Finalement, la grève générale dans le secteur public a bien eu lieu le 16 juin 2022 à travers tout le pays, avec des mentions spéciales pour Tunis et Sfax, capitale du Sud.
Il faut dire que les appréhensions étaient grandes et multiples avant ce débrayage à cause des tensions enregistrées entre les dirigeants de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) et les fans inconditionnels appartenant aux coordinations de ce qu’on appelle le « harak du 25 juillet », des groupes épars sans leader connu, sans dénomination officielle et sans existence légale et officielle.
En effet, au moment où les responsables de la centrale syndicale agissaient à visage découvert, ces coordinations bénéficiaient d’une logistique immense avec des espaces de réunions, des conférences de presse couvertes par les médias, dont notamment ceux officiels et publics.
Sans oublier leurs passages et tournées des différents plateaux radiotélévisés pour faire passer leurs messages et autres slogans, souvent, assimilables à des insultes et des dénigrements envers le plus prestigieux des syndicats tunisiens qui a toujours joué et assumé un rôle à la fois social et politique dans la vie nationale du pays.
On citera, également, les multiples pages foisonnant à travers les réseaux sociaux usant d’insultes trop directes et nommément envers le secrétaire général de la centrale syndicale et autres dirigeants de l’UGTT.
Ces pages et ces détracteurs ont multiplié les infos-intox, tablant, jusqu’au dernier moment, sur un « boycott de la grève », mais dès les premières heures de la journée du 16 juin, une effervescence des grands jours était visible à travers toute la Tunisie.
Ainsi toutes les activités étaient paralysées ou presque, Noureddine Taboubi donnant le ton à Tunis et l’Union régionale du travail en faisant de même à Sfax.
Le secrétaire général de l’UGTT a annoncé d’entrée un succès de l’ordre de 96,22 % de la grève générale des entreprises publiques. «La centrale syndicale tiendra bon malgré les manœuvres des traîtres, des vendus, les campagnes de harcèlement et le ciblage de l’organisation», a-t-il martelé en substance.
Pourquoi le gouvernement veut-il montrer qu’il ne prend pas le poids de l’UGTT au sérieux ?
Or, en cette même journée où les citoyens ont ressenti, concrètement, cette paralysie, la présidence du gouvernement a publié, sur la page officielle de son site, un communiqué indiquant qu’un conseil ministériel s’est tenu, ce jeudi 16 juin 2022, au Palais de La Kasbah, sous la présidence de Najla Bouden.
C’est dire qu’aussi bien le gouvernement que l’UGTT ont campé sur leurs positions malgré les tentatives de dernière minute pour désamorcer la crise et briser l’élan du débrayage dans le sens où les responsables de la centrale syndicale ont été conviés à La Kasbah pour un round de négociations qui ont échoué après cinq bonnes heures de discussions.
Et si Najla Bouden et ses ministres n’ont rien communiqué de crédible sur cette réunion, des membres du Bureau politique de l’Union ont révélé que la délégation gouvernementale « disait la chose et son contraire, à commencer par la fameuse circulaire n°20 ».
« Il était clair que les vrais négociateurs et décideurs ne se trouvaient pas à La Kasbah ; beaucoup de pédalages étaient visibles avec une multiplication des coups de fil », ont affirmé les Taboubi, Tahri et Selmi, avant d’indiquer qu’il n’y avait aucune indication sérieuse sur une quelconque volonté de parvenir à un terrain d’entente afin d’éviter le point de non-retour.
« Nous n’accepterons plus que les travailleurs continuent à assumer, seuls, le fardeau des sacrifices qui doivent être équitablement consentis par toutes les catégories sociales », a répété M. Taboubi, avant de réclamer le document original adressé par le gouvernement au Fonds monétaire international.
« Le gouvernement et l’UGTT ont campé sur leurs positions malgré les tentatives de dernière minute pour désamorcer la crise et briser l’élan du débrayage »
« Nous n’avons plus confiance en ce gouvernement de Najla Bouden qui doit nous dévoiler tous les détails des tractations avec le FMI », a enchaîné le secrétaire général de l’Union.
Pour La Kasbah, tout le monde a travaillé normalement en cette journée du 16 juin !
A relever, à la fin de cette journée du 16 juin 2022, cette nouvelle manie de la part du gouvernement avec des communiqués non signés faisant état, d’une façon vague et empreinte de généralités, d’un déroulement normal du travail dans les différents départements des sociétés publiques. Une première du genre qui va susciter des commentaires à n’en pas finir !…
On apprend, ainsi, que les sociétés de transport, l’OACA et la plupart des autres départements ont fonctionné normalement. Parfois à 100% de la capacité de leur personnel. Selon les observateurs avertis, il s’agit de communiqués destinés à la consommation par le locataire du Palais de Carthage afin de le convaincre de « l’échec de la grève et que l’UGTT ne pèse rien ».
On se rappelle l’affirmation avec fierté par le chef de l’Etat de la participation de « pas moins de 1 800 000 personnes à des manifestations de soutien à sa personne et à son processus déclenché le 25 juillet 2021 ».
En tout état de cause, le bras de fer semble se poursuivre avec cette réaction officielle d’indifférence et l’annonce par l’UGTT de la tenue, incessamment, de nouvelles réunions du Bureau exécutif et de la Commission administrative en vue de l’organisation d’une autre grève générale touchant, cette fois, le secteur public et la Fonction publique.
Entre-temps, le gouverneur de la Banque centrale assure que la Tunisie n’a pas d’autre choix ni de plan « B » pour remplacer un accord avec le FMI. Alors ?!…