Le président Vladimir Poutine qui vient d’ordonner la mobilisation de 300 000 réservistes, s’est dit prêt à utiliser tous les moyens, y compris les armes nucléaires tactiques, en cas d’attaque de la Russie. « Et ce n’est pas du bluff », avertit le maître du Kremlin.
Dos au mur, meurtri par le recul inattendu de son armée suite à la surprenante contre-offensive ukrainienne qui a permis de récupérer une partie de territoires perdus depuis le 24 février, Vladimir Poutine ira-t-il jusqu’au bout de l’escalade militaire en ayant recours à l’arme nucléaire?
Poutine : « Ce n’est pas du bluff »
Au moment de l’ouverture, mardi 20 septembre, de la 77ème Assemblée générale des Nations Unies à New York, Vladimir Poutine ayant brillé par son absence, comme son homologue chinois Xi Jinping, décréta mercredi 21 septembre dans une allocution préenregistrée de quatorze minutes, une mobilisation partielle. Soit 300 000 hommes. Elle est « principalement destinée à ceux qui ont servi dans les rangs des forces armées, qui ont certaines spécialités militaires et une expérience pertinente ». Soit « un peu plus de 1% de l’énorme bassin de réservistes que possède la Russie – environ 25 millions de personnes ».
Reste à voir comment l’armée russe pourra entraîner et équiper 300 000 réservistes. Alors que son offensive en Ukraine a révélé de graves difficultés logistiques ?
De plus, il a laissé entendre qu’il pourrait, dans certaines circonstances, au moment où « l’Occident utilise l’Ukraine pour diviser et détruire la Russie », utiliser des armes nucléaires tactiques en cas d’attaque de la Russie. « Et ce n’est pas du bluff », avertit-il, le ton martial et le regard noir.
Une guerre contre l’Occident
Il s’agit, dit Poutine, de « mesures urgentes nécessaires pour protéger la souveraineté, la sécurité et l’intégrité territoriale de la Russie. Il s’agit de soutenir les aspirations et la volonté de nos compatriotes, de déterminer leur propre avenir. Et de la politique agressive de certaines élites occidentales, qui tentent par tous les moyens de maintenir leur domination. Ils essaient de bloquer et de supprimer tout centre de développement indépendant souverain. Afin de continuer à imposer grossièrement leur volonté et leurs pseudo-valeurs à d’autres pays et peuples ». Avant de conclure: « Le but de cet Occident est d’affaiblir, de diviser et finalement de détruire notre pays. Ils ont franchi toutes les limites, des hommes politiques irresponsables parlant de la fourniture d’armes offensives à l’Ukraine et de frappes militaires contre la Russie ».
La menace est d’autant plus pesante que la Russie devrait prochainement intégrer les quatre régions ukrainiennes sous contrôle militaire du Kremlin: Louhansk, Donetsk, Zaporijjia et Kherson. C’est dans ces quatre zones que seront organisés, dès vendredi, des référendums pour le « rattachement » , selon l’expression de Vladimir Poutine.
Poutine : tel un animal blessé
Alors, faut-il vraiment prendre au sérieux cette terrifiante menace?
Rappelons qu’en 2014, lors de l’annexion de la Crimée, il l’avait déjà brandie. Au début de la guerre en Ukraine, il avait réitéré sa menace. Mais aujourd’hui, tel un animal blessé, étant humilié par les avancées de l’armée ukrainienne, grâce à l’appui massif des renseignements américains- ce qui qui a permis d’identifier les faiblesses du dispositif russe- l’homme fort de la Russie pourrait être tenté pour stopper les revers essuyés par ses troupes dans l’Est de l’Ukraine, où elles ont perdu quelque 6 000 kilomètres carrés, d’utiliser une arme de destruction massive chimique, biologique ou nucléaire.
Simples gesticulations politiques ?
Selon Jean-Marc Rickli, directeur des risques globaux et émergents au Centre de politique de sécurité de Genève, « les Occidentaux ne peuvent exclure l’utilisation de telles armes dans le cas où Poutine serait complètement acculé. Après diverses menaces plus ou moins directes par rapport à l’arme nucléaire dans le passé, le discours de mercredi matin est davantage politique et stratégique. In fine, il faut lire que l’annexion des territoires ukrainiens les sanctuariserait et légitimerait une utilisation potentielle future de la doctrine nucléaire russe de protection des intérêts nationaux. Considérant les allusions plus directes au recours aux armes de destruction massive, jamais suivies d’effets, les annonces de ce matin semblent plus être des gesticulations politiques ».
Bruits de bottes
Ceci dit, cette inquiétante perspective est plausible. D’autant plus inquiétante que la doctrine militaire russe prévoit la possibilité de recourir à des frappes nucléaires si des territoires considérés comme russes par Moscou sont attaqués.
La preuve? L’on a observé en Russie une ruée sur les vols au départ de Moscou vers Erevan, Tel-Aviv ou Istanbul. Avant que les autorités ne bloquent la vente de billets d’avion vers l’étranger aux citoyens russes de 18 à 65 ans. Inquiétant.