Nejib Hachana, ancien ambassadeur réagit aux récents propos tenus par le président de la République, Kaïs Saïed. Et ce, à propos du rapport établi par la Commission de Venise concernant les derniers développements politiques en Tunisie. Il livre ses réactions à leconomistemaghrebin.com.
Les propos tenus, hier lundi 30 mai 2022, par le chef de l’Etat à propos de la Commission de Venise sont en train de susciter des réactions diverses; et notamment sur les réseaux sociaux. Ils vont de l’appui inconditionnel aux critiques les plus véhémentes.
Pour avoir le point de vue de spécialistes et connaisseurs, nous avons commencé par contacter, le diplomate chevronné, Nejib Hachana. Il fut ancien ambassadeur de la Tunisie auprès des Etats-Unis d’Amérique. Mais aussi: ancien directeur général du monde arabe au sein du ministère des Affaires étrangères; ancien ambassadeur à Beyrouth, Koweït et Alger; et actuel vice-président du centre international Hédi Nouira de prospective et d’études sur le développement (CIPED). Il a bien voulu nous livrer son point de vue sur ce point précis. Déclaration…
« Pour mieux placer les choses dans leur véritable contexte, il est bon de mentionner que nous sommes en présence d’un nouveau phénomène mondial. A savoir l’émergence des groupes et autres organisations d’influence sur les centres officiels de décisions dont, bien entendu, les gouvernements.
Les relations internationales doivent être régies loin des tensions et des passions…
En effet, il existe, désormais, une nouvelle vague marquant l’ordre mondial, conduit par les USA et l’Union Européenne. Celle-ci n’obéit plus aux valeurs politiques et diplomatiques dans le sens traditionnel du terme. Mais c’est un nouvel équilibre des forces qui prévaut. Tout en étant dominé, voire régi, par ces organismes de réflexion. Avec la Commission de Venise qui passe pour être le régulateur attestant des vraies démocraties et des constitutions valides ou non.
Ainsi, l’ère des idéologies du temps de la guerre froide est révolue, voire enterrée. C’est désormais l’ère de la domination du concept de la démocratie avec ses contraintes, souvent, pas très saines.
C’est donc dans ce cadre et esprit qu’il faut placer la Commission de Venise. De même que son rôle dans l’élaboration des relations internationales et des chèques de solvabilité octroyés aux différents régimes à travers le monde.
Pour revenir à la déclaration de Kaïs Saïed, je dirais que tout en préservant la décision souveraine du pays, il était inutile de faire preuve de colère et d’émotivité. Car cela peut valoir à la Tunisie des animosités, voire conduire à une escalade inutile et préjudiciable à notre pays.
En effet, nous avons appris que les relations internationales doivent être régies loin des tensions et des passions exacerbées.
Et puis, je pense que le chef de l’Etat n’aurait pas dû monter au créneau en personne, à ce stade. Mais charger plutôt un haut diplomate du ministère des Affaires étrangères, par exemple, pour émettre ces réflexions. Ce qui aurait eu pour avantage de laisser le chef de l’Etat loin des polémiques et d’avoir la possibilité de rectifier le tir en cas de besoin… »