48 heures après la tenue du référendum et moins de 24 heures après l’annonce des résultats préliminaires officiels par l’Instance supérieure indépendante des élections, l’opération du vote sur le projet de la nouvelle constitution est loin de faire l’unanimité quant à sa crédibilité à tous les niveaux.
Outre la grande polémique suscitée par la manière d’écrire le texte du projet entre les partisans et les détracteurs du chef de l’Etat dont notamment le coup de grâce assené par le professeur et Doyen, Sadok Belaïd au Président Kaïs Saïed , juste « bon connaisseur des histoires des constitutions », les anomalies se sont poursuivies de plus belle après « l’approbation » mise en doute par l’opposition et par les faits. Qu’on en juge !…
Tout d’abord, il est significatif de rappeler les prédictions faites par Farouk Bouasker, président de l’ISIE, en personne lors d’une conférence de presse tenue le 18 juillet 2022, et pour qui 2 800 000 électeurs voteraient pour la constitution. Son argument ? C’est le nombre de personnes ayant consulté le « 195 » pour vérifier qu’ils sont bien inscrits sur le registre des électeurs !!!
Très faible taux de participation, soupçons de trucage…
Ensuite, le 25 juillet à 22 heures, toujours, selon Bouasker, il était impossible de donner le taux de participation à cause des longues files d’attente de personnes encore à l’intérieur des bureaux de vote qui n’ont pu, donc, fournir leurs taux.
Or, tout le long de la journée du lundi, aucune file d’attente n’était visible à aucun moment lors des multiples reportages en direct assurés par l’unique chaîne nationale de télévision ! D’ailleurs, ceux qui mettent en cause lesdits taux de participation ont mis au défi l’Instance et la Télévision nationale de montrer aux Tunisiens des images desdits « encombrements ».
Mais le « pire » était à venir avec la révélation des résultats globaux. Tout d’abord, la conférence de presse – qui n’en était pas une – était donnée vers 23 heures dans la soirée du mardi 26 juillet alors qu’elle est prévue et annoncée pour 18 heures. Après 5 heures d’attente, le président de l’ISIE a lu un document des résultats préliminaires officiels avant de plier bagage sans le moindre échange avec les représentants des médias ; pourtant très nombreux pour l’occasion.
Comportement irrespectueux et douteux de l’ISIE
Ce n’est ni professionnel, ni respectueux pour les journalistes qui auraient pu rester chez eux et avoir, exactement, les mêmes informations tout en s’épargnant la fatigue du déplacement et en gagnant le temps perdu dans les déplacements et l’attente inutiles. Et ce n’est pas fini…
Le lendemain mercredi, une surprise massue attendait les Tunisiens avec la publication par des internautes de tableaux faisant état de chiffres sur la participation et le nombre des « oui » et des « non », des chiffres qui se sont révélés faux avec des anomalies et des différences énormes entre les données de deux tableaux de documents, signés, tous, par le président de l’ISIE, Farouk Bouasker qui a minimisé le phénomène dans le sens où, pour lui, la différence globale n’est que de 73 mille voix, ce qui n’est pas de nature d’influencer la crédibilité.
Il faut dire qu’après le déni de l’ISIE, on a parlé d’erreur de manipulation en retirant les tableaux erronés sans désigner un éventuel responsable de l’erreur avant de finir par annoncer le limogeage du directeur de cabinet du président de l’ISIE, du directeur exécutif de l’instance, Amor Boussetta, vice-président de l’ISIE, Maher Jedidi, a, lui, assuré dans une déclaration médiatique, que des membres de la salle des opérations avaient été écartés en plus du chef de cabinet de l’Instance.
En d’autres termes, on a fini, selon les analystes, par trouver le bouc émissaire tant recherché en de pareilles circonstances, mais on n’a rien résolu sur le fond dans le sens où le chef de l’Etat et l’ISIE ne reconnaissent pas les difficultés et persistent dans la fuite en avant puisque Kaïs Saïed vient de donner ses directives à la cheffe du Gouvernement pour élaborer les textes relatifs aux prochaines élections législatives.
Les USA et les Européens passent à un pilier supérieur de menaces
Or en ces moments où le Président de la République persiste à imposer les faits accomplis, les réactions étrangères se font de plus en plus pressantes et désobligeantes notamment de la part des Etats-Unis d’Amérique par la voix de Secrétaire d’Etat, Anthony Blinken et de leur nouvel ambassadeur pressenti à Tunis.
Tout en menaçant de serrer encore la vis avec de nouvelles réductions des aides, Washington préconise « d’user de tous les moyens en sa possession pour faire une pression sur le pouvoir en Tunisie afin de l’amener à reprendre le processus démocratique avec un nouveau code électoral permettant à toutes les formations de participes aux prochaines élections législatives.
En effet, pour les Américains et les Européens (Européens, Allemands et Britanniques), les résultats du référendum ont enregistré un très faible taux de participation de façon telle qu’on ne peut plus parler d’adhésion massive au projet de Kaïs Saïed qui « ne peut plus se targuer d’une légitimité populaire ».
Les Occidentaux estiment qu’ils avaient adopté, jusque-là, un profil modéré parce qu’on les a persuadés que le chef de l’Etat jouit d’un véritable plébiscite. Or, avec les résultats du référendum et le très faible taux de participation, selon eux, la thèse de la légitimité populaire ne tient plus la route.
Qu’en est-il de la tenue de l’Assemblée de la Francophonie à Djerba ?
Autre point de pression est celui concernant la possibilité du changement de lieu d’organisation de la prochaine assemblée de la Francophonie, prévue à Djerba, d’où la communication téléphonique effectuée par le ministre des Affaires étrangères, Othmane Jerandi avec son homologue canadien en vue de garantie son appui.
Et encore une fois, la diplomatie tunisienne ne dit rien à l’opinion publique nationale continuant sur son approche consistant à tout faire dans l’ombre.
En tout état de cause, les Tunisiens étaient curieux d’entendre la suite donnée par le chef de l’Etat à cette nouvelle campagne portant préjudice au principe de la souveraineté nationale.
Non, non et non à toute ingérence
Eh bien et comme l’on s’y attendait et comme s’attendaient ceux qui connaissent Kaïs Saïed de très près (caractère et tempérament).
Le président de la République a précisé, en effet, que « la Tunisie était un Etat libre, indépendant et souverain et que notre souveraineté et notre indépendance se placent au-dessus de toute autre considération… »
Rappelant les principes du droit international, Saïed a insisté sur l’indépendance de la décision nationale et son refus de toute forme d’ingérence dans les affaires nationales, il a précisé « que l’Etat tunisien est tout aussi souverain que les autres Etats, que la souveraineté intérieure revient au peuple tunisien…