Deux raisons militent notamment en faveur de la publication des résultats de l’audit sur les dons et prêts accordés à la Tunisie au cours des dix dernières années et qui commencent à faire couler beaucoup d’encre.
L’affaire du rapport d’audit sur tous les prêts et dons accordés à la Tunisie durant les dernières années, objet notamment de l’audience accordée le 1 et août 2022, semble devenir petit à petit une question d’un grand intérêt public. Outre la demande faite par l’ONG Al Bawssala pour l’accès au rapport rendu par le ministère des Finances sur les résultats de l’inventaire des dons et prêts accordés ces dix dernières années à l’État tunisien et aux institutions publiques, beaucoup de voix s’élèvent afin que toute la lumière soit faite sur la gestion des dons et prêts.
Et il est on ne peut plus logique que cette histoire de dons et de prêts éclate au grand jour pour pouvoir jusqu’à faire polémique. Et pour cause. Deux explications au moins à cela. La première explication est en rapport avec les doutes qui entourent les sommes récoltées au cours de ce qu’on appelle la décennie noire : 56 milliards de dinars selon l’analyste financier Bassem Ennaifer qui était, jeudi 4 août 2022, l’invité de Midi Show sur Mosaïque Fm. Ce n’est pas du reste la première fois que la question est posée en haut lieu. Souvenez-vous, cet audit a été examiné le 28 octobre 2021 au cours d’un Conseil des ministres.
« Compliquée et impossible »
On parle de sommes dont une partie est partie, par ailleurs, dans la poche de quelques-uns. L’autre explication tient au fait, donc, que, pour des citoyens, cela n’a fait qu’amplifier la corruption et priver le pays de sommes qui pouvaient largement améliorer son quotidien. Le chef de l’Etat a soutenu, le 3 aout 2022, en recevant le gouverneur de la banque Centrale de Tunisie (BCT), Marwane Abassi, et la ministre des finances, Sihem Boughdiri (notre photo), que « les montants accordés à la Tunisie sont importants et surtout les dons qui ont souvent profité à des personnes qui n’ont pas encore été inquiétées par la justice ».
Qu’en est-il au fait ? Seul cet audit, il va de soi, pourrait aider à faire éclater la vérité. Car, souvent la lutte pour le pouvoir des dernières années et quelquefois les exagérations des propos des uns et des autres, dont celles de certains qui ignorent tout de la gestion des finances et qui pensent que l’on peut quasiment aller au trésor et remplir pratiquement une sacoche et partir sans coup férir, peuvent nous faire croire jusqu’à des balivernes. Bassam Ennaifer a soutenu sur Mosaïque Fm que « le transfert des dons et des crédits vers des comptes courants privés est non seulement compliquée, mais impossible, la procédure étant contrôlée ».
Apporter de l’eau au moulin
Incontestablement, les citoyens ont droit au chapitre de l’information concernant le rapport sur les dons et prêts de la dernière décennie et de leur gestion. Dans toutes les démocraties, il y a un principe sacrosaint que les anglo-saxons appellent « the accountability ». Traduit en français par « responsabilité » encore « redevabilité », « The accountability » est un garant de la bonne gouvernance. Il signifie pour tous, les gouvernants, mais aussi pour les gouvernés, « l’obligation de rendre des comptes ».
Et incontestablement, en plus, cela ne peut qu’apporter de l’eau au moulin, pour reprendre une expression largement connue, aux autorités publiques. La découverte de « dépassements » survenus dans la gestion du pécule de l’Etat ne peut que légitimer les décisions prises contre les fraudeurs. En toute transparence. Et une fois de plus, cette affaire d’audit des dons et des prêts obtenus au cours des dix dernières années pose avec acuité la question de l’importance de la communication publique en Tunisie. La démocratie fait de la communication un bien auquel tout le monde peut et doit accéder.
Outre le fait d’avoir le cœur net et de pouvoir punir, s’il y a lieu de le faire, ceux qui ont été à l’origine de dépassements, la publication des résultats de l’audit ne peut qu’approfondir le débat public sur les voies et moyens d’apporter à l’avenir des solutions quant à notamment les corrections à apporter aux erreurs et autres imperfections constatées. Car, on l’oublie du reste souvent, les enquêtes, inspections et autres audits servent bien aussi à cela.