Qu’il s’agisse d’un départ volontaire ou d’un limogeage, on murmure dans le Tout-Tunis que la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, s’apprête à jeter l’éponge. Info ou intox?
Ne dit-on pas qu’il n’y a pas de fumée sans feu? La démission ou le limogeage de la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, n’aurait surpris personne tellement l’idée flottait dans l’air. Des signes avant-coureurs? La nouvelle secrétaire générale du gouvernement fraîchement nommée, Sarra Rjeb, marqua les esprits en président lundi 26 avril un Conseil ministériel à la place de sa patronne. Sans explication aucune!
A-t-on jugé en haut lieu que Mme Rjeb, dont la compétence et la doigté ne sont pas à démontrer, était plus apte à traiter des dossiers techniques aussi compliqués que ceux de la Société tunisienne de l’électricité et du gaz (STEG) et la Société tunisienne des industries de raffinage (STIR)? Mme Bouden avait-elle une raison majeure qui l’empêchait de présider ce conseil ministériel de la plus haute importance? Des ennuis passagers de santé?
Mutisme troublant
Mystère et boule de gomme. En l’absence de porte-parole du gouvernement, il était tout à fait prévisible et même légitime que les rumeurs et interprétations, même les plus farfelues, se répandent comme un feu de brousse. Or, par son mutisme et son penchant naturel à la discrétion, Mme Bouden, un pur produit de l’administration tunisienne, en porte une partie de la responsabilité.
Malaise
Alors Najla Bouden aurait-elle jeté l’éponge? La rumeur de sa démission n’a cessé d’enfler, en ces temps de sables mouvants. Signe d’un malaise persistant et bien réel qui couve à la Kasbah. Et qui ne date pas d’hier.
Car, Najla Bouden, sortie de nulle part du chapeau de Kaïs Saïed, avait-elle les mains libres pour mener à bien sa propre politique à l’ombre pesante de son mentor? Lequel la considérait plutôt comme Premier ministre, voire une simple « collaboratrice », que cheffe de gouvernement avec les pouvoirs constitutionnels qui lui incombent.
Un discours d’adieu?
Pourtant, il y a cinq jours, la cheffe du gouvernement prononça un discours troublant qui sonne comme une annonce de bilan. Un discours d’adieu?
« Le gouvernement a tenu à concentrer tous ses efforts, malgré les défis et les accumulations. Afin d’assumer ses responsabilités pour sortir la Tunisie de sa crise et tenir les engagements qu’elle a pris.
Nous n’exagérons pas lorsque nous affirmons que nous avons réussi à rembourser les dettes intérieures et extérieures et à payer les salaires dans le respect de leur échéance ». Ainsi déclarait-elle samedi; et ce, à l’occasion de la célébration de la Journée internationale du travail. Sans pour autant préciser la nature des dettes remboursées, ni leur valeur, ni s’il s’agissait d’échéances ou de la totalité des dettes.
Mais si on pouvait considérer que le remboursement partiel ou total des dettes soit une belle nouvelle en ces temps de crise étouffante; le payement des salaires « et le respect de leur échéance » est-il devenu une performance dont la locatrice du palais de la Kasbah se targue?
« Nous avons également réussi à assurer les besoins nécessaires en denrées alimentaires de base. A un moment où nous avons été confrontés à la contrebande transfrontalière et à la spéculation illégale. Nous avons réussi à assurer un niveau minimum de prestations sociales et à fournir une réserve acceptable de devises étrangères », a-t-elle encore ajouté.
« Guerre de coulisses »
Et c’est le secrétaire général du Courant Démocrate Ghazi Chaouachi qui dégoupilla la grenade. En révélant que la cheffe du gouvernement, Najla Bouden, aurait présenté, il y a quelques jours, sa démission au président de la République. Laquelle démission aurait été refusée.
En effet, invité hier jeudi à la Matinale de Shems FM, l’ancien ministre des Domaines de l’État et des Affaires foncières révèle également l’existence « d’une guerre de coulisses. Et ce, entre le ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine et son collègue des Affaires Sociales, Malek Zahi; pour la succession de l’actuelle cheffe du gouvernement ».
En attendant la direction du vent, Ghazi Chaouachi ajoute que certains ministres ont aussi présenté leur démission et que d’autres refusent même de signer les documents quotidiens. « De peur d’être tenus responsables de la dégradation de la situation », précise-t-il.
« Allégations infondées » ?
Des propos « exclus d’une manière catégorique » le jour même par le ministre des Affaires sociales, Malek Zahi. Ce dernier considérait sur Shems FM que les informations relayées sur cette démission sont des « allégations infondées ». De même que « tous les membres du gouvernement travaillent comme une seule équipe sous la présidence de Najla Bouden. Dans une harmonie et une cohérence totale avec le président de la République, Kaïs Saïed ». Et, qu’au final, « nous sommes conscients de ceux qui se tiennent derrière ces allégations pour envenimer l’atmosphère et créer un climat trouble ».
De même, le ministre de l’Emploi et porte-parole du gouvernement, Nasreddine Ncibi est monté également au créneau pour balayer les « rumeurs » à propos du départ de la Cheffe du gouvernement Najla Bouden.
« Toute démission aurait été annoncée au public. Car c’est une question qui concerne l’opinion publique et le pays en général. D’ailleurs, Najla Bouden poursuit sa mission normalement. Elle est restée à travailler dans son bureau, hier mercredi, jusqu’à minuit ». Ainsi, déclarait-il jeudi 12 mai sur les ondes de Mosaïque FM.
Ainsi, le porte-parole du gouvernement réfute cette « rumeur ». Car « toute démission aurait été annoncée au public ». Mais il ne ferme guère la porte à un éventuel départ.
D’ailleurs, y a-t-il une raison valable pour que ce couple- composé d’un Président qui travaille 20h par jour, selon Mme Rachida Ennaifer, et sa cheffe du gouvernement qui quitte habituellement son bureau à minuit- se sépare, même à l’amiable?