Gazprom, le géant énergétique russe, compte expédier moins de gaz en Europe. Et ce, probablement pour la soumettre à plus de pression. L’Allemagne, qui dépend de ces approvisionnements, s’inquiète profondément de cette situation.
La société a déclaré hier qu’en raison de circonstances imprévisibles, elle n’était pas en mesure de respecter les contrats de gaz conclus avec l’Europe. Uniper, l’acteur énergétique allemand, a reçu une lettre de Gazprom Export. Dans laquelle la société revendique la force majeure de manière rétroactive; et ce, pour les déficits passés et actuels des livraisons de gaz.
Juridiquement, cela signifie des circonstances qui empêchent une partie de remplir ses obligations contractuelles. Ce qui l’exonère en théorie de toute sanction. Les Allemands considèrent que cela est injustifié. D’ailleurs, ils rejettent même formellement la demande de force majeure.
Par conséquent, les responsables en Allemagne, et ailleurs en Europe, sont de plus en plus préoccupés par la possibilité d’un arrêt total de l’approvisionnement en gaz en provenance de Russie. Ces craintes se sont intensifiées. Et ce, après que Nord Stream 1, le gazoduc clé reliant la Russie à l’Allemagne, a été fermé au début du mois pour des travaux de maintenance. Certains doutent que les flux soient entièrement rétablis après la fin des travaux prévus pour le 21 juillet.
A cet égard, notons que les pays européens recevaient environ 40% de leurs importations de gaz de la Russie; avant que celle-ci n’envahisse l’Ukraine. Les responsables européens ont fait des pieds et des mains pour mettre fin à cette dépendance. Mais c’est un processus coûteux et difficile à réaliser du jour au lendemain.
Qui pour remplacer la Russie?
La Commission européenne a annoncé de nouveaux accords gaziers avec les États-Unis et l’Azerbaïdjan; alors qu’elle cherche de nouveaux fournisseurs fiables. Hier, Ursula von der Leyen a signé un accord avec Bakou. Il vise à doubler les importations de gaz naturel d’ici 2027, soit 20 milliards de mètres cubes par an.
De son côté, Mario Draghi s’est rendu à Alger pour doper les flux de gaz qui transitent par la Tunisie. Les Algériens comptent approvisionner l’Italie de six milliards de mètres cubes supplémentaires en 2022. Se positionnant ainsi comme un partenaire énergétique stratégique pour le Vieux continent.
De plus, si l’Union Européenne a réussi à réduire les volumes d’importations d’hydrocarbures de Russie, elle n’a pas réussi à réduire le prix qu’elle paie. En effet, les prix du gaz européen se sont envolés. Ce qui signifie aussi que la Russie peut envoyer moins de gaz en Europe et gagner autant, voire plus, d’argent qu’avant.
Réduction de la consommation
Par ailleurs, récemment, l’Agence Internationale de l’Energie (AIE) a tiré hier la sonnette d’alarme sur l’approvisionnement énergétique de l’Europe. Si les Européens veulent passer l’hiver sans gaz russe, la stratégie de diversification des pays fournisseurs ne suffira pas. Il faut impérativement réduire sa consommation de gaz.
Selon l’AIE, il faut stocker 12 milliards de mètres cubes de gaz supplémentaires durant les trois prochains mois pour se mettre à l’abri. Pour cela, il faudrait que Nord Stream 1 soit bien relancé par les Russes; et ce, jusqu’à début octobre. Un scénario très hypothétique.
En prévision, l’AIE appelle à mettre en place des systèmes d’enchères pour la vente de gaz aux industriels. Mais aussi de développer temporairement d’autres sources d’électricité; même si elles sont plus émettrices de carbone. Telles que le charbon ou le pétrole. De même qu’à lisser les pics énergivores de consommation par une plus grande coordination entre pays européens. Des campagnes de sensibilisation sont également recommandées. Car chaque geste compte.
Ces tensions risquent de peser lourdement sur les marchés énergétiques encore durant l’été. Surtout que la visite de Joe Biden au Moyen Orient n’a rien apporté de nouveau côté offre.