La question saharienne oppose, depuis des décades, l’Algérie et le Maroc. Des observateurs évoquent volontiers une crise passagère : mais une conjoncture qui se maintient, devient une structure. Elle bloque la formation du Maghreb et institue des relations de voisinage conflictuelles. Leurs partenaires nord-africains, incapables de rétablir la concorde entre les deux états, adoptent une neutralité stratégique.
Le leader Habib Bourguiba évita de se prononcer sur la question, espérant que ce nuage se dissipe. Mais le conflit se perpétua, conforté par les alliances différentielles des protagonistes : le Maroc optait pour le clan occidental alors que l’Algérie se rapprochait des pays de l’Est. Le président Ben Ali suivit cette stratégie équilibriste ! ce qui n’exclut pas cependant des rapprochements conjoncturels : un plus grand soutien marocain de la Tunisie, lots des escarmouches libyo-algériennes à Gafsa, puis un rapprochement évident de Mohamed Mzali, avec l’Algérie, outre la conjoncture délicate et bien complexe de l’unité tuniso-libyenne. Mais les gouvernements post-révolution, y compris celui de Béji Caid Essebsi, se rapprochèrent davantage de l’Algérie.
S’agit-il d’un malentendu ?
L’accueil dans la capitale tunisienne du chef des indépendantistes sahraouis du Front Polisario, Brahim Ghali, à l’occasion de la réunion du Ticad8 provoqua une crise. Est-ce à dire que le nouveau pouvoir tunisien reconnait le Front Polisario, mouvement des indépendantistes sahraouis ? Peut-on parler de l’adoption de la politique algérienne ? S’agit-il d’une décision fortuite, dans le cadre de l’invitation des chefs d’Etats africains ? Peut-on parler d’une méconnaissance du dossier par les nouvelles autorités et d’une ignorance de la position diplomatique historique de la Tunisie. En tout cas, Rabat a qualifié l’accueil de Brahim Ghali à la Ticad8 « d’acte grave et inédit, qui heurte profondément les sentiments du peuple marocain ». En conséquence, Rabat a annoncé samedi 26 août le rappel de son ambassadeur en Tunisie et l’annulation de sa participation au sommet Japon-Afrique (Ticad8).
Le lendemain, la Tunisie adopte une attitude similaire. Expliquant sa position, Tunis a assuré avoir « maintenu sa totale neutralité sur la question du Sahara occidental dans le respect de la légitimité internationale », prônant une « solution pacifique et acceptable par tous », mais « qu’elle respecte les résolutions des Nations unies et celle de l’Union africaine ».
Peut-on parler d’une annonce d’une rupture entre les deux Etats ? Il s’agirait plutôt d’une brouille diplomatique passagère résultant d’un malentendu.