S’il est un point faible que le pouvoir en place en Tunisie doit revoir et corriger, c’est bien celui de la communication. Le modus operandi adopté ne peut rien apporter. Sinon, renforcer ses contradicteurs.
La dernière semaine (celle allant du 23 au 29 mai 2022) n’a pas apporté de bonnes nouvelles pour le président Said et le processus du 25 juillet 2021. Entre le refus de l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT) de participer au Dialogue national et ce que l’on peut considérer comme un véto de la Commission de Venise, un organe consultatif du Conseil de l’Europe sur les questions constitutionnelles, il y a eu beaucoup de revers qui sont, le moins que l’on puisse dire, des égratignures pour le projet présidentiel.
Et comment le chef de l’Etat réplique à tout cela ? A son habitude, et pour l’essentiel, soit il se tait, soit il appelle un responsable pour répondre indirectement à ceux qui lui ne veulent pas du bien ou le contredisent. Ou il intervient lors d’une visite et toujours face à des responsables. A se demander si cette attitude est bien la plus efficace à l’heure où les Tunisiens ont besoin de savoir exactement où on va. La réponse est non. Car, elle ne permet pas de tout dire et elle n’offre pas la possibilité de poser des questions pour précisément d’aller plus loin et surtout d’apporter des contre arguments. La démocratie est ainsi faite. On pourra, cependant, répondre par la fameuse phrase dont l’usage est fréquent : pas de commentaire !
Unique remède
A cela les démocraties n’ont ainsi trouvé qu’un seul et unique remède : la communication. Les Tunisiens, qui sont au fait de tout ce qui se déroule dans le monde, observent bien, par exemple, comment cette fonction est assurée notamment par les porte-paroles. Ces acteurs de la scène politique mondiale que tout le monde a fini par identifier. Et qui sortent pratiquement tous les jours pour prêcher la bonne parole. Dans certains pays ce briefing de presse est, de plus, quotidien et retransmis en direct à la télévision.
Il est de notoriété publique que le gouvernement a un porte-parole. Certes. Mais, combien de fois sortir-t-il pour notamment se prêter au jeu des questions réponses ? On se souvient qu’un ministre occupant un maroquin de souveraineté a quitté une fois la salle à la fin de son discours sans laisser les journalistes lui poser des questions ! Le porte-parole du gouvernement intervient-il ainsi, et pour ainsi dire, automatiquement chaque fois que des interrogations s’installent dans le public ? Nous dit-il en fait tout ? Une opération du type benchmarking peut nous renseigner sur le vécu tunisien.
Il arrive cependant au chef de l’Etat de communiquer. Mais pas par le biais de ce mode largement utilisé. Quelquefois, il le fait, du moins tout le monde peut penser que c’est le cas, par le biais de responsables, d’anciens collaborateurs ou encore des politiques qui ne peuvent être qu’une copie et non un original. Ces derniers sont du reste, par moments, critiqués dans les réseaux sociaux notamment parce que non crédibles ou pour avoir commis quelques impairs.
« Redevabilité »
Il est à se demander aussi pourquoi ni la présidence de la République, ni encore celle du Gouvernement, ne disposent pas de conseillers en communication. Qui peut d’ailleurs le mieux exprimer cette « redevabilité » des démocraties qu’est la communication que ces acteurs ?
En l’absence d’un conseiller en communication, le pouvoir exécutif ne fait, tôt ou tard, que céder du terrain facile à ses contradicteurs qui finissent par avoir souvent obtenir gain de cause. Poursuivons cette réflexion pour nous demander que fera le gouvernement maintenant que la principale centrale syndicale du pays a décidé, le 28 mai 2022, de présenter son programmes de réformes politiques, économiques et sociales. Une date a même été fixée : le 2 juin 2022. Le gouvernement lèvera-t-il alors entièrement le voile sur son programme qu’il entend présenter au Fonds Monétaire International (FMI) et qu’il a, en partie, gardé secret ?