La HAICA Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle veut créer un fonds pour soutenir la production audiovisuelle, radiophonique et télévisuelle. Et ce à l’instar A l’instar du fonds d’aide à la production cinématographique du ministère des Affaires Culturelles.
La HAICA ambitionne également de mettre en place un réseau de régulation audiovisuelle au Maghreb qui regroupe les instances nationales en charge du secteur de l’audiovisuel en Afrique du Nord.
C’est ce qui ressort de la rencontre-débat, tenue, mardi soir à Tunis, sur « les programmes télévisés entre critique et régulation » qui est organisée par la HAICA en présence de spécialistes en droits et des médias ainsi que des professionnels de l’audiovisuel (producteurs, réalisateurs, acteurs, propriétaires d »institutions médiatiques …) et des membres de la société civile.
Dans son intervention, Nouri Lajmi, président de la HAICA a rappelé que ce rendez-vous annuel est de retour après deux ans d’interruption en raison de la crise sanitaire du Covid-19.
Loin d’être une évaluation de l’état des lieux dans le secteur de l’audiovisuel, Lajmi a fait savoir que cette rencontre constitue « plutôt une occasion pour rassembler les spécialistes de l’audiovisuel et d’écouter les avis des divers intervenants dans le secteur ».
Le but étant de « contribuer à éduquer le public et amener les professionnels à améliorer le traitement dramatique, de certaines questions, tant au niveau du scénario et du récit que de la maitrise des outils techniques. »
Un réseau maghrébin de régulation audiovisuelle pour encourager la coproduction et taxer les plateformes de streaming
Concernant le futur réseau de régulation audiovisuelle dans les pays du Maghreb, Hichem Senoussi, membre de la HAICA, a fait savoir que l’objectif de ce projet est d’encourager la production d’oeuvres télévisuelles et instaurer un cadre propice à la coproduction entre les pays de la région.
Dans une déclaration à TAP, Senoussi a évoqué les contraintes qui se posent à la production dramatique qui « nécessite de gros moyens financiers ». Il serait ainsi préférable, à son avis, d’élargir la production en s’ouvrant sur les pays voisins pour réduire les coûts de la production dramatique et toucher un public plus large.
S’agissant des plateformes de streaming accessibles en Tunisie, Senoussi est pour l’imposition du principe de réciprocité en matière des droits de diffusion. Un réseau maghrébin constituera, à son avis, un outil efficace pour des négociations une taxe sur les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) regroupant les grandes entreprises de la Silicone Valley à l’origine des plateformes du streaming.
Cependant, la HAICA estime que la mise en place de ce réseau de régulation audiovisuelle doit s’accompagner par une démarche rationnelle en vue de surmonter les divergences politiques entre certains pays de la région.
La production audiovisuelle dans le collimateur de la critique
Autour du traitement de la HAICA et son silence face aux critiques sur les contenus audiovisuels, actuellement dans le collimateur du public et de la critique, Senoussi a admis que les œuvres créatives n’échappent pas au principe de régulation tout en faisant allusion à la critique dans certains médias.
Il est important que la responsabilisation soit faite sur la base de véritables outils de critique, d’autant plus que la structure dramatique obéit à un certain nombre de critères, a estimé Senoussi qui est également journaliste.
Sur un autre plan, il a jugé positive la polémique ayant suivie la diffusion de certaines séries ramadanesques ce qui a ouvert le débat public sur certaines questions abordées.
Il a salué les propriétaires des établissements médiatiques pour leurs efforts à produire des œuvres dramatiques, malgré ce qu’il qualifie de « manque de moyens financiers ».
Selon le membre de la HAICA, il existe dans certains pays ce qu’on appelle « l’exception culturelle » et « le pouvoir de la culture ». De même, la HAICA a essayé d’adopter un traitement qui tient en compte les exigences des œuvres créatives et celles de la critique.
Manoubi Zayoud, avocat et romancier, est revenu sur les origines de la polémique actuelle autour des productions audiovisuelles. Les procès faits aux créateurs ont toujours existé pour des œuvres littéraires et ou artistiques.
Il cite l’exemple de l’audiovisuel en Egypte où des films comme ceux du grand acteur Adel Imam ont plusieurs fois étaient la cible de critique et de procès faits par les téléspectateurs eux-mêmes dénonçant les idées qu’ils véhiculent. La justice avait acquitté l’acteur en se prononçant pour la liberté de la création.
La présence des enfants dans les œuvres dramatiques a été abordée par Bassem Icha, expert dans les Droits de l’Homme auprès de l’UNESCO. Quoique les contraventions ne sont pas aussi graves, les exigences artistiques et la volonté de réaliser des taux d’audience élevés ne doivent pas être aux dépends de l’intérêt humain, a-t-il dit.
La production télévisée des chaînes locales, pendant le Ramadan, est moins importante que celle de l’année dernière a fait constater Radia Saidi, membre de la HAICA. L’instance a recensé un total de trois œuvres dramatiques, trois sitcoms, une émission de la caméra cachée et une série policière, diffusés dans dix chaines.
Hormis la Télévision nationale, al Watanya 1 et 2, une enquête de la HAICA a couvert les chaines TV privées. Il en ressort que plus de 60 pc du volume de la production diffusée n’est pas nouveau, ce qui explique en partie le coût assez élevé de la production pour ces médias et leurs producteurs.
Un rapport de l’Unité de veille au sein de la HAICA relatif à la communication commerciale sur les médias de l’audiovisuel tunisien (télé et radios) réalisé au cours de la première semaine de ramdan (du 2 au 8 avril) a été présenté.
Des séquences qui comportent les témoignages des divers intervenants dans la production télévisuelle dont des créateurs et des producteurs ont été également diffusées.
Le débat a porté sur le contenu de certaines productions comme celles de la série «Baraa » diffusée sur Al Hiwar Attounsi en présence de son propriétaire, Sami Fehri. Ce dernier, également réalisateur de la série, s’est abstenu de tout commentaire et a refusé de donner des déclarations aux médias.
Baraa aborde la question de la polygamie qui est interdite en Tunisie depuis plus de soixante ans et l’adoption du Code du statut personnel, sous Bourguiba, à l’aube de l’indépendance (le 13 août 1956).
La diffusion de la série, pourtant largement suivie, a créé une grande polémique sur les réseaux sociaux et fait couler beaucoup d’ancres dans certains médias.
Un grand amalgame entre la fiction et la réalité a été constaté et que la HAICA et certains experts présents ont essayé de clarifier dans ce rendez-vous ramadanesque.
Avec TAP