La pression sur les ressources en eau, tant de surface que souterraines, a déjà franchi le seuil critique dans le bassin méditerranéen. La Tunisie fait partie des pays les plus menacés de stress hydrique.
Une situation de stress qui devrait s’amplifier avec l’augmentation de la demande en eau agricole (croissance démographique, transformation des régimes alimentaires) et la chute de l’offre (surexploitation des nappes, changement climatique…).
Compte tenu de son poids dans la consommation d’eau, l’agriculture demeure le champ d’investigation privilégié des politiques de gestion des ressources en eau. Aujourd’hui, les recherches s’orientent vers la collecte des eaux de pluie via des techniques d’irrigation plus
performantes, la plantation des semences résistantes à la sécheresse, le développement des techniques modernes de conservation de l’eau pour l’agriculture…
La recherche scientifique dans ce domaine avance à un rythme accéléré. Arup, le cabinet londonien de conseil en ingénierie, a arraché récemment des marchés portant sur des projets de contrôle des inondations qui augmentent la rétention d’eau naturelle en Pologne et en Angleterre. A Singapour, qui se distingue par la performance de ses techniques de transformation des eaux usées en eau potable, le géant de l’agroalimentaire Olam travaille
aujourd’hui sur la maîtrise de la consommation des eaux usées. Il a réussi à réduire les eaux usées dans 30% de ses fermes et plantations menacées de stress hydrique, situées dans 60 pays.
Les systèmes de dessalement existants trouvent des difficultés à se généraliser. Une technique à la fois onéreuse (énergivore) et polluante (pour 1 litre d’eau potable, 1,5
litre de saumure, une boue salée versée dans la mer, fort menaçante pour la faune). Certes, le système d’osmose basé sur l’énergie solaire atténue énormément les limites
du dessalement, mais des pistes de recherche restent à explorer pour rendre cette technique moins polluante. Alors que la sécheresse s’installe, les politiques publiques
demeurent orphelines de vision, comme en témoigne l’indifférence des décideurs devant le fleurissement des cultures très gourmandes en eau subventionnée. Un cadeau pour les pays importateurs.
L’heure est au courage politique et à l’imagination pour rénover la boite à outils conventionnels et mettre en place des politiques non conventionnelles de conservation et
de gestion de la demande en eau. Or, peut-on garantir une bonne gouvernance de l’eau lorsque les politiques publiques croupissent sous la dictature de l’immédiat ?
Article paru dans le Mag de l’Economiste Maghrébin n 851 du 31 août au 14 septembre 2022