« La marche des drapeaux » est un défilé provocateur que mènent les extrémistes israéliens depuis 1968. Après la défaite arabe dans la guerre des six jours, Israël a décrété « la réunification » de la Ville sainte de Jérusalem après l’occupation de la partie –Est de la Ville sous autorité jordanienne jusqu’au 4 juin 1967. Et c’est pour fêter cette « réunification » que des hordes d’extrémistes israéliens défilent dans un état quasi-hystérique en criant leur mot d’ordre favori: « Mort aux Arabes ».
Pendant des années, le défilé annuel d’extrémistes religieux agitant des drapeaux israéliens suivait un itinéraire précis. Encadrée par l’armée, la marche commençait de Jérusalem-Ouest et se terminait au Mur des lamentations, évitant soigneusement l’esplanade des Mosquées. Les affrontements avec les Palestiniens étaient inévitables; mais le niveau de violence était assez limité, sauf l’année dernière et cette année.
L’année dernière, « la marche des drapeaux » s’était déroulée au moment où les villes mixtes israéliennes étaient secouées par une vague de violence entre Juifs et Arabes palestiniens. La violence était telle à Nazareth, Um el Fahm, Afula et d’autres villes mixtes que le spectre de guerre civile pointait à l’horizon.
A peine le défilé a-t-il commencé que le Hamas lança une salve de roquettes sur Israël. Donnant ainsi le prétexte à l’armée israélienne de déclencher une énième guerre dévastatrice contre l’enclave de Gaza.
Mais, en termes de provocation et de violence, ce qui s’est passé le dimanche 29 mai était sans précédent. Le Premier ministre Naftali Bennet a, semble-t-il, donné carte blanche aux hordes des colons et des extrémistes de faire ce que bon leur semble. Pour la première fois depuis l’occupation de la Ville sainte par l’armée israélienne il y a 55 ans, pas moins de 2600 colons messianiques, venus en masse de leurs colonies en Cisjordanie, ont envahi l’esplanade des Mosquées. La Mosquée Al Aqsa elle-même fut envahie. Les extrémistes s’y sont adonnés à leurs pratiques talmudiques, à la grande consternation des Palestiniens.
Du jamais vu sous aucun gouvernement israélien, y compris les plus extrémistes comme ceux de Menahem Begin, Itzhak Shamir ou même Benyamin Netanyahu. Le plus consternant est que cette désacralisation à grande échelle des lieux saints musulmans à Jérusalem a été permise par le gouvernement de Naftali Bennett dont la coalition ne tient en place que grâce au soutien du parti islamiste « Ra’am » de Mansour Abbas…
Ce qui est appelé « Communauté internationale », c’est-à-dire les pays occidentaux influents, se soucient comme d’une guigne du sort des lieux saints musulmans à Jérusalem. Ou de la violence infligée conjointement aux Palestiniens par les hordes de colons et par l’appareil répressif israélien. Depuis 55 ans, le monde en général et le monde arabe en particulier assistent au soutien continu de l’Occident à Israël. Ainsi qu’à son indifférence permanente à toutes les formes d’injustice que ce pays fait subir aux Palestiniens. Et même s’ils n’étaient pas absorbés corps et âme par l’affaire ukrainienne, les pays occidentaux auraient sans aucun doute regardé ailleurs, comme ils ont l’habitude de le faire.
Le problème est dans le silence assourdissant observé dans les milieux officiels arabes. Aucune réaction proportionnelle à la gravité de l’événement. Aucune protestation vigoureuse contre l’invasion des lieux saints musulmans dans la vieille Ville de Jérusalem.
Malgré leur gravité, les événements du 29 mai ne semblent nullement entraver le dynamisme du processus de normalisation des relations avec Israël entamé par nombre de pays arabes. Les Emirats Arabes Unis s’apprêtent même à signer le mardi 31 mai un accord de libre-échange avec Israël…
Pourquoi dans ces conditions Israël aurait-il des scrupules dans sa gestion de l’occupation? Pourquoi empêcherait-il ses colons messianiques et ses extrémistes hystériques à mettre la vieille Ville et ses lieux saints sens dessus dessous? Bénéficiant de la complicité du « Monde Libre » et de l’impuissance du monde arabe, Israël n’a aucune raison de respecter le droit international.
Pays fondamentalement immoral, Israël n’a aucune raison de se plier aux principes de base de la morale. Menant une politique inhumaine à l’égard des Palestiniens, Israël a jeté depuis longtemps aux orties les principes élémentaires du droit humanitaire.
Que conclure d’autre quand le gouvernement de ce pays mobilise 3000 soldats pour protéger des milliers d’extrémistes hystériques agitant une forêt de drapeaux israéliens en criant « Mort aux Arabes », et pour réprimer impitoyablement tout Palestinien qui ose agiter son drapeau?