Hospitalisée, hier lundi, après avoir été victime d’un malaise de santé à cause de la grève de la faim qu’elle observe depuis samedi dernier devant le siège du ministère de l’Intérieur, la présidente du PDL, Abir Moussi, tient le président de la République pour responsable de son malaise. Accusant dans la foulée le ministre de l’Intérieur de « torture » et de « tentative d’assassinat ». Pas moins que cela.
Abir Moussi aime frapper les esprits. En animal politique qui manie parfaitement l’art subtil de la communication et qui cherche souvent à attirer la lumière des projecteurs sur ses faits et gestes, elle ne se prive pas d’en rajouter; parfois avec un zeste de théâtralité.
La puissance des images
Ainsi, transportée, hier après-midi, dans une clinique privée après avoir été victime d’un malaise de santé à cause de la grève de la faim qu’elle observe depuis samedi dernier devant le siège du ministère de l’Intérieur pour le troisième jour consécutif, elle a eu l’idée, alors qu’elle était à demie consciente, de s’envelopper dans le drapeau rouge et blanc. Une image choc qui renvoie dans nos traditions au martyr que l’on couvre du drapeau national!
« Des crimes sont commis au vu et au su de tout le monde, devant le silence des organisations nationales et internationales de défense des droits de l’Homme et des institutions censées surveiller la bonne application des normes électorales». Ainsi déplorait-elle dans une vidéo diffusée hier lundi en direct sur sa page FB.
Faut-il en conclure que cette forte mise en scène est destinée à prendre en témoin les défenseurs des droits de l’Homme? Elle, la fière Bourguibienne qui se targue de ne jamais laisser intervenir la main de l’étranger dans les affaires internes de son pays?
Il convient de noter que la présidente du PDL avait entamé samedi 15 octobre une marche intitulée « Marche de colère » et programmée conjointement avec la fête d’Évacuation. Laquelle était suivie d’un sit-in et d’une grève de la faim. Et ce, pour exprimer son opposition au « gouvernement du président Kaïs Saïed » et pour dénoncer la détérioration de la situation socio-économique du pays.
« Torture » et « tentative d’assassinat »
Ainsi, assise à même le sol, s’appuyant de dos sur les barrières de sécurité dressées devant le siège du ministère de l’Intérieur, son PC sur les genoux, Abir Moussi menaçait dans la même vidéo de déposer une plainte contre le ministère de l‘Intérieur pour « torture » et tentative d’assassinat ». Affirmant au passage que le ministère de l’Intérieur « a obligé les cafés à fermer leurs portes et leur a interdit de fournir des chaises » aux manifestants.
Parler de non assistance de la part du ministère de l’Intérieur aux partisans de la cheffe du parti destourien en fermant délibérément les cafés avoisinant et en les privant d’eau est une chose. Mais accuser les services de Taoufik Charfeddine, un magistrat de son état, de « torture » et de « tentative d’assassiner » est une regrettable envolée verbale; causée certainement par la fatigue et la tension dues à la grève de la faim.
Alors, pointant du doigt la responsabilité du président de la République, elle a affirmé, lundi 17 octobre juste avant son hospitalisation, que son état de santé « s’est nettement détérioré ». Tenant nommément le président de la République en personne « pour responsable ».
« Le calife m’a empêchée de m’asseoir sur une chaise et d’exercer mon droit de manifester pacifiquement contre le processus de destruction de l’État », a aussi posté Abir Moussi.
La grève de la faim qu’elle observe, a-t-elle ajouté, est une manière « de mettre en garde le peuple tunisien contre les risques d’une dérive dictatoriale et répressive. Et ce, à travers une Constitution qui a été imposée et élaborée dans une approche unilatérale et un faux référendum ».
Abir Moussi : « Sièges en carton dans une pièce en carton »
C’est dans ce sens que la présidente du Parti destourien libre, Abir Moussi, a critiqué ceux qui vont se rendre, ce lundi 17 octobre à l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE) pour déposer leur dossier de candidature au scrutin législatif du 17 décembre prochain. Les qualifiant « de vendre la patrie » puisqu’ils cherchent à se présenter à des « élections illégales »; d’obtenir « des sièges en carton pour jouer le rôle de comparses dans la pièce en carton ». C’est ce que postait Mme Moussi, lundi 17 octobre 2022 sur sa page FB.
« Je poursuivrai en justice les tyrans et défendrai mon droit et ceux de mon parti et de mon pays, jusqu’à la dernière pulsation de mon cœur », s’est-elle écriée.
Langue de bois
Pour sa part, le chef du département de l’information au ministère de l’Intérieur, Faker Bouzghaya, a déclaré dimanche à la TAP que le mode de protestation « ne doit pas toucher l’ordre public ni le travail des fonctionnaires et des commerçants sur les lieux ». Il ajoutait que « le ministère de l’Intérieur, un ministère souverain et sensible, a installé les barrières de sécurité autour de son siège non pas pour empêcher les manifestations, mais pour se protéger du terrorisme ».
« Le ministère de l’Intérieur respecte la liberté et le droit de manifester. De même qu’il œuvre à protéger les protestataires et à appliquer la loi à tous, sans discrimination entre les parties politiques et sociales. Et aucune restriction n’a été imposée aux manifestants ». C’est ce qu’il soulignait dans une coutumière langue de bois.
Enfin, au-delà de l’excès de langage, est-il permis de déduire que la cheffe du parti destourien a changé son fusil d’épaule; et ce, en mettant le chef de l’Etat dans sa ligne de mire?
Choisir le moindre mal
Toute porte à croire qu’Abir Moussi est persuadée que Kaïs Saïed, qui craint que le parti destourien par candidats interposés ne s’empare d’une confortable majorité à la future Assemblée, est désormais prêt à conclure une trêve politique avec son irréductible ennemi, le mouvement Ennahdha de Rached Ghannouchi. Par conséquent, il fera tout pour l’écarter, pour ne pas « cohabiter » avec le PDL. Question de choisir, selon lui, entre la peste et le choléra.