incapable d’enfanter une classe politique dotée de la compétence et de la sagesse qui lui permettraient de prendre les décisions appropriées en vue de résoudre un conflit qui n’a que trop duré. Incapable de donner naissance à une nouvelle race de politiciens qui traiterait la cause du drame à la racine. Au lieu de se pencher obstinément et exclusivement sur les conséquences.
De Golda Meir à Naftali Bennet en passant par Menahem Begin, Itzhak Shamir, Ariel Sharon, Benyamin Netanyahu et les autres, aucun des Premiers ministres qui se sont relayés à la tête des gouvernements israéliens n’a eu la sagesse de prospecter les possibilités d’une solution politique. Ils ont toujours agi en fonction d’une idée fixe qui consiste à dire « puisque nous sommes les plus forts et soutenus par les plus fortes puissances du monde, il n’y a pas de raison pour que nous nous pliions aux revendications d’un peuple faible, soutenu par des peuples aussi faibles que lui. »
C’est cette idée fixe israélienne qui fait barrage à toute solution politique du conflit israélo-arabe. Mais, il faut bien le dire, Israël n’assume pas à lui tout seul la responsabilité du calvaire interminable des Palestiniens et la tension permanente qui mine la région. L’Occident en assume la plus grande part. Sa duplicité, son immoralité et son hypocrisie ont permis à Israël de se doter d’un statut spécial. Celui-ci le dispense des obligations du droit international et le fait bénéficier de l’impunité quelle que soit la gravité du crime commis.
En d’autres termes, le même statut dont s’est dotée la puissance américaine pour sévir impunément là où elle veut dans le monde, est offert à Israël pour sévir impunément là où il veut au Moyen-Orient.
Cet état d’immoralité et d’hypocrisie occidental qui empoisonne la politique internationale durera aussi longtemps que dure l’unipolarité du monde dont la perpétuation est à la tête des priorités de l’élite néoconservatrice à Washington.