L’Observatoire tunisien de l’économie (OTE) a appelé, mardi, à amender la loi n°2018-35 du 11 juin 2018. Celle-ci porte sur la responsabilité sociétale des entreprises (RSE). Ce qui lui permettra d’inciter davantage les entreprises à être plus responsables et à rendre obligatoire la RSE.
L’observatoire a également proposé de faire de la RSE un outil pour protéger les droits de l’homme et obliger les entreprises à respecter les droits économiques, sociétaux et environnementaux. Et ce, lors d’une conférence de presse organisée, mardi, à Tunis, sur le thème «La RSE en Tunisie : vers un cadre légal, effectif, impactant et protecteur des droits de l’homme».
Par ailleurs, l’analyste-chargé de programme Finances publiques et justice fiscale à l’observatoire, Firas Zakraoui, a souligné que des enquêtes menées par l’observatoire ont permis de mettre l’accent sur les lacunes de la loi relative à la RSE en Tunisie.
Les principales lacunes
Parmi les principales lacunes, il a cité l’absence de sanctions contre les contrevenants, faisant remarquer que l’aspect non obligatoire de l’adhésion au processus RSE a fait que les entreprises polluantes n’y adhèrent pas.
Toujours selon Zakraoui, l’observatoire recommande une révision de la loi en question afin de prévoir les sanctions nécessaires contre les entreprises qui ne se conforment pas aux exigences RSE, conformément aux normes internationales en matière de RSE et à la Vision minière africaine (VMA) visant à promouvoir un développement équitable reposant sur l’utilisation prudente des ressources naturelles du continent.
De son côté, l’avocat et chercheur Adam Mokrani a estimé que la loi n°2018-35 s’apparente plutôt à une déclaration de principes en l’absence du caractère obligatoire de la composante RSE.
Les points faibles de cette loi
Il a par ailleurs considéré que l’absence d’incitations visant à encourager les entreprises à adhérer au processus RSE fragilise davantage cette loi.
Parmi les points faibles de cette loi, le chercheur a aussi évoqué l’absence de référence aux Principes directeurs de l’ONU sur la responsabilité sociale, le respect des droits de l’homme et de l’environnement.
Il a, en outre, critiqué l’absence dans le cadre de la loi d’une clause relative à la transparence et à la nécessité pour les entreprises de publier les rapports relatifs aux programmes RSE.
Mokrani a également mis l’accent sur les circonstances de promulgation de la loi relative aux RSE en Tunisie, rappelant que sa promulgation a été, en quelque sorte, dictée par le climat social tendu dans les zones de production de pétrole et par les pressions exercées sur les autorités publiques pour mettre en place un cadre légal régissant la RSE en Tunisie.
Il a indiqué que l’expérience des sociétés de l’environnement, de plantation et de jardinage, à Tataouine, Kébili et Gafsa, instaurée dans le cadre du processus RSE, constitue une forme de chômage déguisé et ne représente aucune utilité sur le plan social et économique et reflète la faiblesse de la vision RSE dans le pays.
Pour sa part, la vice-présidente de la Conect, Douja Gharbi, a souligné que le lancement, depuis 2015, d’un label RSE par la Conect vise à stimuler les entreprises à s’inscrire dans une dynamique d’amélioration continue de leur politique sociale et sociétale comme outil pour améliorer le climat des affaires, renforcer la compétitivité et consacrer le respect des droits de l’homme.
Elle a mis l’accent sur l’importance de promouvoir la culture RSE au sein des entreprises, s’opposant à l’idée de rendre obligatoire l’adhésion à ce processus et estimant qu’il serait plus judicieux de mettre en place des incitations et des avantages pour encourager les entreprises à être socialement responsables.
Elle a considéré que la nature du tissu économique national composé à raison de 97% de PME nécessite du temps pour sensibiliser quant à l’importance d’adopter une politique RSE; les entreprises étant en majorité confrontées à des difficultés financières.
Avec TAP