« La Tunisie devrait se donner les moyens nécessaires pour devenir une destination plus attrayante pour les investisseurs nationaux et internationaux, qui cherchent à tirer parti de sa dynamique de décarbonisation ». Ainsi a plaidé le gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT), Marouane Abassi, lors de l’ouverture de la 23ème édition du Forum annuel de l’Économiste Maghrébin, lundi à Tunis, sur le thème « La Tunisie face aux défis économiques des transitions écologique et énergétique ».
L’accélération de la décarbonisation de la Tunisie « nécessitera certainement des investissements importants », a-t-il affirmé. Suggérant, à cet égard, la mise en place d’un ensemble de réformes « nécessaires » visant à améliorer l’environnement des affaires en Tunisie.
A ce titre, il a évoqué les incitations financières qui, selon lui, pourraient jouer également un rôle primordial pour encourager l’adoption de technologies et de sources d’énergie plus propres au niveau sectoriel. Et ce, qu’il s’agisse du secteur des transports, des bâtiments, de l’agriculture ou de l’électricité. En outre, « la mise en œuvre d’un système de tarification du carbone dans certains secteurs, à fortes émissions, peut également contribuer à soutenir la transition », a-t-il encore fait savoir.
Néanmoins, toute l’approche requiert, inévitablement, « la mise en place de dispositions visant à protéger la production tunisienne. Afin d’éviter qu’une taxe carbone ne désavantage les industries nationales, à forte intensité énergétique, destinées à l’exportation, par rapport à leurs concurrents internationaux qui ne sont pas soumis à un prix équivalent », a-t-il insisté.
D’autres mesures non financières sont essentielles pour promouvoir la décarbonisation, a-t-il dit. Il s’agit, entre autres, de la mise en place de « normes techniques et environnementales plus strictes pour les nouvelles constructions ou la rénovation des bâtiments » et la concrétisation des « réformes institutionnelles et réglementaires pour stimuler la participation du secteur privé ».
Pour le gouverneur de la BCT, il demeure « essentiel de mettre en place des mesures compensatoires pour les groupes les plus vulnérables de la société et qui supporteraient les coûts de tarification du carbone ». Dans ce cadre, l’initiative de la Banque Mondiale « Partnership for Market Readiness » constitue une opportunité pour appuyer la Tunisie dans ce processus « auquel notre pays a adhéré depuis avril 2018 ».
Il a, par ailleurs, mis en exergue le nécessaire « alignement de la stratégie énergétique de la Tunisie sur celle de l’Union Européenne ». Et ce, afin de bénéficier de l’ambition de l’Europe de devenir neutre en carbone à l’horizon 2050 et « qui exige une augmentation de l’énergie renouvelable dans leur mix, dont une partie pourrait, à l’avenir, être approvisionnée par la Tunisie ».
Il a spécifié deux préalables à cet ajustement : Il s’agit, d’abord, de l’instauration d’un dialogue fructueux entre la Tunisie et l’UE pour « explorer les opportunités futures de la décarbonisation », tout en veillant à « éviter les externalités potentiellement négatives » sur l’économie tunisienne.
En outre, il a insisté sur la nécessité de mettre en place une stratégie claire pour mobiliser, à l’échelle internationale, les fonds de financement bilatéraux et multilatéraux nécessaires. Ces fonds, a-t-il ajouté, « sont devenus plus accessibles et à des coûts concessionnels afin de développer des filières à faible émission de carbone et pour créer un environnement propice à des investissements durables ».
Enfin, Marouane El Abassi a estimé que la Tunisie gagnerait « à décarboniser son industrie ». Cela constituera, a-t-il ajouté, un appel pour déployer des efforts de décarbonisation plus concertés et plus complets, afin d’anticiper l’intensification, inévitable, des réglementations et la taxation des émissions de carbone.
Avec TAP