Les Banques centrales dans le monde explorent actuellement la piste des monnaies digitales (CBDC – Central Bank Digital Currency). Selon le cabinet PwC, depuis 2014, les CBDC (interbancaires ou de détail) ont été explorées par 60 Banques centrales. Aujourd’hui, près de 90% des Banques centrales sont séduites par le potentiel des monnaies digitales et 15% sont déjà impliquées dans des projets pilotes.
La marche vers la CBDC vise la mise en place d’une société sans cash. Elle a été boostée, dans les économies avancées, par la volonté de lutter contre le blanchiment d’argent, le terrorisme et la corruption, et la maitrise des coûts d’intermédiations. Alors que dans les économies en développement, le motif de l’inclusion financière domine les autres objectifs.
Les Banques centrales dans le monde ont pris conscience du fait qu’un système de paiement moderne, interopérable et efficace est incontournable pour garantir l’ancrage aux standards internationaux de bonne gouvernance et de performance dans le secteur financier. Certes, les CBDC pourraient être efficaces pour surmonter une bonne partie des imperfections du marché. Toutefois, une inscription précipitée dans la digitalisation, guidée beaucoup plus par le show, avec des textes réglementaires bâclés et sans aucune réflexion profonde, pourrait s’avérer contre-productive et surtout source de menaces.
La problématique des monnaies digitales des Banques centrales soulève un certain nombre de défis à relever :
• Un défi de protection de la confidentialité des données : comment garantir l’efficacité des politiques de lutte contre le blanchiment d’argent sans mettre en péril la protection de la vie privée des citoyens ?
• Un défi de veiller sur la concurrence : quel dispositif réglementaire approprié faut-il mettre en place pour réussir la transition digitale sans compromettre l’état de la concurrence dans le système de paiement bancaire ?
• Un défi de viabilité des établissements bancaires : quel avenir pour la banque de détail en présence des retombées négatives des CBDC sur l’offre de crédit et le coût de financement?
• Un défi de stabilité pour les paiements internationaux : comment garantir que le développement des CBDC dans les règlements transfrontaliers ne soit pas déstabilisant pour les paiements internationaux, malgré l’ensemble des menaces qu’il fait peser sur les grandes devises, notamment le dollar américain ? Un cocktail de défis difficilement surmontables, surtout pour les pays en déficit de résilience économique et financière.
Article paru dans le numéro de l’Economiste Maghrébin n 846 du 8 au 22 juin 2022